Le sommet du BRICS qui se tient, fin mars, à Durban, en Afrique du Sud, est une étape importante dans les tentatives, difficiles et entravées, de refonder l'ordre économique global. L'action coordonnée du Brésil, de la Russie, de l'Inde, de la Chine et de l'Afrique du Sud au niveau international est appelée à connaître un saut qualitatif avec la création de la banque de développement du Sud. Cette banque est attendue depuis des années. Par les membres du club des émergents, bien sûr. Mais aussi par de nombreux pays en voie de développement qui voient - ou espèrent voir - dans la nouvelle banque une sortie au tête-à-tête avec des institutions multilatérales ou régionales rigides, véritables gendarmes de la doxa libérale. Dans une phase initiale, la banque sera dotée d'un capital de cinquante milliards de dollars apporté à parts égales par les cinq pays fondateurs. C'est loin d'être à la hauteur des ambitions du BRICS de faire de cette banque un outil décisif au service de la lutte contre la pauvreté et pour le développement. Les membres du groupe de travail chargé de finaliser le projet évoquent déjà l'appel à des contributeurs disposant de capacités financières excédentaires ou en quête de placement. Il semblerait, sous réserve de confirmation, que l'Algérie, comme le Venezuela, l'Indonésie, le Mexique ou la Malaisie, est dans une short-list de pays susceptibles d'être invités à rejoindre le conseil d'administration de la nouvelle institution. Si cela est avéré, ce serait une opportunité. L'Algérie dont les réserves de change ressemblent, au mieux, à une sorte de fonds de garantie pour périodes difficiles pourrait y placer une - petite - partie de son encaisse dormante. D'autant qu'il s'agit d'une structure appelée à jouer un rôle majeur à la fois dans le financement de projets de développement et dans la réorganisation, au bénéfice des moins favorisés, de l'économie internationale. Un tel placement ne serait en rien spéculatif. Il aurait une dimension politique beaucoup moins incertaine que les aventures dans la création de fonds souverains ou de banques régionales redondantes. Outre la diversification des placements de ces réserves en sommeil, la participation à la banque du Sud permettrait d'associer le pays à une dynamique globale d'investissements de croissance dont l'efficacité est démontrée par les économies motrices du BRICS. Il s'agit bien entendu à ce stade d'une déclaration d'intention ou d'une option à moyen terme. Le BRICS n'a en effet pas encore fait appel à d'autres actionnaires pour renforcer une banque dont le lancement n'est pas encore officiellement annoncé. Il est certain qu'avec cet organisme le BRICS se donne le moyen de transformer une coopération politique et une coordination internationale en action concrète au service d'un développement économique en direction des laissés-pour-compte des bailleurs de fonds traditionnels. Le BRICS a clairement fait connaître ses secteurs d'intervention (infrastructures, routes, ponts, centrales électriques, réseaux d'assainissement, écoles, hôpitaux). L'Afrique devrait être le continent privilégié en termes d'allocation de ressources. On est dans un début de rupture avec la logique de profit défendue avec le « succès » que l'on connaît par les théoriciens occidentaux La monnaie chinoise, en devise de référence de la nouvelle banque, constituerait ainsi la première étape d'une diversification des monnaies de facturation des échanges internationaux. Outre celui du dollar, le monopole du FMI et la Banque mondiale est menacé. On comprend peut-être un peu mieux ainsi l'agitation frénétique de Mme Lagarde et ses déclarations d'amour à nos réserves de change