Le débat s'intensifie dans l'entourage du président George Bush pour savoir s'il ne devrait pas, face aux pressions croissantes du Congrès, prendre les devants en fixant dès cet été un calendrier de retrait graduel des troupes américaines des zones d'Irak où elles sont les plus exposées, rapporte le New York Times. Le quotidien, qui cite des sources autorisées et des conseillers à la Maison blanche, précise que l'entourage présidentiel craint la défection progressive des derniers soutiens au sein du Sénat américain à la politique volontariste et offensive de Bush. Le conseiller de Bush à la sécurité nationale, Stephen Hadley, et Karl Rove, son éminence grise de longue date, craignent que le flux des critiques dans le camp républicain ne prenne une nouvelle ampleur cette semaine avec ce que pourra dire John McCain de retour d'Irak. Ancien du Viêtnam, le sénateur de l'Arizona, qui est candidat à l'investiture républicaine pour la présidentielle de 2008, a politiquement souffert de son soutien à la stratégie de Bush en Irak, et il n'est pas exclu qu'il affirme que celle-ci s'est avérée incapable de permettre au gouvernement irakien de prendre ses propres affaires en main. Le président et ses conseillers pensaient pouvoir attendre, avant d'envisager tout changement de stratégie, le 15 septembre, date à laquelle le général David Petraeus, commandant en chef de l'US Army en Irak, et l'ambassadeur des Etats-Unis à Bagdad, Ryan Crocker, doivent présenter au Congrès un rapport sur les progrès accomplis depuis l'envoi de renforts en Irak au premier semestre. Mais, alors que le Sénat se prépare cette semaine à engager ce qui s'annonce comme un débat animé et passionné sur l'avenir et le financement de l'intervention américaine en Irak, le président Bush apparaît de plus en plus isolé, reconnaît son entourage. Dimanche, le secrétaire à la Défense Robert Gates a été contraint d'annuler une tournée prévue de longue date en Amérique latine pour contribuer à la mise au point du "rapport d'étape" qui doit être soumis au Congrès le 15 juillet au sujet des résultats obtenus à la suite de l'arrivée en Irak de ces quelque 30.000 militaires supplémentaires. Ce rapport prend en effet une importance cruciale depuis que les parlementaires démocrates et républicains haussent le ton contre la stratégie suivie par Bush, qui a enregistré la semaine passée la défection de quatre nouveaux sénateurs de son parti, dont Pete Domenici (Nouveau Mexique). L'entourage de Bush juge dès lors que, s'il veut enrayer l'hémorragie en cours chez ses partisans, il doit avoir la sagesse de redéfinir plus précisément la mission de l'armée américaine en Irak qui impliquerait un retrait à terme même s'il n'est que graduel. Telle était la stratégie recommandée à la fin de l'an dernier par le Groupe d'études bipartisan sur l'Irak coprésidé par l'ancien secrétaire d'Etat républicain James Baker, un document dont Bush n'a tenu aucun compte. Le bilan que tireront le 15 septembre Petraeus et Crocker de l'effort militaire supplémentaire consenti cette année - semble aujourd'hui revêtir la forme d'une date butoir pour Bush et non plus le début d'un vaste débat sur les buts de la guerre, a confié au New York Times un conseiller de la Maison blanche. Selon le journal, Gates pousse Bush à réduire de moitié d'ici la fin de l'année le nombre des unités américaines qui patrouillent dans les quartiers les plus exposés de Bagdad et de la périphérie de la capitale. Les unités restant sur le terrain seraient chargées de missions limitées comme l'entraînement des forces irakiennes, la surveillance des frontières du pays et la lutte contre Al Qaïda en Mésopotamie, le groupe radical de la guérilla sunnite qui se réclame d'Oussama ben Laden.