Peut-on évaluer une économie à un instant "t" sans la placer dans la succession des contextes dans lesquels elle avait fonctionné ? La croissance est financée par la dépense publique. Il est tout à fait naturel que durant toute la phase de transition, c'est-à-dire celle de la mise à niveau de l'économie, les investissements, plus particulièrement d'équipements, doivent être le fait de l'Etat. Il faut quand même du temps pour que nos entreprises relevant tant du secteur public que privé puissent réellement devenir compétitives, acquérir les capacités de maîtrise des technologies qui connaissent des mutations "bouleversantes" et des capacités managériales devant les amener à leur pilotage dans un environnement concurrentiel. Quelles sont les entreprises qui peuvent réellement, pour le moment, affronter la concurrence internationale, alors que nombre d'entre elles ont besoin pour un moment encore d'évoluer dans un milieu protégé, c'est-à-dire que l'Etat les mette à l'abri de la concurrence étrangère. Il faudrait donc du temps pour entrer dans l'économie de marché concurrentielle, une économie qui serait en mesure de financer le développement en substitution à la dépense publique et à l'endettement étatique. Il ne faudrait pas, parce que tout simplement il est enregistré un excédent record de la balance des paiements, soutenir qu'en conséquence il devrait fatalement s'ensuivre une augmentation du taux de croissance qui renseigne sur la bonne santé de l'économie, alors même que nos opérateurs économiques et nos entreprises économiques ne cachent pas qu'ils ont besoin de temps. Le Président, également, avait lui-même averti que la paix est le préalable à tout. Alors, quand on en vient à évaluer l'état de notre économie, il faudrait le faire en considérant qu'elle a fonctionné dans un environnement qui ne se prête guère à des performances, à savoir toutes les implications de la tragédie nationale, soit l'impossibilité d'achever et de mener à bien la mise en œuvre des réformes, la situation de mise en quarantaine du pays par les transporteurs aériens, et donc fatalement par les investisseurs, l'inadéquation du système financier avec les exigences du fonctionnement de l'économie de marché. Une économie s'évalue donc par la prise en compte de l'environnement dans lequel elle a fonctionné, comme sa future évolution nécessite la prise en compte de la levée des obstacles dont il est question ci-dessus pour pouvoir faire de projections.