Le déficit commercial du Japon a quadruplé en mars sur un an au-delà des 10 milliards d'euros, à cause d'un bond des importations provoqué par la dépréciation du yen et un surcroît de demande avant une hausse de taxe. En mars, ce déficit a atteint 1446 milliards de yens (10,25 milliards d'euros), a annoncé le ministère des Finances. Les importations se sont envolées de 18,1% en valeur, en partie du fait de l'affaiblissement du yen qui a perdu 8,7% de sa valeur face au dollar depuis mars 2013, a précisé le gouvernement. En avril 2013, la banque centrale du Japon a considérablement assoupli sa politique monétaire sous la pression du Premier ministre de droite Shinzo Abe, ce qui a entrainé une dépréciation régulière de la monnaie japonaise lors des mois suivants. En conséquence, les denrées achetées à l'étranger par les firmes nippones ont coûté davantage de yens. Ce facteur lié aux devises n'est toutefois pas le seul en cause. En mars, le volume des importations a grimpé en effet de 11,6%. L'archipel s'est notamment fait livrer près de 15% de pétrole en plus, alors qu'il s'agit de son poste de dépenses le plus important. Les achats depuis l'étranger de gaz naturel liquéfié ont aussi augmenté, cette énergie étant davantage utilisée depuis l'arrêt de la cinquantaine de réacteurs nucléaires du pays après l'accident du Fukushima. Cette suspension de l'emploi du nucléaire dans l'archipel a rendu la balance commerciale japonaise structurellement déficitaire, alors qu'elle profitait jadis d'amples excédents tirés par ses puissants secteurs industriels exportateurs (électronique, automobile, etc.). Au-delà des sources d'énergie, les Japonais ont aussi importé davantage d'ordinateurs, de semi-conducteurs et de voitures, ainsi que d'autres pièces détachées ou produits de consommation courante. Les consommateurs nippons ont en effet acheté davantage en mars en prévision de la hausse d'une taxe sur la consommation (équivalente à la TVA française) au 1er avril. Les négociants ont dû élever leurs commandes à l'étranger pour répondre à ce surcroit de demande. Les exportations n'ont progressé dans le même temps que de 1,8% en valeur. Elles se sont même effritées de 2,5% en volume sur fond de croissance hésitante en Asie, bien que la dépréciation du yen ait permis d'en élever quelque peu la valeur en monnaie japonaise. Du fait de la forte consommation dans l'archipel, les industriels ont parfois dû donner la priorité à la demande intérieure, quitte à réduire leurs offres de produits pour l'export. Parmi les biens livrés à l'étranger, les ventes de voitures "made in Japan" se sont néanmoins bien tenues, tout comme celles des machines destinées au secteur textile. "La baisse du volume exporté montre que les avantages du yen faible sont limités en terme de compétitivité", a estimé Marcel Thieliant, de Capital Economics. D'après des études, les industriels japonais ont en effet eu tendance à maintenir leurs prix à l'étranger ces derniers mois, malgré la baisse du yen. Ils tirent dès lors des marges plus importantes de ces ventes, mais ces produits ne gagnent pas d'avantage tarifaire face à ceux des entreprises étrangères. "A l'avenir, les consommateurs devraient réduire leurs dépenses maintenant que la taxe a augmenté, ce qui limitera la demande en produits importés", a souligné M. Thieliant. "Au final, le déficit commercial devrait se réduire au deuxième trimestre, ce qui apportera un soutien indirect bienvenu à une croissance qui va souffrir directement de la contraction de la demande intérieure", a-t-il ajouté. La plupart des économistes ont prévu une accélération de la croissance au premier trimestre pour la troisième puissance économique mondiale, dont le produit intérieur brut pourrait en revanche diminuer au deuxième trimestre. Dans ses dernières prévisions publiées début avril, le FMI a estimé que la croissance du Japon serait limitée à 1,4% en 2014 et 1,0% en 2015.