Les prix du pétrole ont grimpé pour la deuxième séance d'affilée de plus de 2 dollars jeudi à New York, soutenus par le risque d'une nouvelle escalade des tensions au Moyen-Orient et d'une plus grande implication des Etats-Unis dans le dossier syrien. Le baril de light sweet crude (WTI) pour livraison en juin a bondi de 2,21 dollars à 93,64 dollars, sur le New York Mercantile Exchange (Nymex). A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord pour même échéance a fini à 103,41 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE), s'appréciant de 1,68 dollar par rapport à la clôture de la veille. Les cours de l'or noir avaient entamé la séance d'humeur indécise, cherchant un nouvel élan pour poursuivre leur très nette hausse de la veille, de 2,25 dollars, provoquée par une baisse inattendue des réserves hebdomadaires d'essence aux Etats-Unis. En dépit de l'annonce d'une croissance plus forte qu'attendu début 2013 au Royaume-Uni, une bonne nouvelle rare sur le continent européen, des chiffres record du chômage en zone euro, en Espagne et en France faisaient douter les courtiers sur les perspectives de reprise économique dans la région. Mais tout s'est accéléré dans l'après-midi, lorsque les Etats-Unis ont évoqué (pour la première fois) le probable recours à des armes chimiques par le régime syrien de Bachar al-Assad, a indiqué Andy Lipow, de Lipow Oil Associates. Un haut responsable américain, qui s'est exprimé sous couvert de l'anonymat, a par ailleurs estimé que, dans ces conditions, il était évident que toutes les options étaient sur la table en termes de réaction des Etats-Unis. Le président Barack Obama avait mis en garde à de nombreuses reprises le régime Assad contre le recours à ses stocks d'armes chimiques, affirmant notamment le 20 mars en Israël qu'il s'agirait d'une grave et tragique erreur, et qu'un tel développement changerait la règle du jeu. Il avait aussi parlé de lignes rouges à ne pas franchir pour Damas. Or, les courtiers s'inquiètent que cela entraîne des élus à plaider pour une plus grande implication des Etats-Unis au Moyen-Orient, ce qui se traduirait par une montée des tensions dans la région, a estimé M. Lipow. Cela présenterait un risque accru pour l'approvisionnement en brut en provenance du Moyen-Orient, qui reste un producteur essentiel à l'échelle mondiale, bien qu'il perde quelque peu de l'importance sur le marché américain, a-t-il poursuivi. Le marché était toujours porté d'autre part par les chiffres du Département américain de l'Energie (DoE) qui ont fait état d'une chute dix fois plus forte qu'attendu des réserves d'essence aux Etats-Unis la semaine dernière. Ces stocks sont très surveillés à l'approche de la saison estivale des grands déplacements en voiture. Les réserves américaines de brut ont quant à elles progressé légèrement moins que prévu par les analystes, un autre signal jugé encourageant. Du côté de la demande, après l'annonce rassurante jeudi d'une baisse plus forte qu'anticipé des nouvelles inscriptions au chômage aux Etats-Unis, les courtiers attendaient la sortie vendredi de la première estimation du PIB du pays pour le premier trimestre, considéré comme un baromètre après des chiffres très contrastés ces dernières semaines. En Asie, les cours du pétrole continuaient de monter, dans les échanges matinaux, après un fort rebond la veille à New York consécutif à la chute inattendue des stocks d'essence aux Etats-Unis et lié aux spéculations sur une action prochaine de la Banque centrale européenne (BCE). Le baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en juin gagnait 40 cents, à 91,83 dollars, tandis que le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juin également prenait 32 cents, à 102,05 dollars. Les prix de l'or noir profitaient par ailleurs de rumeurs prêtant à la BCE l'intention de procéder à des injections de liquidités sur le marché ou à une baisse de ses taux d'intérêt, actuellement fixés à un niveau historiquement faible de 0,75%. Paradoxalement, cet optimisme est nourri par l'annonce mercredi d'un repli du baromètre Ifo du moral des chefs d'entreprise allemands qui "accrédite l'idée chez les investisseurs que de nouvelles mesures de stimulation économique seront prises", souligne Desmond Chua, analyste chez CMC Markets à Singapour.