Les cours du pétrole étaient en repli, hier, en Asie, les marchés craignant les effets de la flambée des prix du brut sur l'économie mondiale dans le contexte de la crise iranienne. Le baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en avril cédait 61 cents, à 107,95 USD dans les échanges électroniques du matin. Le Brent de la mer du Nord pour livraison à même échéance abandonnait 42 cents à 123,75 USD."Les craintes de voir les prix élevés du pétrole et un dollar fort peser sur la croissance économique ont compensé les inquiétudes concernant l'Iran et de possibles perturbations de l'offre", a noté la maison de courtage Phillip Futures. Les investisseurs étaient dans l'attente du résultat de la deuxième opération de prêts illimités à trois ans de la Banque centrale européenne (BCE), prévu aujourd'hui. Cette nouvelle opération laisse présager un nouvel afflux de liquidités sur les marchés, après une première opération du genre, en décembre, au cours de laquelle l'institut monétaire avait prêté 489 milliards d'euros aux banques de la zone euro. La BCE a annoncé la veille que les crédits au secteur privé en zone euro avaient légèrement augmenté en janvier sur un an mais cette stabilisation apparente n'a pas encore pleinement profité à l'économie réelle, le taux de croissance des prêts aux ménages et des prêts immobiliers ayant ralenti dans l'intervalle. La pression à la baisse sur les cours du pétrole est cependant pondérée par la crise entre l'Iran et les Occidentaux sur le programme nucléaire de Téhéran. La France a "fermement" condamné, avant-hier, la poursuite par l'Iran d'"activités sensibles" dans le domaine nucléaire après le rapport de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Téhéran menace d'interrompre immédiatement ses approvisionnements d'or noir à l'Europe, bien avant la mise en place en juillet de l'embargo de l'Union européenne. A la suite de l'Europe, le Japon (deuxième plus gros client de l'Iran) aurait désormais l'intention de réduire ses importations de brut iranien, ce qui exacerbe les tensions sur le marché mondial. le brut trébuche en Europe Les prix du pétrole se repliaient la veille en fin d'échanges européens, pénalisés par un mouvement de prises de bénéfices après avoir touché vendredi des sommets inédits depuis mai 2011, mais également assombris par les inquiétudes sur la vigueur de la reprise économique mondiale. Peu avant la clôture, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en avril valait 124,09 dollars, en baisse de 1,38 dollar par rapport à la clôture de vendredi. Après avoir atteint, vendredi, 125,55 dollars à Londres et frôlé les 110 dollars à New York, leurs plus hauts niveaux depuis près de dix mois, les cours du baril reprenaient leur souffle sur un marché nerveux. "Après une hausse presque ininterrompue depuis début février, des investisseurs ont choisi d'engranger quelques bénéfices", observait David Morrison, analyste du courtier GFT Markets. Alors que l'euro fléchissait face au dollar après une rencontre du G20 en demi-teinte, la remontée du billet vert rendait moins attractifs les achats de brut libellés en dollars, ce qui pesait sur les prix, tout comme le regain de prudence sur l'économie mondiale, notait-il. La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde, a ainsi estimé dimanche que les pays du G20 devaient "renforcer leur résistance à de nouveaux chocs qui pourraient provenir de systèmes financiers toujours fragiles, d'une dette publique et privée élevée, et d'une hausse des cours mondiaux du pétrole". Renforçant les incertitudes au sujet de la zone euro, les ministres des Finances du G20 ont également appelé l'Europe à prendre une décision en mars sur la dimension de son bouclier contre la crise de la dette, avant que le reste du monde n'envisage de renforcer les ressources du FMI. Par ailleurs, la suggestion du secrétaire au Trésor des Etats-Unis Timothy Geithner de débloquer une partie des réserves stratégiques de pétrole des Etats-Unis si cela s'avérait nécessaire "a également contribué à plomber les cours du baril", ajoutait David Morrison. Cependant, "pour le moment, les prix se contentent d'abandonner leurs gains de la séance de vendredi, et la crise entre l'Iran et les pays occidentaux continue de soutenir le marché", tempérait-il. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a reconnu vendredi des "divergences majeures" avec Téhéran, précisant que l'Iran avait triplé la production d'uranium enrichi jusqu'à 20 % depuis novembre --se rapprochant donc de la technologie nécessaire pour fabriquer une bombe. Face au durcissement des sanctions internationales, l'Iran menace d'interrompre ses approvisionnements d'or noir à l'Europe, bien avant la mise en place en juillet de l'embargo de l'Union européenne (UE), alimentant les craintes sur l'offre mondiale de brut et l'envolée des cours du baril. "Cette hausse s'explique par des craintes, renforcées encore par les perturbations de la production au Soudan du Sud, au Yémen et en Syrie, mais dans la réalité, le marché reste pour le moment suffisamment approvisionné", tempérait Andrey Kryuchenkov, analyste de VTB Capital. "Si les tensions géopolitiques devaient s'apaiser quelque peu, alors les inquiétudes du marché se tourneraient vers le front de demande" et des perspectives de consommation énergétique mondiale plutôt ternes, estimait M. Kryuchenkov. Le brut finit en baisse à New York Les cours du pétrole ont fini en baisse la veille à New York, dans un marché moins enclin au risque après une réunion des ministres des Finances du G20 ce week-end à Mexico jugée décevante par les investisseurs. Le baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en avril a cédé 1,21 dollar par rapport à vendredi sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), pour finir à 108,56 dollars. "Comme pour tous les autres marchés, ce sont les déclarations négatives du G20 qui ont joué aujourd'hui sur les cours du brut", a estimé Bart Melek, de TD Securities. Les Etats-Unis ont annoncé, avant-hier, que les nouvelles sanctions américaines contre les banques qui font affaire avec la banque centrale d'Iran pour acheter du pétrole entreraient en vigueur au plus tôt à la fin du mois de juin. Par ailleurs, la baisse des cours du brut était contrebalancée par la publication d'un indicateur encourageant pour la reprise de la première économie mondiale.