Sommes-nous préparés pour suivre le cours effréné de la magnifique production éditoriale en la traduisant? La question a été posée à maintes reprises et par les officiels et par les professionnels, lors de colloque et autres rencontres y afférents. Quelques éléments de réponse ont été apportés mais sans réelle portée sur le terrain. Le dossier a été encore rouvert cette semaine lors des rendez-vous du café littéraire organisé quotidiennement dans le cadre du XIe Salon international du livre d'Alger. L'Italienne Jolanda Guardi, traductrice et enseignante universitaire de littérature arabe ainsi que Ahmed Mennour et Bachir Mefti dont les œuvres viennent d'être traduites en italien, ont été invités à débattre de cette épineuse question qui demeure problématique. Selon Jolanda Guardi, la traduction en Algérie demeure le fait de quelques individus, sans implication quelconque des structures de l'Etat. L'oratrice a reconnu que ces initiatives éparses sont “encourageantes, mais demeurent toutefois limitées”. L'oratrice fera par ailleurs un constat connu, celui de dire que “la traduction en tant que segment important du transfert des connaissances, d'une langue à une autre, d'une culture à une autre, d'une civilisation à une autre, son efficacité et son utilité ne peuvent apparaître que sur le long terme et ne peuvent que relever d'une stratégie clairement définie, avec des objectifs et des moyens précis ”. En Algérie, il est clair que la question de la traduction est encore à son stade embryonnaire. Qu'il s'agisse de la traduction d'œuvres littéraires, scientifiques ou autres, la traduction ne connaît aucune avancée notable, d'autant que l'intervention des pouvoirs publics en la matière est quasiment absente. Ce qui est évident, c'est que le processus de ce transfert de connaissance d'une langue à une autre nécessite non seulement un savoir rigoureux, mais aussi énormément d'argent. C'est justement le fait que la traduction coûte cher que l'Etat doit absolument en subventionner le processus. Nombreux ont été les intervenants à cette conférence à souligner que la nécessité de la présence des pouvoirs publics dans ce dossier “ est incontournable”. Comme pour l'édition, la traduction doit selon l'assistance et les professionnels bénéficier de l'aide de l'Etat. Les conférenciers rappelleront d'ailleurs que de nombreux titres d'auteurs algériens d'expression francophone ont été traduits en italien avec le concours du ministère français des Affaires étrangères. Le directeur du Centre culturel italien à Alger a fait savoir, qu'effectivement, il existe un soutien à la traduction des œuvres italiennes vers la langue arabe et que des projets dans ce sens sont en cours avec des éditeurs algériens. Certains ne sont pas sans savoir que la problématique est souvent liée en Algérie à des considérations idéologiques et politiques avant qu'elle ne soit due à des considérations littéraires. L'urgence, c'est sans doute et comme l'ont préconisé à maintes reprises les professionnels, de faire un inventaire des créations littéraires ou autres d'expression française pour les transmettre aux lecteurs arabes. Attendre que d'autres pays le fassent pour nous est-ce une solution ? Certainement pas, d'autant que la traduction est en soi un fait idéologique et politique, qui ne peut nécessairement obéir à notre vision générale des choses. La connaissance d'une langue ne signifie pas forcément la maîtrise de la traduction d'une œuvre. Afin de ne pas laisser envahir nos espaces culturels par la traduction d'œuvres ou d'ouvrages assurée par les pays voisins, et afin que l'Algérie ne soit pas soumise à l'importation systématique d'ouvrages à des prix excessifs, des ateliers , ou autres structures appropriées doivent en urgence voir le jour.