Des risques politiques "importants" pèsent sur le nouveau programme de rachat d'obligations publiques de la Banque centrale européenne (BCE) en raison des conditions qui seront exigées des pays bénéficiaires, a estimé le FMI dans un rapport publié, hier. Ce programme "jouit d'une plus grande crédibilité, mais il fait face à d'importants risques liés à des facteurs politiques et à sa mise en application", écrit le Fonds monétaire international dans son rapport sur la stabilité financière dévoilé à Tokyo. Face à la crise de la dette, la BCE a annoncé début septembre un nouveau programme de rachat illimité d'obligations publiques réservé aux Etats ayant requis l'aide du fonds de secours européen (MES) qui, en contrepartie, exigerait des efforts accrus d'assainissement de leurs finances publiques. "Les gouvernements doivent désormais demander le soutien (du fonds de secours, ndlr), accepter les conditions et mettre en œuvre les réformes", souligne le FMI à l'heure où les programmes d'austérité soulèvent une résistance croissante en Europe. Grâce au programme de la BCE, "la taille du pare-feu (de la zone euro) est devenu suffisamment flexible" mais "les marchés peuvent considérer que ce mécanisme est virtuel et pas encore réel", a déclaré José Vinals, directeur du département des marchés internationaux au FMI. Lors d'une conférence de presse, M. Vinals, a notamment redouté que des pays en difficulté hésitent à solliciter l'aide de la BCE "en raison de considérations de politique intérieure". "Ce serait vraiment regrettable", a-t-il ajouté. L'Espagne, dont les taux d'intérêt sur les emprunts à dix ans flirtent avec les 6%, rechigne encore à demander d'actionner ce nouveau mécanisme d'aide qui n'a donc jamais été testé. Le Fonds prévient par ailleurs que le programme de la BCE ne garantira pas "catégoriquement" le retour à une dette viable "en raison de l'impact incertain" des conditions imposées aux pays, qui peuvent parfois freiner encore davantage la croissance et aggraver les déficits. Le FMI assure également que ce programme doit s'accompagner d'une recapitalisation "crédible" des banques et d'une union bancaire. Fin septembre, la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, avait assuré que le programme de la BCE marquait un "tournant" dans la crise. Le fond revoit en hausse l'ampleur du désendettement bancaire Le désendettement des principales banques de la zone euro pourrait être plus important que prévu et peser davantage sur une croissance déjà en berne, a estimé le Fonds monétaire international (FMI) dans un rapport sur la stabilité financière, hier à Tokyo. Le FMI estime désormais que le montant total de ce désendettement entre septembre 2011 et fin 2013 pourrait atteindre jusqu'à 4 500 milliards de dollars (12% des actifs bancaires), contre 3 800 milliards de dollars dans sa précédente évaluation en avril, ce qui va amputer l'offre de crédit et grever l'activité. Dans ce scénario extrême, la périphérie de la zone euro (Espagne, Portugal, Grèce, etc.) pourrait voir son produit intérieur brut (PIB) diminuer de 4 points de pourcentage en 2013. L'impact serait moindre sur les pays les plus solides de la zone mais resterait conséquent (1,5 point de pourcentage). Le FMI retient toutefois un scénario de travail moins radical où le désendettement sur la période porterait sur un montant total de 2 800 milliards de dollars (7,3% des actifs bancaires). Entre septembre 2011 et juin 2012, les 58 principales banques européennes ont déjà cédé 600 milliards de dollars d'actifs afin de réduire leur exposition aux risques, estime le Fonds. Les banques françaises ont réduit la quantité de leurs actifs libellés en dollars, notamment les produits dérivés, souligne le Fonds. Selon le FMI, les conséquences de cette raréfaction du crédit se font diversement sentir à l'intérieur de la zone euro. Il y a désormais un écart important au sein de la zone euro où le crédit bancaire a continué à augmenter dans les pays solides alors que les prêts ont chuté dans la " périphérie ", souligne le Fonds. Avec ce mouvement de désendettement plus vaste que prévu, une intensification de la pression sur les banques des pays en difficulté de la zone euro pourrait avoir un impact important dans les pays émergents d'Europe mais également en Amérique du Sud. Le FMI note toutefois que depuis juin les actions de la Banque centrale européenne ont permis d'alléger la pression sur les banques de la zone euro, conduisant à ralentir le rythme du désendettement.