Faiblesses et rebond du marché de l'emploi aux Etats-Unis, soutien de la demande en Europe: Janet Yellen, la présidente de la Réserve fédérale (Fed) et Mario Draghi de la Banque centrale européenne (BCE) devaient illustrer vendredi à Jackson Hole les différents enjeux des politiques monétaires des deux côtés de l'Atlantique. Lors d'un discours au symposium monétaire organisé chaque année par la Fed dans la station des Rocheuses, la présidente de la banque centrale américaine Janet Yellen a estimé que le marché de l'emploi aux Etats-Unis n'était pas "encore totalement remis". Mais elle a averti que si les progrès s'accéléraient, une hausse des taux d'intérêt plus rapide interviendrait. Mettant en avant les nombreux emplois à temps partiel et les chômeurs découragés ne cherchant plus de travail, Mme Yellen a redit que les progrès en matière de taux de chômage "surestimaient" l'état véritable du marché du travail. Le taux de chômage se situe actuellement à 6,2% aux Etats-Unis contre 7,3% il y a un an. Mais la patronne de la Fed n'a pas exclu que l'inflation se réveille plus vite (1,6%, selon l'indice PICE actuellement), affirmant que les salaires pouvaient "augmenter beaucoup plus rapidement", ce qui exigerait alors une remontée des taux plus tôt qu'envisagé. Jusqu'ici, les économistes s'attendent à une première hausse des taux au milieu de 2015. Mme Yellen s'est gardée de donner un calendrier mais, de l'avis de nombreux analystes, a affiché un point de vue "plus équilibré", prenant acte du débat actuel au sein du Comité monétaire de la Fed (FOMC) et des "différentes interprétations" existantes. Un membre du FOMC a été dissident lors de la dernière réunion du Comité fin juillet et, comme l'ont rapporté mercredi les minutes de la réunion, plusieurs voix se sont élevées pour noter que le marché du travail a notablement progressé et qu'une hausse des taux plus rapide est à envisager. Les taux au jour le jour sont maintenus au niveau de zéro depuis fin 2008.
Moins "colombe" "Mme Yellen reconnaît qu'on s'approche des objectifs de la Fed (...) et que les risques sont plus partagés", commentait l'économiste indépendant Joel Naroff. "Cela signifie qu'elle est plus encline à agir rapidement si l'économie continue de s'améliorer plus rapidement de manière inattendue", a-t-il ajouté. Certains, comme Omer Esiner, analyste pour Commonwealth Foreign Exchange, ont jugé son ton "moins colombe" qu'à l'ordinaire. La réunion académique de Jackson Hole rassemble jusqu'à samedi une centaine de banquiers centraux --dont un quart venant de l'étranger--, de professeurs d'économie et quelques banquiers. Son thème est consacré cette année à "la réévaluation des dynamiques du marché du travail". Mario Draghi, le patron de la BCE, devait intervenir également vendredi alors que la zone euro ne parvient pas à renouer avec la croissance et que certains appellent à davantage de mesures d'assouplissement monétaire pour dynamiser l'expansion et lutter contre les risques de déflation. La BCE, qui a baissé son taux directeur début juin à un nouveau plus bas niveau historique et offert aux banques des prêts à long terme leur permettant de se financer à des conditions avantageuses, n'a plus beaucoup de munitions à sa disposition pour soutenir la reprise. Il lui reste l'option de mesures non-conventionnelles, comme un programme de rachat massif d'actifs de dette publique ou privée, à l'instar de ce qu'a fait la Fed. Mais de tels leviers ne semblent pas être envisagés avant au moins la fin de l'année. Hier, ce sont les gouverneurs de la Banque du Japon Haruhiko Kuroda et du Brésil Alexandre Tombini ainsi que Ben Broadbent, gouverneur adjoint de la Banque d'Angleterre qui participaient à la discussion. Parmi ceux qui assistent à la conférence figuraient aussi --outre les membres du directoire de la Fed, dont Stanley Fisher le vice-président--, les gouverneurs des banques du Chili, du Mexique, de la Turquie, d'Israël, du Canada et de Finlande notamment. Etaient également venus des responsables des banques centrales de Corée du Sud, d'Afrique du Sud, d'Inde, de Pologne, de Russie et de Chine, a précisé la Fed de Kansas City, organisatrice du forum depuis 37 ans.