Le niveau de l'inflation en zone euro est certes faible mais ne constitue pour le moment pas une source d'inquiétude pour la Banque centrale européenne (BCE) qui ne voit pas de risque de déflation, a déclaré son président Mario Draghi avant-hier soir. "Sans aucun doute, le taux actuel de l'inflation, de 0,8% en janvier, ne peut clairement pas être considéré comme proche de 2%", l'objectif poursuivi par la BCE, a dit M. Draghi. Mais "est-ce une raison d'inquiétude?", s'est-il interrogé avant d'expliquer que non, lors d'un dîner dans le cadre d'une conférence organisée à Francfort par la Banque centrale allemande, la Bundesbank, sur le rôle des banques centrales. "Avec un taux moyen d'inflation de 0,8% en janvier nous ne sommes clairement pas en déflation, définie comme une chute auto-alimentée des prix basée sur une large gamme de produits et de pays. En outre, les projections d'inflation pour la zone euro à moyen terme continuent d'être fermement ancrées, et conformes à notre objectif de maintenir l'inflation sous, mais proche de, 2%", a détaillé M. Draghi. Soulignant que l'évolution récente de la hausse des prix était liée aux prix de l'énergie et en partie aux efforts de rééquilibrage entrepris par plusieurs pays de la région pour améliorer leur compétitivité, il a aussi estimé que la demande faible persistante jouait un rôle. Toutefois, "à ce jour, nous n'avons pas de preuve de consommateurs reportant leurs décisions d'achat, comme cela peut être observé dans un environnement déflationniste". Dans ce contexte, "nous allons rester en état d'alerte concernant l'émergence de nouveaux risques sur la stabilité des prix et sommes prêts à agir", a conclu M. Draghi, à une semaine de la prochaine réunion de politique monétaire de l'institution monétaire de Francfort et alors que les analystes spéculent sur d'éventuelles nouvelles mesures qu'elle pourrait prendre face à ce ralentissement de l'inflation qui pourrait venir menacer la croissance fragile de la zone euro. Par ailleurs, M. Draghi a plaidé en faveur du programme de rachat de dette d'Etat adopté par la BCE en septembre 2012, dit programme OMT, sur la légalité duquel la Cour constitutionnelle allemande a récemment émis des doutes tout en décidant de réclamer l'avis de la Cour de justice européenne avant de rendre son jugement. Pour le banquier central, l'OMT "a servi, comme toutes nos mesures de politique monétaire, à assurer le respect de notre mandat de stabilité des prix comme défini par les Traités". Ce programme "se fonde sur une doctrine de politique monétaire qui a pris de l'importance notamment parce qu'elle a été suivie avec succès par la Bundesbank pendant plusieurs décennies", selon lui. "A savoir que la banque centrale devrait être dotée d'un mandat de stabilité des prix clair et, dans le cadre de ce mandat, devrait être autorisée (en fait obligée) à utiliser ses outils en pleine indépendance pour délivrer cette stabilité des prix". Cette doctrine permet à la BCE "d'adapter avec souplesse ses mesures aux défis de politique monétaire spécifiques qui peuvent surgir" dans une union monétaire qui compte 18 pays au profil très variés, a fait valoir M. Draghi, jugeant que "cette approche a été une nouvelle fois validée par le grand progrès fait vers la restauration de l'unité la zone euro depuis l'annonce de l'OMT".