L'Opep a décidé, avant-hier, à l'unisson de reconduire son plafond de production de pétrole tout en affichant sa détermination à préserver les prix de l'or noir, sur fond de craintes renouvelées d'un affaiblissement de la demande pétrolière mondiale. Les ministres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) s'étaient rassemblés pour leur 163e réunion ordinaire à Vienne, siège du groupement, afin de revoir leur plafond collectif fixé à 30 millions de barils par jour (mbj) depuis fin 2011. Après quelques heures de discussions, ils ont décidé de reconduire ce niveau comme l'avaient laissé présager les déclarations préalables des différentes délégations. "Tout le monde s'est mis d'accord pour maintenir le niveau de production", a annoncé le ministre vénézuélien du Pétrole Rafael Ramirez à l'issue de la rencontre, ce qu'a confirmé peu après l'Organisation dans un communiqué. Néanmoins, le cartel, qui rassemble douze Etats pétroliers du Moyen-Orient, d'Afrique et d'Amérique latine, et pompe environ 35% du brut mondial, a déclaré rester sur le qui-vive, en référence à la crise prolongée en Europe et les craintes d'essoufflement de la croissance en Chine, 2e consommateur mondial de brut derrière les Etats-Unis. Prêts à réagir rapidement L'Opep a "décidé que ses membres prendraient si nécessaire des mesures pour assurer l'équilibre du marché et des prix raisonnables pour les producteurs et les consommateurs", selon le communiqué. "Et les pays membres ont réaffirmé qu'ils étaient prêts à réagir rapidement à des événements qui pourraient mettre en péril la stabilité du marché pétrolier", prévient-il. Après ce statu quo, les cours du brut sont restés orientés à la baisse, le baril de Brent pour livraison en juillet lâchant 87 cents à 101,32 dollars vers la mi-journée. L'Opep continue à tabler sur une croissance de la demande pétrolière au deuxième semestre (elle devrait atteindre 89,7 mbj sur l'ensemble de 2013, contre 88,9 mbj l'an dernier), même si cette prévision pourrait, selon son propre aveu, être contrariée. "Nous allons surveiller la demande pour cette année, parce que les Etats-Unis ont leurs problèmes budgétaires, la Chine est confrontée à son inflation, et bien sûr il y les problèmes en Europe", a résumé le secrétaire général du cartel, Abdallah El-Badri. "Nous devons défendre le prix du pétrole, et nous allons le défendre", a assuré pour sa part M. Ramirez, insistant sur la nécessité de maintenir le brut au-dessus de 100 dollars le baril, et de mieux respecter le plafond de production. La production réelle de l'Opep dépasse en effet de 700 000 barils par jour le plafond officiel, selon l'Agence internationale de l'énergie. Craintes pour la demande L'Arabie saoudite, considérée comme le chef de file du cartel, avait donné le ton dès le début de la semaine en dressant un diagnostic positif du marché pétrolier. L'Iran, qui avait réitéré ce mois-ci ses appels traditionnels à réduire le débit du cartel afin de soutenir les prix pétroliers, s'est finalement aligné sur les autres membres. Le prix du Brent à Londres, principale référence du secteur, était tombé début avril sous la barre symbolique des 100 dollars, en raison de stocks pétroliers américains surabondants et de craintes d'un ralentissement de la demande mondiale d'or noir, avant de remonter légèrement au-dessus de ce niveau. Mais ces craintes ont été ravivées cette semaine, après la révision à la baisse par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) de ses prévisions de croissance mondiale, en raison du marasme persistant en Europe. L'OCDE et le Fonds monétaire international (FMI) ont par ailleurs tous deux confirmé la perspective d'un ralentissement de l'économie chinoise. Les pays de l'Opep ont également débattu vendredi des critères de sélection du prochain secrétaire général, qui sera nommé en fin d'année. L'Iran, l'Arabie saoudite et l'Irak se disputent ce poste depuis l'an dernier, et l'organisation a échoué jusqu'ici à s'accorder sur un candidat. "Il y a eu des discussions détaillées concernant les candidats" et "il a été décidé de revoir les critères" de nomination, a expliqué le ministre du Pétrole iranien Rostam Ghassemi. La prochaine réunion ordinaire du cartel est programmée le 4 décembre à Vienne.
Impact du pétrole de schiste, sans le craindre L'Organisation des pays exportateurs de pétrole a indiqué étudier l'impact du pétrole de schiste sur le paysage énergétique mondial, tout en assurant que cette source d'énergie non conventionnelle ne menaçait en rien sa propre influence sur le marché. Les membres de l'Opep ont évoqué la question, a indiqué au cours d'une conférence de presse le secrétaire général de l'organisation, Abdallah El-Badri. Il s'est montré serein face aux répercussions potentielles de cette source d'énergie non-conventionnelle pour le cartel. “Je ne pense pas que ce soit une grande menace. C'est un nouvel ajout au bouquet énergétique et nous le saluons, a-t-il déclaré. Nous avons discuté du gaz et du pétrole de schiste. C'est une nouvelle source (de pétrole) et les ministres de l'Opep aimeraient connaître l'ampleur de cette ressource, sa durabilité, son coût, ses effets sur l'environnement”, a poursuivi M. El-Badri. “L'Organisation va examiner toutes ces questions en détail, mais comme pour toute autre nouvelle forme d'énergie”, a-t-il ajouté. La production de pétrole de schiste (shale oil) et de pétrole dit compact (tight oil), des formes non conventionnelles d'or noir dont l'extraction a été rendue possible par le recours à la fracturation hydraulique, est en plein décollage aux Etats-Unis. L'Agence internationale de l'énergie a récemment prédit que cela allait créer un choc sur l'offre pétrolière mondiale, dont les effets se ressentiraient dans tout le secteur.