Le marché obligataire en Europe a été rattrapé par les craintes autour des opérations de prêts de la BCE, qui ont pris le pas sur le soulagement lié à la défaite des indépendantistes en Ecosse. Dans un premier temps, la victoire du non en Ecosse avait poussé les investisseurs à prendre plus de risques et à se détourner des valeurs refuges comme les dettes allemandes et britanniques, provoquant une remontée de leurs taux, et une baisse des taux des pays du Sud, comme l'Espagne et l'Italie, plus prisés par les investisseurs. Finalement, l'annonce d'un remboursement vendredi par les banques de la zone euro d'un prêt de la Banque centrale européenne (BCE) a ravivé les craintes sur l'efficacité de sa politique monétaire. Les banques ont en effet indiqué vouloir rembourser de manière anticipée un montant très important d'un précédent prêt exceptionnel (LTRO) comme elles en ont la possibilité chaque semaine. Cette annonce est tombée au lendemain du lancement d'une autre mesure exceptionnelle de la BCE, le TLTRO, des prêts ciblés aux banques. Les banques européennes ne se sont pas précipitées pour participer à cette opération. Certains analystes pensent que les banques se sont contentées d'emprunter via le TLTRO uniquement pour pouvoir rembourser le précédent LTRO, et non pas pour financer l'économie. "C'est un très mauvaise nouvelle parce que cela signifie que le TLTRO a servi à relayer le LTRO en termes de liquidités et non pas à relancer le crédit comme prévu par la BCE", souligne René Defossez, stratégiste obligataire chez Natixis. A 18H00, le taux britannique à 10 ans a reculé à 2,544%. Il s'était établi à 2,575% jeudi à la clôture sur le marché obligataire secondaire où s'échange la dette déjà émise. Au-delà des problèmes liés à la BCE, le vote écossais est plutôt défavorable à la dette britannique. "Le vote +oui+ aurait provoqué pas mal d'incertitudes qui auraient pu peser sur la croissance, au point d'entraîner, selon certains investisseurs, une baisse des taux de la Banque d'Angleterre (BoE)", rappelle M. Defossez. La victoire du non, "relativement nette, permet donc aux investisseurs de se repositionner et renforce donc l'idée d'une remontée des taux de la BoE", selon M. Defossez. Pour Crédit Agricole CIB, la tendance pourrait même être à une hausse du taux d'emprunt britannique "compte tenu de l'amélioration de l'économie" dans le pays, ce qui va alimenter l'optimisme des investisseurs et donc ouvrir la voie à la remontée des taux de la BoE. Le vote écossais a également eu des conséquences sur l'Espagne, qui a vu son taux se détendre nettement à 2,202% (contre 2,277% la veille à la clôture), la défaite des indépendantistes écossais semblant écarter un effet domino au profit des Catalans. "Le vote écossais détend l'atmosphère en Espagne. Le risque sur la Catalogne est un peu moins important, mais la différence est que le référendum catalan n'est pas reconnu par Madrid", selon M. Defossez. Dans la foulée, les autres dettes des pays du sud de la zone euro ont été aussi recherchées. Le taux de l'Italie a baissé à 2,370% (contre 2,438%). La dette allemande a profité des craintes sur les TLTRO. Le taux allemand s'est établi à 1,043% (contre 1,081%). Le taux de la France a reculé, à 1,390% (contre 1,440%), alors que l'agence Moody's est susceptible de rendre sa décision sur le pays dans la soirée. Des informations de presse ont évoqué jeudi un abaissement de la note, mais elles ont été démenties par le gouvernement. "Ce ne serait pas une énorme surprise et il n'y a aucune raison que cela ait un impact sur la dette française qui plaît toujours aux investisseurs compte tenu du fait qu'elle est plus rémunératrice que la dette allemande", selon M. Defossez. Aux Etats-Unis, le taux à 10 ans reculait également à 2,595% contre 2,614% jeudi, tout comme celui à 30 ans à 3,318% contre 3,348% la veille. Le taux à trois mois était stable à 0,01%.