Les Philippins votaient, hier, dans un climat de violences pour des élections parlementaires et locales de mi-mandat qui font office de test pour le président Benigno Aquino et ses tentatives de réformes dans l'un des pays les plus pauvres et les plus corrompus d'Asie. Au moins sept personnes ont été tuées dans des violences en ce jour de vote tandis que le conseiller politique de Benigno Aquino, Manuel Mamba, a réchappé à l'attaque de son convoi dans la ville d'Alcal (nord). Manuel Mamba était dans la région pour soutenir un de ses frères candidat au poste de gouverneur sous l'étiquette libérale du président. Mamba a raconté à la radio DZMM avoir vu un adversaire de son frère brandir un fusil d'assaut AK-47 au passage du convoi, puis avoir entendu des tirs qui ont atteint un des véhicules. Par ailleurs sept personnes ont été tuées dans des affrontements entre clans rivaux dans le sud de l'archipel philippin troublé depuis des décennies par des mouvements séparatistes musulmans et une rébellion communiste. Aquino, fils du principal opposant au dictateur Ferdinand Marcos, abattu à son retour d'exil en 1983, avait été élu triomphalement en juin 2010, pour un mandat (unique selon la Constitution philippine) de six ans. Son programme de campagne était dominé par la lutte contre la corruption, cause centrale de la pauvreté de ce pays de quelque 100 millions d'habitants. Les sondages montrent qu'il reste, trois ans après son arrivée au pouvoir, l'un des présidents les plus populaires de l'histoire de l'archipel. Le président demande aux électeurs de placer leur confiance dans ceux qui l'aideront à poursuivre son programme de réformes, a déclaré la porte-parole de la présidence, Abigail Valte. Longtemps à la traîne des autres pays d'Asie, les Philippines enregistrent un des taux de croissance les plus élevés de la région (+6,6% en 2012) et bénéficient d'une confiance accrue des investisseurs étrangers. Deux des grandes agences de notation, Fitch et Standard and Poor's, ont élevé à la catégorie investissement la note de la dette souveraine du pays, pour la première fois de l'histoire du pays. Mais les Philippines peinent à sortir de la très grande pauvreté une grande partie de la population, et l'émergence d'une classe moyenne est bien plus lente que chez ses voisins. Malgré les efforts du gouvernement de Benigno Aquino pour une croissance la plus inclusive possible, peu de progrès ont été réalisés pour modifier une structure qui a engendré l'un des pires fossés entre les riches et les pauvres en Asie, estiment les économistes. Les élections de mi-mandat, avec 18 000 postes en jeu à travers l'archipel --conseillers municipaux, gouverneurs de province, députés et sénateurs-- sont considérées comme cruciales pour Aquino afin qu'il poursuive ses efforts. La présidence regardera notamment avec attention les résultats des deux chambres du Congrès. Une majorité au Sénat, dont il ne disposait pas pour ses trois premières années au pouvoir, lui permettrait de passer plus aisément ses lois. Benigno Aquino doit notamment obtenir l'aval des deux chambres pour un traité de paix négocié actuellement avec un mouvement rebelle islamiste dans le sud de l'archipel, où une guérilla a fait plus de 150 000 morts depuis 1978 et freiné la sécurité et la croissance du pays. Il souhaite aussi améliorer la collecte de l'impôt, un des points noirs de l'économie. Mais le jeu politique aux Philippines reste entaché par la violence, la corruption et l'achat de voix, héritage de décennies de dictature sous Ferdinand Marcos, renversé en 1986. Sa veuve, Imelda, 83 ans, est candidate dans le fief des Marcos, au nord de l'île principale, et son élection est quasi assurée.