Le Lion d'or du meilleur long métrage à la 69ème Mostra de Venise a été remporté, dans la soirée de samedi dernier, par le film choc "Pieta" du cinéaste sud-coréen Kim Ki-duk sur la tentative de rédemption d'un petit malfrat qui redécouvre sa part d'humanité dans une société hostile corrompue par l'argent. "Je désire remercier tous ceux qui ont contribué à ce film ainsi que Venise, le festival de Venise et tout le public italien, et enfin les membres du jury", a déclaré le cinéaste en recevant son prix. Moment extraordinaire et émouvant, le réalisateur a ensuite chanté une chanson en coréen sur la scène du Palais du Cinéma de Venise. Accompagné sur le podium de l'interprète principale du film, Cho Min-soo, il a été salué par de longs applaudissements. Pour le titre du film, Pieta, le réalisateur affirme s'être inspiré du chef-d'œuvre de Michel-Ange pour célébrer le lien indissoluble d'une mère avec son fils, mais aussi mettre en exergue la souffrance insoutenable que cette relation peut engendrer. Une ville industrielle en mutation, belle dans sa laideur anonyme, est le territoire d'un petit malfrat solitaire (Lee Jung-jin) chargé de récupérer auprès de pauvres hères les créances d'un usurier. Quand ils sont insolvables, il les estropie sans état d'âme pour encaisser l'argent de l'assurance. Une routine angoissante bouleversée par l'arrivée d'une femme (Cho Min-soo) qui prétend être la mère qui l'abandonné à la naissance il y a 30 ans. S'esquisse alors une lancinante tentative de rédemption, parfois plus insupportable encore que la solitude résignée et ponctuée de coups de théâtre eux aussi cruels. Kim Ki-duk dresse un portrait peu amène d'une société dont le seul moteur est l'argent. L'argent est le début et la fin de toute chose, déclare sentencieusement l'un de ses personnages. Selon le cinéaste, les gens de notre époque sont obsédés par l'illusion que l'argent peut tout résoudre. "Pieta" prend la forme d'une ode crépusculaire interprétée par un couple d'acteurs à la beauté terrifiante qui déboussole toutes les certitudes : la beauté devient laide, la laideur devient sublime. Le cinéaste de 51 ans, un habitué des festivals européens, avait déjà remporté à Venise en 2004 le Lion d'argent du meilleur réalisateur pour Bin-jip. Par ailleurs, Les acteurs américains Joaquin Phoenix et Philip Seymour Hoffman ont remporté conjointement, samedi dernier, à Venise, la Coupe Volpi du meilleur acteur pour leurs rôles dans The Master de Paul Thomas Anderson, inspiré de la vie de Ron Hubbard, le fondateur de l'église de scientologie. "Merci beaucoup. Je viens de descendre de l'avion il y a cinq minutes. J'ai mis mon costume dans les toilettes", a plaisanté Philip Seymour Hoffman en recevant le prix, excusant l'absence de Joaquin Phenix. "Joaquin Phoenix est une force de la vie, indomptable", a-t-il ajouté. Joaquin Phoenix incarne un vétéran de la Seconde Guerre Mondiale alcoolique dont la vie est bouleversée par sa rencontre avec son maître, joué par Philip Seymour Hoffman, prophète d'une idéologie pseudo-scientifico-médicale qui, à base d'hypnose et de psychologie de comptoir, promet de sauver les âmes égarées.