Après 18 mois d'incertitudes, les deux groupes énergétiques français Gaz de France (public) et Suez (privé) ont annoncé officiellement hier leur fusion. L'accord de fusion a, en effet, été approuvé dimanche par les conseils d'administration des deux groupes et doit encore être soumis à l'approbation des actionnaires, ont-ils précisé dans un communiqué commun. Les deux groupes prévoient "la mise en œuvre de leur fusion dans les meilleurs délais, au cours de l'année 2008". Le nouveau groupe, dans lequel l'Etat français détiendra plus de 35%, est baptisé GDF Suez. Il sera dirigé par l'actuel PDG de Suez, Gérard Mestrallet, et aura pour vice-président Jean-François Cirelli qui dirige GDF depuis 2004. L'accord entériné est différent de celui annoncé en février 2006 par le gouvernement du Premier ministre de l'époque, Dominique de Villepin, qui entendait protéger Suez d'un éventuel rachat par le groupe italien Enel. Le projet de fusion a entre-temps donné lieu à de multiples rebondissements, reflets d'importants enjeux politiques, sociaux et financiers. Initialement, le projet prévoyait qu'une action Suez s'échangerait contre une action GDF, en plus du versement d'un dividende exceptionnel d'un euro. Hier matin, dans le communiqué de presse commun, les deux groupes affichent une autre parité. Par ailleurs, la fusion GDF Suez se traduira aussi par l'introduction en Bourse du pôle Environnement de Suez. Jeudi dernier, à l'occasion de l'université d'été du Medef, le président de la République Nicolas Sarkozy avait en effet indiqué qu'il ne donnerait son feu vert au projet qu'en cas de cession par Suez de la totalité de son activité Environnement. Or selon des informations de presse parues en fin de semaine dernière, Gérard Mestrallet, le président de Suez, aurait obtenu de conserver ce pôle. Un compromis a finalement été trouvé, puisque les actionnaires de Suez se verront distribuer 65% du capital du pôle Environnement, lequel sera ensuite introduit en Bourse. GDF Suez et les principaux actionnaires de Suez, qui détiendront respectivement 35% et environ 12% des activités de ce pôle, se sont, par ailleurs, engagés à conserver leurs actions dans le cadre d'un pacte d'actionnaires. Les deux groupes ambitionnent des synergies confirmées de l'ordre de "1 milliard d'euros par an et en pleine année". "Fort d'une capitalisation boursière combinée d'environ 90 milliards d'euros et d'un chiffre d'affaires de 72 milliards d'euros, GDF Suez sera l'un des leaders mondiaux de l'énergie, en particulier dans le gaz et l'électricité", poursuivent les deux groupes. Cette fusion qui donne le jour au quatrième acteur mondial de l'énergie, ne semble pas satisfaire tout le monde. L'opposition de gauche et les syndicats ont redit ce week-end leur opposition à ce projet, qu'ils avaient vivement combattu l'an dernier. Le chef du Parti socialiste, François Hollande, a accusé M. Sarkozy d'avoir "abandonné son engagement" sur la participation de l'Etat au sein du nouveau groupe, et le Parti communiste a appelé à la mobilisation contre la fusion. Pour le syndicat Force ouvrière, le projet de fusion entre Gaz de France et Suez est un "mauvais coup" pour les salariées et les usagers, a dit Jean-Claude Mailly via un communiqué. L'opération de rapprochement est guidée non "par la logique industrielle et les droits des usagers" mais par "des critères financiers et de concurrence". De plus, "cette fusion va mettre face à face un groupe privé et une entreprise publique EDF", ajoute-t-il.