Même s'il n'y a pas cette nouvelle augmentation des salaires pour ce corps spécial, les forces de rétablissement de l'ordre public recruteront beaucoup. Elles recruteront encore. Opération à mettre sur le compte de la prévention. Les candidats sont fatalement nombreux. Pas la même prévention. C'est plutôt une assurance sur la vie. La sécurité alimentaire. Ce n'est pas tous les jours que s'offre l'occasion d'un emploi durable, à vie, qui durera autant que la vie est préservée, mais c'est ça la vie. De l'autre côté, c'est-à-dire côté criminalité pas obligatoirement organisée, on fait là également dans la prévention. La corruption et les détournements sont opérés maintenant au titre de la prévention, c'est-à-dire que les auteurs de tels actes anticipent sur l'avenir. Quand des officiels noircissent l'avenir en parlant du pic pétrolier, donc, d'un futur appauvrissement, ceux qui ont les moyens, car proches de la décision, c'est-à-dire du pouvoir de façon globale, car même un guichetier dans une banque a du pouvoir, ils décident aujourd'hui de faire ce qu'ils ne pourront plus faire demain. Alors, ils détournent, ils corrompent, ils se font corrompre. L'objectif est alimentaire. Ceux-là ont dû avoir suivi les conférences sur la sécurité alimentaire organisées il y a de cela une dizaine d'années par la commission nationale de défense du sénat. Les exposés faits par les experts étaient assez pessimistes. Ils ne font ainsi que " prendre leurs devants pour protéger leurs arrières". Il ne s'agit que d'une corruption ou d'un détournement en réaction. Mais, il y a deux autres types de criminels. Il y a celui qui a de l'argent et qui corrompt à volonté. Pas de limites à l'insuffisance. Jusqu'à en vomir. Il y a celui qui est bien né, un nom qui possède beaucoup d'influence, car au pouvoir. Une nouvelle classe de corrompus et corrupteurs est apparue. Celle-là achète des mandats électifs. Exclusivement électifs? Il y a des candidats potentiels à la corruption qui sont inspirés par le constat que de hauts dirigeants gèrent l'avenir du pays à la tête des institutions en concevant leur propre avenir à l'étranger. La réflexion immédiate est " pourquoi pas nous ? " Du fait qu'on parle et reparle sans cesse du pic pétrolier à venir, de l'échec de la politique de substitution aux importations, de l'impossibilité à faire croître les exportations hors hydrocarbures, ils ne peuvent que s'inquiéter, s'angoisser même et se convaincre que le salut est ailleurs. Ils en sont convaincus au regard du constat de l'installation à l'étranger des hauts cadres auxquels il est mis fin de mission et de ceux qui s'y préparent en y achetant des résidences. Ces hauts cadres et ceux qui ont édifié des fortunes sur la base de la spéculation, des importations de produits finis, contribuent au désarmement du moral des populations. Alors, les conclusions sont simples. Quand il n'y aura plus d'argent à distribuer, assez d'emplois pour tous, que nos entreprises auront expiré du fait de la terrible concurrence, que les frontières des pays occidentaux seraient fermées à toute immigration, que le pic pétrolier soit survenu , il n'y aura plus de sifflet sur la " cocotte-minute " pour dépressuriser le front social fatalement entré en ébullition. Les armes d'un nouveau banditisme sont les " import-import" et la corruption politico-financière. Quand on achète des mandats d'élus, il n'y a plus de limite à la corruption. Plus de limite. La porte serait ainsi ouverte à la permanence des violences sociales du fait de l'impossibilité à faire face aux demandes sociales qui augmentent en " exponentiel " avec les frustrations socioéconomiques. Il apparaîtrait ainsi que ce seront les nouvelles préoccupations qui vont rythmer notre futur avec de nouveaux concepts qui vont structurer notre pensée. C'est de toute façon le constat conjuré par nombre d'analystes. Nous sommes peut-être en train de sortir d'une insécurité pour entrer dans une autre, avec la seule différence que les auteurs de cette dernière ne cherchent pas à se saisir du pouvoir, mais à devenir des pouvoirs parallèles dans les zones de non droit qu'ils s'efforcent d'élargir et de dessiner. Dans les discours officiels des autorités publiques, il n'y a plus d'indices visibles et audibles qui viennent nous conforter, plus particulièrement conforter ceux qui n'arrivent pas à lire leur avenir pour savoir s'ils pourront arriver un jour à joindre les deux bouts. Tous les concepts utilisés en liaison à la tragédie sont de plus en plus abandonnés. Tout comme il a été considéré que les seuls moyens de force ne seront pas suffisants pour ramener ou imposer la paix dans le cas d'une situation de violence telle celle liée à la tragédie, il devrait être admis que l'abaissement du niveau de la criminalité ne pourrait pas être le résultat de l'emploi exclusif des moyens de répression. Certes, l'emploi des moyens de force et des sanctions pénales est inévitable mais insuffisant comme instrument de prévention et de dissuasion, mais cela ne suffit pas à immuniser la société contre de telles dérives.