L'économie allemande va probablement renouer avec la croissance, après avoir stagné au premier trimestre 2013 en raison d'un hiver rigoureux, mais elle restera loin des niveaux qu'elle atteignait avant la crise de la zone euro, à cause de la faiblesse persistante des investissements et des exportations. Une nette amélioration du climat des affaires et du moral du consommateur laissent espérer une accélération prochaine de la croissance, qui a tout juste réussi à atteindre 0,1% au premier trimestre grâce à la reprise de la consommation des ménages. Le gouvernement de la chancelière conservatrice Angela Merkel, candidate à un troisième mandat lors des élections prévues en septembre, ne s'attend néanmoins qu'à une croissance modeste de 0,5% en 2013. "Personne ne prévoit une croissance solide cette année, en particulier après un premier trimestre aussi décevant", souligne Christoph Schmidt, président du Conseil des experts économiques, qui conseille le gouvernement. "La contribution du commerce extérieur sera faible et elle pourrait même peser sur la croissance, il ne reste que la demande intérieure", explique-t-il. "La consommation des ménages est relativement stable mais les investissements sont limités. La vraie question, c'est la date et l'ampleur de leur reprise." L'investissement des entreprises souffre du ralentissement des exportations: alors qu'elles ont longtemps été l'un des piliers sur lesquels s'appuyait la croissance allemande, elles ont baissé au premier trimestre, de 3,2% vers la zone euro et de 0,2% vers les pays extérieurs à l'Union européenne (UE). En raison notamment de la baisse du yen japonais. "Le yen s'est déprécié de 24% depuis septembre et le niveau de l'euro n'a pas changé sur la même période, ce qui donne un gros avantage (aux exportations japonaises), d'autant que le Japon et l'Allemagne dominent largement les mêmes secteurs", souligne Christian Schulz, économiste chez Berenberg Bank. Régulation excessive Sur le marché intérieur, des incertitudes pèsent également sur l'investissement, en particulier à cause de l'absence de stratégie claire du gouvernement dans le domaine de l'énergie après la décision de sortir du nucléaire, qui s'est traduite par une hausse des prix. Un panel d'entreprises américaines, interrogées par la branche allemande de la Chambre de commerce des Etats-Unis, a reconnu que cette hausse des prix les rendait timides en matière d'investissements, tout comme une régulation jugée excessive de certains secteurs. Berlin vient de consentir à libéraliser les transports par car, après avoir protégé pendant des décennies la mainmise du groupe public Deutsche Bahn sur le secteur. L'issue des élections de septembre est également un sujet de préoccupation pour les investisseurs. La réélection d'Angela Merkel est jugée probable, mais la faiblesse de ses partenaires actuels du Parti libéral démocrate (FDP) pourrait l'obliger à former une coalition avec les sociaux-démocrates (SPD), partisans de hausses d'impôts. Dans ce contexte, la consommation des ménages, unique facteur de croissance au premier trimestre, reste le principal espoir de reprise, d'autant que les principaux syndicats allemands sont parvenus à négocier des hausses de salaires de 3% en moyenne, bien supérieures à une inflation de 1,2%. "L'Allemagne doit prendre encore plus de mesures pour dynamiser son économie intérieure", résume Andreas Wörgötter de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). "Elle peut notamment accélérer la dérégulation du secteur des services." "Si elle le fait, l'économie intérieure sera aussi attirante à long terme pour les investissements que le secteur des exportations", ajoute-t-il. "La croissance sera alors stimulée, ce qui contribuera à rééquilibrer la zone euro." Ifo: le moral des entrepreneurs allemands repart à la hausse La confiance des entrepreneurs allemands a repris du poil de la bête en mai, après deux mois de recul consécutifs, selon les chiffres publiés par l'institut Ifo. L'indice Ifo a atteint 105,7 points en mai après 104,4 points en avril, contredisant les attentes de la majorité des analystes qui l'attendaient stable. "Les entreprises se montrent clairement plus satisfaites de l'état actuel des leurs affaires qu'au cours du mois dernier" tandis que leur jugement sur leurs perspectives, deuxième composante du baromètre, reste "inchangé et légèrement positif", note l'institut. L'Ifo en conclut que "l'économie allemande reste sur les rails dans un environnement difficile". Pour Christian Schulz, économiste de la Banque Berenberg, cette évolution montre que la crainte des derniers mois d'un retour de la crise en zone euro, en raison de la situation politique chaotique en Italie et du sauvetage de Chypre, "s'est dissipée". Il souligne toutefois que les entrepreneurs allemands se montrent prudents pour l'avenir. Publié plus tôt dans la matinée, le baromètre GfK du moral des consommateurs allemands a aussi affiché une hausse en mai à 6,2 points et est attendu une nouvelle fois en progression en juin 6,5 points.
Les exportations de machines-outils reculent en mars Les exportations de machines-outils allemandes ont reculé en mars de 10,4% sur un an à prix constants, alors que la demande est restée faible en Europe, en Chine et aux Etats-Unis, a annoncé la fédération allemande du secteur (VDMA). Sur la période de trois mois janvier-mars, qui permet de mieux dessiner une tendance, ces exportations se sont affichées en baisse de 7% par rapport à l'an passé. Le secteur allemand des machines-outils, fer de lance de la première économie européenne, s'est heurté à une baisse de la demande sur la plupart de ses principaux marchés, a expliqué la VDMA dans un communiqué. Les ventes au sein de l'Union européenne et en zone euro ont plié respectivement de 9,1% et de 9% sur les trois premiers mois de l'année. Les exportations vers la Chine ont reculé quant à elles de 3,6% sur un an, tandis que le marché aux Etats-Unis a cédé 4,3%. Les marchés indiens et brésiliens ont diminué respectivement de 28,1% et de 14,6%. A l'inverse, les exportations de machines-outils ont progressé de 1,8% vers la Russie, de 5,3% vers les pays du Sud-Est asiatique, de 8,9% vers la Turquie et de 9,2% vers l'Arabie saoudite. Elles ont également grimpé de 34,4% vers l'Afrique du Nord. Du côté des importations, les achats de machines-outils par l'Allemagne ont baissé en mars de 14,8% sur un an à prix constants, et de 11,6% sur l'ensemble du premier trimestre.