Fitch a été vendredi la deuxième agence, après Moody's, à priver la Grande-Bretagne de son sacro-saint "triple A", infligeant un nouveau revers pour le gouvernement du conservateur David Cameron qui maintient le cap coûte que coûte malgré un plan d'austérité drastique qui peine à porter ses fruits La note du pays a été abaissée d'un cran à "AA+", a indiqué dans un communiqué l'agence qui avait placé la Grande-Bretagne sous surveillance négative le 22 mars. Sa perspective d'évolution est "stable", ce qui veut dire que Fitch n'envisage pas de la modifier à nouveau à moyen terme. "La dégradation de la note souveraine du Royaume-Uni reflète en premier lieu des perspectives économiques et budgétaires plus faibles et par conséquent une révision en hausse des projections à moyen terme de déficit et de dette publics de Fitch", a indiqué l'agence. "Les projections plus élevées qu'anticipé auparavant de dette et de déficit reflètent en premier lieu la faible performance de l'économie britannique en terme de croissance au cours des dernières années, due en partie aux vents contraires provoqués par le désendettement des secteurs privé et public et la crise de la zone euro", a poursuivi Fitch. L'agence table désormais sur une dette publique atteignant un pic à 101% du PIB au cours de l'année budgétaire 2015-16 et ne voit pas le déficit public passer sous la barre des 6% avant la fin de la législature en 2015. Elle a par ailleurs révisé en baisse ses prévisions de croissance à 0,8% en 2013 et 1,8% en 2014 alors qu'elle prévoyait encore 1,5% et 2% en septembre. Selon Fitch, l'économie britannique, qui a connu deux récessions depuis le début de la crise financière en 2008 et est menacée actuellement par une troisième, ne retrouvera pas son niveau de 2007 avant 2014. Cette annonce est un nouveau revers pour le gouvernement du conservateur David Cameron, alors que l'agence Moody's avait déjà privé le pays de son triple A fin février. Standard & Poor's a en revanche confirmé le 5 avril le "AAA" de Londres. Malgré les appels de l'opposition travailliste, qui les accuse d'avoir tué la croissance, mais aussi de certains membres de la majorité et du Fonds monétaire international, M. Cameron et son ministre des Finances George Osborne maintiennent leur cap coûte que coûte. Ce dernier, artisan impopulaire de l'austérité gouvernementale, a dévoilé le 20 mars un nouveau budget de rigueur malgré des perspectives de croissance réduites de moitié pour cette année. Son plan peine pourtant à porter ses fruits et M. Osborne a été contraint ce jour-là d'annoncer une révision en hausse des objectifs de déficit et d'admettre que la dette n'amorcera son repli qu'à partir de 2017/2018, soit un an plus tard que prévu. Il avait déjà dû repousser cet objectif d'un an en décembre. Dans un communiqué répétant le discours habituel du Chancelier de l'Echiquier, son porte-parole a souligné vendredi soir que la décision de Fitch était un "douloureux rappel du fait que le Royaume-Uni ne peut pas refuser d'affronter ses problèmes ou de s'attaquer à l'héritage d'une dette bâtie durant une décennie", en particulier lors du sauvetage des banques en 2008 par le précédent gouvernement travailliste. "Bien que cela prenne du temps, nous réglons les problèmes économiques de ce pays", a-t-il encore assuré. Selon Howard Archer d'IHS Global Insight, si cette dégradation "devrait avoir un impact minimal sur les marchés", notamment en termes de coût de l'emprunt pour le pays, son impact politique est tout autre. "La décision de Fitch est un autre camouflet pour le gouvernement et particulièrement pour le Chancelier qui avait fait de la conservation du AAA un aspect clé de la priorité accordée à l'austérité dès que le gouvernement est arrivé au pouvoir en 2010", a jugé l'économiste.