Sujet toujours d'actualité, la conservation des réserves de change qui sont aujourd'hui de plus de 187 milliards de dollars sous forme de bons de Trésor américain, fait toujours l'objet d'appréciations contradictoires parmi les financiers et les économistes, notamment depuis le début de la crise mondiale. Chacun y va de son appréciation Pour les officiels algériens, maintenir les réserves de change algériens en bons de Trésor américain est une décision " prudente et juste ". On indique à ce sujet que même si les bons de Trésor américain ont été déclassés par les agences de notation, " cela a été sans conséquence, du moment qu'au niveau des marchés, la notation de ces bons reste tripe A ''AAA''. Paradoxalement " les bons européens gardent officiellement la note tripe A, mais sont classés sur le marché ". Ces placements sont effectués en dollars au près du Trésor américain et en livres sterling auprès du Trésor britannique et en yen japonais. " Les risques sont nuls parce que ce ne sont pas des risques de marchés et que la Banque d'Algérie pratique une gestion sécurisée de ces réserves. Ces placements assurent à l'Algérie des liquidités qu'elle peut investir ailleurs à tout moment ". En 2011, le ministre des Finances Karim Djoudi dans un communiqué a avancé des arguments officiels pour dissiper les craintes sur le fait que la crise pourrait entrainer des pertes financières pour l'Algérie. Le document précise que les placements de l'Algérie sont sécurisés sur trois plans : " leur capital est garanti, ils sont couverts contre les risques de change et ils sont liquides, c'est-à-dire que nous pouvons les retirer à tout moment". Ainsi, l'Algérie dispose de trois options pour investir ses réserves : " les marchés spéculatifs, les banques ou les valeurs d'Etat. Mais jusqu'à présent l'Etat rejette d'emblée ces deux premières options. Plus de 187 milliards de dollars de réserves de change à fructifier Certes l'Algérie a atteint, aujourd'hui, une réelle stabilité macro-économique, avec un taux d'inflation autour de 4 %, des fondamentaux qui reflètent sa bonne santé financière dont une dette extérieure remboursée par anticipation et des réserves de changes de plus de 187 milliards de dollars, sans compter le fonds de régulation des recettes estimé à plus de 50 milliards de dollars et les réserves non monétaires de la Banque Centrale. La gestion de ces réserves reste toutefois à optimiser pour une meilleure rentabilisation. Pour Mohand Amokrane Cherifi, expert international auprès des Nations unies : "leur conservation, pour une grande part sous forme de bons de Trésor américain, les dévalue, sachant la perte de valeur prévisible de ces bons du fait du fort endettement des Etats-Unis ; sans exclure le risque de défaut systématique ou de gel de ces avoirs dans des cas de situations exceptionnelles. Si l'on ajoute à cela la fragilité de la zone euro, une gestion avisée de ces fonds requiert une diversification des monnaies de réserves incluant le yuan chinois et des placements appropriés. Mais le meilleur placement demeure leur utilisation pour la diversification de l'économie nationale ". La banque de développement des BRICS : une aire monétaire indépendante Les pays BRICS (Brésil-Russie-Inde-Chine-Afrique du Sud) qui représentent les grandes économies émergentes, comptent 40 % de la population mondiale et, en 2015, ils devraient assurer 61 % de la croissance mondiale, et occuper 40 % du PIB mondial en 2025 selon le FMI, sont en phase de création d'une banque de développement dont la principale mission est de permettre une utilisation " plus productive " des ressources financières. D'après les études, les échanges entre ces cinq pays qui représentent aujourd'hui 20 % du PIB mondial et 15 % du commerce mondial, s'établissent à 350 milliards de dollars en 2012, avec une projection de 500 milliards de dollars en 2015. De l'avis des experts, c'est un volume commercial très insuffisant au regard des potentialités. Selon la première déclaration des BRICS l'établissement d'une banque de développement est motivé par le fait que les pays en développement font face aux défis du développement des infrastructures, à cause de l'insuffisance du financement à long terme et des investissements étrangers. La même déclaration souligne que la contribution initiale du capital à cette banque devrait être substantielle et suffisante pour rendre la banque efficace dans le financement des infrastructures. A travers sa plateforme d'échanges, le secteur privé des BRICS a affirmé pour sa part vouloir jouer un rôle clé dans la nouvelle donne en perspective, pour la promotion de l'investissement et le commerce. Les observateurs disent percevoir un remodelage du système financier et monétaire international suite à la création d'une banque de développement des BRICS dont l'impact apparait évident pour l'Afrique, aux yeux de ces mêmes observateurs. De la sécurité alimentaire à la santé en passant par l'éducation, pour le développement des compétences, la science et la technologie, notamment les inventions du futur, l'agriculture, les mines, l'économie verte, les infrastructures, etc. les BRICS reconnaissent unanimement que le champ de la coopération est très vaste pour faire bouger les lignes, en réponse aux attentes exprimées. Cette nouvelle entité financière, destinée à investir dans des projets d'infrastructure et de développement durable dans les pays membres et ailleurs, pourrait marquer un point d'inflexion dans l'objectif stratégique des BRICS de renforcer le poids économique croissant du Sud pour démocratiser les institutions de gouvernance mondiale et défier l'hégémonie du FMI et de la Banque mondiale. N'est-ce pas là, une opportunité pour le NEPAD de s'y intéresser pour l'intérêt du continent. L'Algérie pourrait emboiter le pas à l'Afrique du Sud En décembre 2010, les pays membres des BRIC ont décidé d'accepter l'Afrique du Sud en tant que 5éme membre. Et l'Afrique du Sud occupe actuellement environ 30 % du PIB de la région subsaharienne. Cette adhésion montre une tendance importante : cela prouve l'importance politique et économique de l'Afrique. " Cette fois, le groupe des BRICS a accepté l'Afrique du Sud, ce qui veut dire que le monde ne pourra plus oublier l'Afrique lors des événements qui changeront le monde dans les domaines politique, économique et social. Parce qu'un pays africain est devenu pays membre des BRICS ". L'Algérie qui entretient des relations d'excellence avec les cinq pays membre des BRICS, pourrait se joindre à cette voix organisée des pays en développement et d'adhérer au capital de la banque de développement. La participation financière de chaque pays au capital initial de la banque est fixée à première estimation par les experts à 50 milliards de dollars pour chaque pays membre. Une participation à la portée de l'Algérie qui pourrait ainsi se défaire des autres monnaies, notamment le dollar et l'euro. Cela permettrait sans nul doute au pays de mieux prendre acte des nouveaux rapports de force mondiaux et diversifiés ses horizons, sachant que la récente déclaration finale du Sommet de Durban a mis en exergue l'importance de la création d'une banque de développement par les pays du BRICS, censée agir en défenseur et garant des intérêts des pays en développement. L'adhésion de l'Algérie à la banque de développement des BRICS, serait perçue comme un poids-lourd en tant que moteur de renforcement des liens politiques et économiques tissés entre les BRICS et l'Afrique, notamment que les BRICS sont devenus les principaux partenaires de nombre de pays africains, au point de prendre le pas sur les Etats-Unis et d'autres puissances du Vieux continent. L'Algérie a les capacités humaines et matérielles de inscrire dans les perspectives des BRICS L'Algérie qui milite depuis les années 70 pour un nouvel ordre économique international, trouve devant elle l'occasion de reprendre ce slogan, pour déclencher la fin de l'actuel système de gestion monétaire. Une alternative au FMI et la Banque mondiale est absolument essentielles. C'est peut-être le début de la fin du système de Bretton Woods, et ce processus se doit être appuyé par les futurs BRICS, indique-t-on. C'est dire comme souligné par un analyste que " les plaques tectoniques de la géopolitique et de la géo-économie changent et ne sont plus atlantistes. C'est la naissance, de la réapparition du Sud qui a commencé à s'organiser ". L'Algérie a tout à gagner en devant le 6éme membre des BRICS. Car comme le prévoit nombre d'experts algériens, le pire est à venir avec la libéralisation des importations aussi bien avec l'Union européenne ou, plus largement, qu'avec l'OMC, avec lesquels se poursuivent les négociations autour du démantèlement des barrières tarifaires, qui entraînera inévitablement, si non une mise à niveau, " la marginalisation de la production nationale ". Pour l'ensemble de ces raisons, l'Algérie doit trouver d'autres alternatives à l'utilisation de ses réserves de change, la meilleure sécurité c'est de prendre des participations au capital de la banque de développement des BRICS et de fait participer à ce nouveau " Patriotisme auquel on assiste dans les pays émergents, construit sur des Nations soudées par des valeurs communes e ". Une chose est sûre, l'Algérie a les capacités humaines et matérielles pour s'inscrire dans cette perspective des BRICS.