Turquie La banque centrale augmente ses taux pour sauver la livre La banque centrale turque a décidé avant-hier soir de procéder à la hausse significative de ses taux d'intérêt attendue par les marchés pour endiguer la chute continue de la livre, contre l'avis du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan hostile à cette mesure. Lors d'une réunion d'urgence de son comité de politique monétaire, l'institution financière a procédé à un changement complet de stratégie et annoncé une augmentation de son taux au jour le jour, qui passe de 7,75 à 12%, et de son taux hebdomadaire repo, poussé de 4,4 à 10%. Dans un communiqué, la banque a justifié sa décision par la nécessité de "contenir l'impact négatif" des "récents développements intérieurs et extérieurs" sur "l'inflation et la stabilité macroéconomique" du pays. Ces mesures de "resserrement monétaire seront maintenues jusqu'à une amélioration significative des prévisions d'inflation", a-t-elle ajouté. L'annonce de la banque centrale a été immédiatement saluée par les marchés, où la livre turque (LT) s'échangeait à 2,1855 LT pour un dollar et à 2,9855 LT pour un euro, en très forte progression par rapport aux planchers historiques de 2,39 LT pour un dollar et 3,27 LT pour un euro atteints lundi à la mi-journée. Cette décision, réclamée depuis des semaines par les marchés, vient défier la position du gouvernement turc, qui a répété son hostilité à tout recours à l'arme des taux par crainte d'affecter la croissance et de creuser les déficits publics déjà très élevés du pays (+ de 7%). Depuis la mi-2013, la livre a perdu plus de 30%. Depuis des semaines, tous les ministres ont multiplié les mises en garde contre toute hausse des taux, évoquant une crise "passagère". "L'économie turque est robuste et continue de se développer de façon durable", avait lui-même assuré avant-hier M. Erdogan devant les députés de son parti. Nouveau signe de l'urgence de la situation, M. Basci a annoncé mardi une révision à la hausse de sa prévision d'inflation pour l'année 2014, de 5,3% à 6,6%, se rapprochant ainsi des estimations de la plupart des analystes. Si le gouvernement turc persiste pour l'instant à maintenir à 4% sa prévision de croissance pour 2014, la plupart des analystes l'ont déjà revue à la baisse et anticipent un ralentissement de l'activité. Les plus pessimistes agitent même le spectre de la grave crise financière de 2000-2001, qui avait nécessité une intervention urgente du Fonds monétaire international (FMI).