La Banque centrale européenne (BCE) a répété avant-hier qu'elle était prête à faire face au risque de déflation en zone euro, même si elle ne le voit pas augmenter. Son patron Mario Draghi a affirmé être "prêt à prendre des mesures supplémentaires" si l'inflation ne retrouvait pas des niveaux plus élevés, dans un discours devant les étudiants de Sciences Po à Paris. "Si des risques autour du scénario (d'accélération progressive de l'inflation) apparaissent, nous sommes prêts à prendre des mesures supplémentaires pour nous assurer que notre mission est remplie", à savoir garantir la stabilité des prix, a-t-il dit. "En d'autres termes, nous ferons ce qui est nécessaire pour maintenir la stabilité des prix", a-t-il ajouté. Mais alors que l'inflation en zone euro a atteint 0,7% en février, soit loin de l'objectif de la BCE de la maintenir proche de 2%, M. Draghi a persisté à juger que "le risque de déflation est limité". "Avons-nous la preuve que les gens reportent leurs achats (dans l'espoir de payer moins cher plus tard), ce qui serait la définition de la déflation' Nous ne voyons aucune preuve de cela", a-t-il dit, reprenant un argumentaire déjà employé face aux menaces brandies par certains observateurs que ce scénario, synonyme de décélération de l'économie, se produise. Le patron de la banque centrale allemande, et à ce titre membre du conseil des gouverneurs de la BCE, a également jugé avant-hier "le risque (de déflation) très limité". "De mon point de vue, le cours actuel des choses ne nécessite pas de changement de la politique monétaire" menée, a déclaré Jens Weidmann lors d'une rencontre avec la presse étrangère à Berlin, plaidant "pour davantage de sérénité dans la discussion sur la politique monétaire", à un peu plus d'une semaine de la réunion mensuelle sur les taux de la BCE. Son principal taux d'intérêt directeur, baromètre du crédit en zone euro, est déjà à son niveau le plus faible jamais connu, avec 0,25%, tandis que la BCE alimente les banques en liquidités illimitées et très bon marché dans l'espoir qu'elles prêtent davantage aux entreprises et ménages et ainsi soutenir la croissance. Et si la situation se dégradait davantage au niveau de l'inflation, différentes options sont à l'étude, a rappelé de son côté le chef de la Banque centrale slovaque, Josef Makuch. "Plusieurs responsables (de la BCE) sont prêts à adopter des mesures non standards pour éviter de glisser dans un environnement déflationniste", a-t-il déclaré à la presse à Bratislava. "La BCE a beaucoup de mesures à portée de main, y compris mettre plus d'argent en circulation. Leur utilisation dépend de la situation. Si les circonstances exigent davantage de liquidités, alors je n'ai aucune raison de ne pas soutenir" cette solution, a encore déclaré M. Makuch. Parmi les mesures à l'étude figure la possibilité d'un taux de dépôt négatif pour encourager les banques à prêter aux entreprises et aux ménages. Ce taux auquel les banques déposent leurs surplus de liquidités auprès de la BCE pour 24 heures est de 0% actuellement. Mario Draghi a aussi déclaré à plusieurs reprises que la BCE continuait de réfléchir à la possibilité d'un nouveau prêt à long terme aux banques, à revitaliser le marché des ABS, crédits adossés à des actifs, ou encore à des rachats directs d'actifs, pour relancer le crédit. Quant à l'euro, dont le niveau élevé face au dollar fait craindre qu'il pèse à la fois sur les exportations et sur le niveau de l'inflation avec des prix des produits importés en recul, le banquier central a répété qu'il ne s'agissait "pas d'un objectif de notre politique mais il est très important pour la stabilité des prix et pour la croissance". "Nous regardons attentivement le taux de change. Ces préoccupations sont présentes dans les discussions du conseil des gouverneurs", a-t-il indiqué tout en jugeant que cette appréciation de la monnaie unique européenne était le pendant "d'un retour de la confiance en la zone euro".