L'Agence grecque de gestion de la dette (PDMA) a lancé, hier, la délicate opération de rachat d'une partie de la dette souveraine du pays détenue par les investisseurs privés, convenue avec ses bailleurs de fonds UE et FMI pour la maintenir sous perfusion. L'Agence a lancé "une invitation" qui expirera "le vendredi 7 décembre" à l'adresse des "détenteurs de titres éligibles" pour participer à l'opération. Elle précise que l'Etat financera cet échange à hauteur de 10 milliards d'euros et offrira au "maximum" à ses créanciers privés 32,2% à 40,1% de la valeur faciale des obligations qui seront rachetées. Les prêteurs privés souhaitant participer à l'échange, conçu sur une base volontaire, recevront des obligations du FESF, le fonds européen de secours, a précisé l'Agence. L'opération porte sur 20 lignes d'obligations arrivant à échéance entre 2023 et 2042, pour un montant global de quelque 62,3 milliards d'euros et détenues par les créanciers privés du pays, a précisé l'Agence. En mars dernier, quelque 107 milliards de créances avait déjà été effacés. La transaction vise à permettre à l'Etat grec de réduire sa dette d'un montant pouvant aller jusqu'à 20 milliards d'euros, dans le but de la ramener à 124% du PIB en 2020, selon l'Eurobank. La réussite de l'opération conditionne le déblocage, attendu le 13 décembre, du versement par l'UE et le FMI de tranches de prêts au pays, gelés depuis juin et vitaux pour lui éviter la cessation de paiement. Angela Merkel, n'exclut plus un effacement de la dette La chancelière allemande Angela Merkel, n'a pas exclu, pour la première fois, un effacement de la dette de la Grèce dans quelques années, dans un entretien paru dans le journal dominical allemand Bild am Sonntag. "Si la Grèce arrive un jour à s'en sortir avec ses recettes sans contracter de nouvelles dettes, alors on doit regarder et évaluer la situation. Cela ne se passera pas avant 2014/15, si tout marche comme prévu", a dit la chancelière, questionnée si elle comptait se pencher sur un effacement de la dette d'Athènes après les législatives allemandes de 2013. "L'actuel programme d'aide à la Grèce court jusqu'à 2014. Et nous avons donné deux ans supplémentaires, jusqu'en 2016, à la Grèce pour qu'elle atteigne certains objectifs budgétaires", a-t-elle ajouté. C'est la première fois que la chancelière conservatrice évoque l'éventualité d'un effacement de la dette grecque, un sujet particulièrement délicat pour les contribuables et électeurs allemands, à moins d'un an des élections législatives dans le pays, prévues pour le 22 septembre 2013. Pour l'instant, la crise de l'euro a été relativement indolore pour l'Allemagne. Grâce à son image d'"ancre de stabilité" économique, elle bénéficie même de faibles taux d'intérêts. Reproches du SPD Le vent pourrait en revanche vite tourner pour Mme Merkel, actuellement personnalité politique la plus populaire du pays, si les Allemands étaient réellement touchés. Depuis plusieurs semaines, le principal parti d'opposition, les sociaux-démocrates (SPD), reprochait à Mme Merkel, de ne pas dire la vérité sur la Grèce. Le candidat à la chancellerie pour ce parti, Peer Steinbrück, avait ainsi accusé cette dernière de "faire la danse des sept voiles" sur la Grèce, dans un discours devant les députés allemands, le 21 novembre dernier. Selon un journal régional paru mardi dernier, Mme Merkel, avait affirmé en petit comité devant des députés de son camp que l'effacement de la dette de la Grèce ne serait "pas une solution". Et elle avait insisté sur le fait que si un effacement de dette était accordé à la Grèce alors d'autres pays pourraient aussi faire une requête en ce sens, selon ce journal. Vendredi, les députés allemands avaient donné sans surprise et à une large majorité leur feu vert aux mesures adoptées en début de semaine par la zone euro pour sauver Athènes de la faillite. Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, avait alors fermé la porte à un effacement de dette grecque. "Les spéculations actuelles sur un effacement de dette sont exactement le mauvais signal que nous ne devons pas envoyer, surtout si nous voulons continuer à soutenir la Grèce sur ce chemin difficile", avait-il dit, ajoutant: "ces fausses spéculations ne résolvent pas le problème". En début de semaine écoulée, les ministres des Finances des 17 s'étaient finalement entendus avec le Fonds monétaire international pour que la dette grecque soit ramenée à 124% du PIB d'ici 2020, contre un objectif initial de 120% défendu par le FMI, soit un allégement d'environ 40 milliards d'euros d'ici 2020. La zone euro s'était également engagée à ramener sous 110% du PIB d'ici 2022 la dette grecque (qui menace d'atteindre 190% en 2014), ce qui facilitera le retour de la Grèce sur les marchés.