Un scandale a éclaté après le discours du parti d'extrême-droite Mouvement pour une meilleure Hongrie. Le week-end dernier, dans un camp de jeunesse hongrois en Roumanie, le leader du parti Gabor Vona a appelé à se battre pour la création dans le pays voisin d'une autonomie hongroise sous le protectorat de Budapest. Il a également déclaré que la Hongrie devrait se fixer pour priorité la "préservation de la race hongroise" plutôt que les "bonnes relations avec la Roumanie", a écrit, hier, le quotidien Kommersant. Les débats sur la minorité hongroise en Roumanie portent, en règle générale, sur deux domaines. Premièrement, la Transylvanie, région du nord-ouest de la Roumanie frontalière avec la Hongrie, où vit la minorité hongroise. Deuxièmement, le Pays sicule qui revendique son indépendance, dont le territoire coïncide en grande partie avec la région autonome hongroise de Roumanie qui a existé entre 1952 et 1968. "La nostalgie historique de la Transylvanie est un thème sensible pour la conscience hongroise depuis la fin de la Première Guerre mondiale, lorsque le territoire du pays avait été divisé par trois et que beaucoup de Hongrois ethniques étaient devenus citoyens d'Etats voisins. La droite, dont le premier ministre actuel Viktor Orban, joue souvent la carte nationaliste pour éluder la discussion sur les problèmes du quotidien, explique Alexandre Stykaline de l'Institut d'études slaves à l'Académie des sciences de Russie. Aujourd'hui, les Hongrois en Roumanie, soit 7-8% de la population, ont la possibilité de participer à l'administration politique du pays, d'occuper des postes de ministre; il existe des universités, des théâtres, des cinémas et des médias en hongrois. Et l'octroi d'une autonomie au Pays sicule économiquement en retard ne règlerait pas le problème, car la majorité des Hongrois de Roumanie vivent en dehors de cette région". La Roumanie a violemment réagi aux propos du politicien hongrois. La diplomatie roumaine a qualifié son discours d'une attaque contre "la légitimité et la souveraineté" du pays et a exigé que Budapest émette un démenti. De son côté, le président Traian Basescu a promis de "remettre au pas" les politiciens hongrois lui-même. "Ces déclarations dépassent les bornes… Je dis, ça suffit! La Roumanie prendra les choses en main pour remettre Budapest à sa place", a-t-il déclaré en qualifiant la Hongrie de "foyer d'instabilité dans la région". "Je garantis que j'empêcherai la réapparition d'une province ethnique autonome en Roumanie", a promis le président. Basescu a décidé de ne pas s'arrêter là et a demandé le soutien des Roumains vivant à l'étranger. "Un recensement sera organisé prochainement dans les Etats frontaliers avec la Roumanie, a-t-il rappelé. Dites, mes frères, que vous êtes des Roumains! Pas des Moldaves ou des Valaques serbes, peu importe comment vous vous identifiez depuis l'époque des régimes communistes." Selon les experts, l'échange de piques entre Budapest et Bucarest ne s'arrêtera pas là, ce qui pourrait propulser le conflit bilatéral qui se consume depuis des années au niveau européen, nécessitant l'intervention de Bruxelles. "L'UE fait tout son possible pour éviter l'aggravation du différend roumano-hongrois, explique Alexandre Stykaline. Mais la Roumanie craint l'effet centrifuge, et au lieu d'un compromis, le président Basescu a opté pour une rhétorique susceptible d'engendrer de nouvelles complications."