Le symposium de la Réserve fédérale américaine, qui a réuni les principaux banquiers centraux à Jackson Hole, dans le Wyoming, s'est achevé, avant-hier, sans apporter de véritables réponses sur la mise en œuvre de mesures musclées face au chômage américain et aux tensions de la zone euro. "Qu'est-ce qui retient l'économie ?", s'est demandé Donald Kohn, ancien vice-président de la Fed, résumant le sentiment général. "Comment se fait-il que nous menions depuis si longtemps des politiques monétaires si souples, (et) que nous obtenions si peu de croissance ?" L'université d'été des banquiers centraux a été marquée par l'absence de Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne (BCE), qui a jugé trop lourde sa charge de travail, dans la perspective d'une réunion de politique monétaire, prévue jeudi, sur l'achat éventuel d'obligations d'Etat italiennes et espagnoles. La BCE ne devrait pas révéler sous quel plafond elle entend maintenir les rendements obligataires, ni à quel niveau de rendement elle interviendrait sur le marché, selon une majorité d'économistes interrogés cette semaine par Reuters, qui estiment que l'institution pourrait définir une fourchette de taux, sans en faire état publiquement. Parmi les partisans de l'interventionnisme, Adam Posen, qui a achevé vendredi son mandat de membre du comité de politique monétaire de la Banque d'Angleterre, a regretté le "défaitisme" général des banques centrales. "L'idée d'une banque centrale immaculée, virginale, qui se salirait pour toujours en intervenant, est une manière préhistorique de voir les choses", a-t-il jugé. Méfiance du camp républicain Du côté américain, Ben Bernanke, président de la Fed, a lui pris la parole vendredi, et a estimé que l'économie des Etats-Unis était confrontée à des défis "impressionnants" et que les progrès dans la réduction du chômage étaient trop lents, sans aller jusqu'à envoyer un signal clair sur l'imminence de nouvelles mesures d'assouplissement monétaire. "En prenant pleinement en compte les incertitudes et les limites de ses instruments de politique (monétaire), la Réserve fédérale apportera de nouveaux accommodements, si besoin, pour promouvoir une reprise économique plus forte et une amélioration soutenue des conditions du marché du travail dans un contexte de stabilité des prix", a-t-il dit, alors que le Comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) se réunira les 12 et 13 septembre. Plusieurs économistes présents à Jackson Hole, notamment ceux qui sont proches du camp républicain, se méfient de l'éventualité de nouvelles mesures "non conventionnelles", déjà échaudés par l'injection par la Fed de 2 300 milliards de dollars de liquidités dans l'économie au travers de rachats d'actifs, en réaction à la crise financière et à la récession de 2007-2009. Lawrence Lindsey, conseiller de George W. Bush lors de sa présidence, a demandé aux banquiers centraux de faire preuve de "modestie" et se rappeler les limites de leurs pouvoirs et de l'autorité qu'ils exercent. Une intervention d'Edward Lazear, autre ex-conseiller du président républicain, a tenté de définir si la hausse du chômage américain était conjoncturelle, ce qui justifierait de nouvelles mesures de la Fed, ou structurelle, ce qui déplacerait les responsabilités vers la Maison blanche. Edward Lazear s'est prononcé pour une interprétation conjoncturelle, mais n'a pas convaincu tous ses auditeurs, tel James Bullard, président de la Réserve fédérale de St. Louis, qui estime que "tout le monde a fait l'autruche" sur la question, au cours du symposium.