La Banque centrale européenne (BCE) a décidé d'espacer ses réunions de politique monétaire, qui se tiendront à partir de janvier 2015 toutes les six semaines et non plus tous les mois comme actuellement, a annoncé le président de l'institution monétaire Mario Draghi. "La BCE ne peut pas et ne devrait pas agir tous les mois", a affirmé M. Draghi, estimant que des échéances mensuelles étaient "tout simplement trop rapprochées dans la situation actuelle", lors de sa conférence de presse mensuelle de politique monétaire. "La situation actuelle est bien plus complexe qu'elle ne l'était il y a quelques années et entraîne des attentes des marchés, des pays et de l'opinion publique que nous fassions face à cette plus grande complexité" et donc une demande d'intervention, a poursuivi le président de l'institution de Francfort. Depuis sa création, le conseil des gouverneurs de la BCE, composé des six membres du directoire et des 18 gouverneurs des banques centrales nationales de la zone euro, se réunissait chaque premier jeudi du mois pour réévaluer l'orientation de sa politique monétaire et le niveau de ses taux d'intérêt. Jugeant que cette fréquence rapprochée provoque "un certain comportement des marchés, pouvant n'avoir rien ou peu à voir avec les fondamentaux" économiques, Mario Draghi a expliqué vouloir éviter "des attentes s'auto-alimentant, ayant des conséquences sur les marchés". Le nouveau calendrier des réunions sera fixé le 16 juillet par le conseil des gouverneurs et publié dans la foulée sur le site internet de la BCE, a-t-elle précisé dans un communiqué. Les réunions ne portant pas sur la politique monétaire continueront en revanche d'avoir lieu au moins une fois par mois. Par ailleurs, des comptes rendus de chaque réunion seront publiés à compter de janvier 2015, comme le font déjà ses homologue américaine, la Fed, et britannique, la BoE, a ajouté M. Draghi, une possibilité évoquée par la BCE depuis plusieurs mois mais difficile selon lui à mettre en œuvre avec des réunions tous les mois. Interrogé sur une volonté de coordonner les réunions de la BCE avec celles de la Fed, qui se réunit également toutes els six semaines, Mario Draghi a affirmé "ne pas prévoir de synchroniser les réunions avec qui que ce soit d'autre". Après avoir baissé lors de sa réunion de juin son principal taux directeur à 0,15% et annoncé toute une palette de mesures destinées à nourrir la reprise économique de la zone euro et à faire décoller l'inflation, la BCE a jeudi maintenu ses taux à leur niveau actuel, déjà historiquement bas.
Le principal taux directeur inchangé La Banque centrale européenne (BCE) a sans surprise laissé inchangé son principal taux directeur à 0,15%, son niveau le plus bas historique auquel il avait été porté le mois dernier pour tenter de faire décoller croissance et inflation. Personne n'avait osé prédire un nouvel assouplissement monétaire après la décision de juin de baisser de dix points de base ce taux auquel les banques se refinancent aux guichets de la BCE, qui avait été accompagnée d'un paquet de mesures exceptionnelles destinées à encourager les banques à prêter davantage aux entreprises et ménages. Parmi ces annonces, l'institution monétaire de Francfort a porté en territoire négatif son taux de dépôt, celui auquel les banques stockent des liquidités auprès d'elle pour 24 heures, à -0,10%, une première pour une grande banque centrale. Elle a aussi prolongé l'octroi illimité et bon marché de liquidités à court terme jusqu'à mi-2016 et annoncé de nouveaux prêts à long terme (TLTRO), d'un montant de 400 milliards d'euros, programme qui ne démarrera qu'en septembre. Par ailleurs, elle a annoncé continuer à travailler activement à la préparation d'un programme de rachat d'actifs adossés à des prêts (ou ABS).
Des éclaircissements attendus Il sera aussi sans doute amené à apporter des éclaircissements sur les nouvelles mesures déployées, estime Marco Valli, chef économiste pour la zone euro chez UniCredit, qui juge en particulier que la physionomie des futurs TLTRO "reste incomplète". Ces prêts seront soumis à condition mais "tout ce que nous savons pour le moment sur cette conditionnalité c'est que 'les fonds doivent soutenir l'économie réelle'" et que la BCE se montrera "'déterminée à ce que cet argent ne soit pas dépensé (à l'achat) de dette publique ou dans des secteurs qui connaissent ou sortent d'une bulle'", ajoute l'économiste citant le patron de la BCE, Mario Draghi. Pour Sylvain Broyer, adjoint au chef économiste de Natixis, l'institution monétaire "aura peut-être la volonté (...) de repréciser la nature et l'utilité des décisions qui ont été prises. Il y a beaucoup de pédagogie à faire", sur les prêts aux banques (TLTRO) ou les taux négatifs. Depuis ce train de mesures, dont l'efficacité a aussi été mise en doute par certains, les nouvelles économiques en provenance de la zone euro ne se sont guère améliorées. La croissance du secteur manufacturier a ralenti en juin, pour le deuxième mois consécutif, selon l'indice PMI publié par le cabinet privé Markit, tandis que l'inflation affiche 0,5% en juin, comme en mai, soit loin de l'objectif de la BCE de maintenir la hausse des prix proche de 2%. Un niveau qui "maintient la pression sur la BCE pour qu'elle envisage des mesures de politique monétaire non conventionnelles" à l'avenir, estime Martin Van Vliet, de la banque ING. "Même s'il est improbable qu'elle agisse à nouveau cette semaine, nous pensons qu'elle finira par mettre en place un programme d'assouplissement quantitatif (rachat massif d'actifs, ndlr) à grande échelle pour s'attaquer au risque de déflation", juge de son côté Jennifer McKeown, de Capital Economics. Un tel programme n'est "pas requis pour le moment", a cependant une nouvelle fois signifié Benoit Coeuré, membre du directoire de la BCE. "Nous ne voyons pas de déflation dans la zone euro", a-t-il déclaré, répétant la rhétorique employée ces derniers mois par la BCE. "Nous avons la conviction que les mesures que nous avons décidées sont appropriées pour faire face aux perspectives actuelles de faible inflation", a-t-il ajouté.