L'agence de notation financière Moody's a annoncé, avant-hier, avoir modifié de stable à négative la perspective attachée à la note de la banque britannique Barclays, en proie à un scandale sur des manipulations de taux interbancaires. L'agence de notation précise dans son communiqué avoir changé cette perspective sur la note C-/baa2 de solidité financière de Barclays car elle s'inquiète notamment des démissions intervenues depuis le début de la semaine au plus haut de la direction du groupe, dont le président Marcus Agius et le directeur général Bob Diamond. L'agence considère également que les incertitudes qui entourent la gouvernance de l'entreprise sont négatives pour les détenteurs d'obligations. En revanche, la note A2 de la dette à long terme conserve la perspective négative qui lui était déjà attachée car Moody's s'attend à ce que le gouvernement britannique réduise à moyen terme ses mesures de soutien aux grands établissements bancaires du pays. La semaine dernière, Barclays a révélé qu'elle allait payer l'équivalent de 290 millions de livres (environ 360 millions d'euros) pour mettre fin aux enquêtes des régulateurs britannique et américain dans cette affaire de manipulation des taux interbancaires. Dans la foulée, M. Diamond a renoncé à son bonus pour l'année 2011. SP attribue une perspective négative, contre stable auparavant L'agence de notation financière Standard and Poor's (SP) a placé sous perspective négative, contre stable auparavant, la note à long terme de la banque britannique Barclays, en proie à un scandale sur des manipulations de taux interbancaires. L'agence, qui a confirmé la note de contrepartie A+/A-1, explique que cette décision intervient à la suite de la démission du directeur général Bob Diamond. La semaine dernière, Barclays a révélé qu'elle allait payer l'équivalent de 290 millions de livres (environ 360 millions d'euros) pour mettre fin aux enquêtes des régulateurs britannique et américain dans cette affaire de manipulation des taux interbancaires Libor et Euribor entre 2005 et 2009. Lundi matin, le président du conseil d'administration de la banque Marcus Agius a démissionné pour tenter d'apaiser la tempête et de sauver le directeur général. Mais le lendemain, la banque annonçait le départ de M. Diamond avec effet immédiat, puis quelques heures plus tard celui du directeur des opérations Jerry del Missier. La démission de M. Diamond intervient à l'issue d'une période au cours de laquelle Barclays a fait l'objet d'une attention intense de la part des médias, de la classe politique et des investisseurs, a souligné SP. L'agence a précisé que la solide et stable équipe de direction de Barclays et sa stratégie claire faisaient partie des facteurs sur lesquels s'appuyaient la notation de la banque. Nous pensons que M. Diamond était fortement à l'origine de la croissance et de la performance récurrente de la banque d'investissements, qu'il a dirigée pendant plusieurs années avant de devenir directeur général du groupe début 2011. Un peu plus tôt, l'agence de notation Moody's avait indiqué avoir modifié de stable à négative la perspective attachée à la note C-/baa2 de solidité financière de la banque, s'inquiétant des conséquences des démissions. En revanche, la note A2 de la dette à long terme a conservé la perspective négative qui lui était déjà affectée par Moody's. Barclays a manipulé le Libor pour gonfler ses profits La banque britannique Barclays s'est livrée pendant quatre ans à des manipulations de taux interbancaires pour gonfler ses profits, limiter ses pertes puis préserver son image, selon les rapports d'enquête sur cette affaire qui a décapité la direction du groupe. "A de nombreuses occasions et parfois quotidiennement pendant une période de quatre ans, à partir de 2005", le groupe Barclays et en particulier sa filiale de banque d'investissements Barclays Capital, "ont tenté de manipuler et fait des déclarations erronées concernant deux taux d'intérêts de référence mondiale, le (britannique) Libor et l'(européen) Euribor", a indiqué dans son rapport la Commodity futures trading commission (CFTC), un régulateur financier américain. La CFTC a souligné que des "centaines de milliers de milliards de dollars de transactions" s'appuient chaque année sur ces taux. Barclays a révélé, mercredi dernier, qu'elle allait payer l'équivalent de 290 millions de livres, soit environ 360 millions d'euros, pour mettre fin aux enquêtes des régulateurs britannique et américain dans cette affaire de manipulation des taux interbancaires. Ces taux sont une moyenne des taux pratiqués par un panel de banques (dont Barclays) pour des prêts entre elles. Ils affectent le rendement de produits dérivés et, indirectement, les crédits aux ménages et aux entreprises. Ils sont fixés une fois par jour par l'Association des banquiers britanniques (BBA) pour le Libor et la Fédération bancaire européenne (FBE) pour l'Euribor. Selon les autorités des deux côtés de l'Atlantique, qui n'identifient pas les intervenants ni les autres banques impliquées, Barclays a communiqué à maintes reprises des taux inférieurs ou supérieurs aux taux réels en fonction des intérêts du moment. Cette action a nécessité la complicité des courtiers de dérivés et du département trésorerie de la banque, qui transmet les taux à la BBA et la FBE. Les échanges de courriers électroniques entre courtiers et agents de la trésorerie, retranscrits dans les rapports, laissent peu de doutes. "Nous avons une autre échéance importante demain et, avec l'évolution du marché, j'espérais que l'on pourrait fixer des Libors aussi élevés que possible", écrit un courtier à un agent. Un autre donne ses instructions sans détours: "Elevé 1m (taux élevés pour l'échéance à 1 mois, ndlr) et élevé 3m si poss(ible), s'il te plaît. Ai un t(rès) important 3m qui arrive (à échéance) dans les dix prochains jours". Ou encore: "Nous avons besoin d'un taux 3m très bas, (sinon) ça pourrait nous coûter une fortune. On apprécierait un coup de main". Un autre: "Je te dois gros! Viens un jour après le boulot et j'ouvre une bouteille de (champagne) Bollinger". Un agent à un courtier: "Pour toi, je ferai n'importe quoi. J'allais faire 78 et 92,5. C'est dur de faire plus bas sur le 3 (mois). En fait, si tu ne voulais pas un (taux) bas, j'aurais mis 93 au moins". L'Autorité britannique des services financiers (FSA), qui a infligé une amende record de 59,5 millions de livres à Barclays, a précisé dans son rapport qu'entre janvier 2005 et juin 2009, les traders ont envoyé aux agents au moins 257 demandes de modification du taux de Barclays. Une faible partie à la demande de traders d'autres établissements, initiés à la combine. Par ailleurs, les autorités ont découvert que "Barclays, sur instruction de hauts responsables, s'est livré à d'autres comportements illégaux graves". Entre août 2007 et début 2009, ces responsables ont demandé à ce que des taux inférieurs soient communiqués à la BBA et la FBE pour faire taire les interrogations, en particulier dans les médias, sur la santé de la banque. Un taux élevé pouvait en effet être considéré, les taux individuels du panel sont rendus publics, comme un signe que ses concurrentes l'estimait moins solide financièrement.