Le président paraguayen Fernando Lugo a été officiellement démis de ses fonctions, avant-hier. Au terme d'un procès de quelques heures mené devant le Parlement, 39 sénateurs sur 43 ont déclaré le président coupable, entraînant sa destitution immédiate prévue par la constitution. M. Lugo, a qui il restait un peu moins d'un an de mandat, était accusé d'avoir "mal rempli ses fonctions" après des heurts sanglants survenus la semaine dernière dans le nord-est entre policiers et paysans. Les affrontements avaient fait 17 morts. L'actuel vice-président Federico Franco a été investi dans la foulée, jusqu'à l'élection d'un nouveau président en août 2013. "Même si la loi a été tordue comme une branche fragile dans le vent, j'accepte la décision du Congrès", a réagi Fernando Lugo, ancien évêque de 61 ans ayant quitté les ordres pour se présenter à la présidentielle. Il a invité ses partisans au calme. Heurts à Asunción Plusieurs milliers de manifestants réunis aux abords du parlement ont tenté de forcer le cordon de police après l'annonce du vote du Congrès. Les forces de l'ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes, de canons à eau et de balles en caoutchouc pour disperser la foule. Plusieurs dirigeants de gauche d'Amérique latine ont annoncé qu'ils ne reconnaîtraient pas l'autorité de Federico Franco. La présidente argentine Cristina Fernandez a également indiqué que son pays "n'entérinerait pas le coup d'Etat" au Paraguay. L'élection de Fernando Lugo en 2008 a mis fin à six décennies de pouvoir du parti Colorado. Il s'était engagé à améliorer le sort des catégories les plus pauvres et à lutter contre la corruption mais il s'est heurté à un Congrès hostile. Il a en outre pâti de révélations sur l'existence d'enfants naturels, ce qui a fini par faire éclater sa coalition. Federico Franco prend la tête du Paraguay L'ex-vice-président Federico Franco a prêté serment comme nouveau président du Paraguay peu après la décision du Parlement de destituer Fernando Lugo, qui a accepté de quitter le pouvoir. M. Franco, 49 ans, a été investi lors d'une brève cérémonie au Congrès d'Asuncion, peu après le départ de son prédécesseur, reconnu coupable par le Parlement d'avoir mal rempli ses fonctions après des heurts sanglants survenus la semaine dernière dans le nord-est entre policiers et paysans qui ont fait 17 morts. Il s'agit de l'engagement le plus important qui soit et je pourrai seulement le remplir avec l'aide et la collaboration de chacun d'entre vous, a déclaré M. Franco peu après son investiture, aux côtés de son épouse, la députée Emilia Alfaro. Il a ensuite revêtu l'écharpe tricolore et le bâton de commandement sous les applaudissements des élus présents au siège du Parlement bicaméral. M. Franco est un dirigeant du Parti libéral. Cette formation, qui soutenait M. Lugo, lui a officiellement retiré son appui jeudi sur fond de querelles politiques récurrentes et elle était en première ligne de la fronde menée contre l'ex-président. Venezuela, Nicaragua et Bolivie dénoncent un putsch déguisé Le Venezuela, le Nicaragua et la Bolivie ont dénoncé un coup d'Etat déguisé au Paraguay, lors d'une réunion extraordinaire de l'Organisation des Etats américains (OEA) consacrée à la crise dans ce pays où le président fait l'objet d'une procédure de destitution. Nous allons assister à un coup d'Etat par des moyens détournés, si l'autorité du président continue à être bafouée, a expliqué l'ambassadeur du Nicaragua, Denis Moncada, qui a demandé à l'OEA de ne pas reconnaître un éventuel nouveau gouvernement paraguayen, dans le cas où l'actuel président Fernando Lugo serait destitué. Nous dénonçons cette tentative déguisée de coup d'Etat, a pour sa part déclaré la représentante du Venezuela, Carmen Velasquez. L'ambassadeur de Bolivie, Diego Pary, s'est exprimé dans des termes similaires. Le secrétaire général de l'organisation José Miguel Insulza n'a lui pas employé le terme de coup d'Etat, car le processus légal et constitutionnel est respecté, mais il a jugé que la démocratie paraguayenne ne serait en rien endommagée en prenant plus de temps et en créant de meilleures conditions pour la défense. Alors que se déroulait la réunion extraordinaire de l'OEA à Washington, à Asuncion, les avocats du président paraguayen présentaient les arguments de la défense de leur client, première étape du procès en destitution au Sénat. La chambre haute doit avaliser la démarche entamée par la Chambre des députés qui accuse M. Lugo d'avoir mal rempli ses fonctions à la suite des récents heurts sanglants entre policiers et paysans sans terre. M. Lugo a déposé un recours en inconstitutionnalité devant la Cour suprême pour tenter de freiner la procédure. La porte-parole du département d'Etat Victoria Nuland s'est dite inquiète. Nous surveillons la situation de près, a-t-elle ajouté. Bien évidemment nous souhaitons une issue qui soit en conformité avec la démocratie et la Constitution du Paraguay.