Le Pakistan a intensifié ses opérations militaires contre les talibans, annonçant en avoir tué une cinquantaine, après le massacre mardi par les rebelles de 133 écoliers à Peshawar, l'attaque la plus meurtrière de l'histoire du pays. Le carnage de l'école de Peshawar (nord-ouest), revendiqué par le Mouvement des talibans du Pakistan (TTP), principal groupe rebelle islamiste du pays, a profondément choqué le pays et soulevé une vague de condamnations unanimes à l'étranger. Cet assaut est pour le Pakistan un 11 septembre qui va changer la donne, car l'horreur de l'attaque va pousser le pays à tourner définitivement le dos à l'extrémisme, a déclaré vendredi le chef de la diplomatie, Sartaj Aziz. Après l'attaque, les talibans avaient expliqué avoir visé cette école fréquentée par des enfants de militaires pour se venger de l'offensive lancée en juin par l'armée au Waziristan du Nord, leur plus important bastion le long de la frontière afghane. Mais le gouvernement comme l'armée ont réaffirmé leur détermination à poursuivre leurs opérations jusqu'à l'élimination totale du TTP et de ses alliés dans le pays. Vendredi, l'armée a annoncé y avoir tué 32 rebelles à la suite d'une embuscade, puis 18 autres dans une seconde opération. Les forces pakistanaises ont également intensifié leurs opérations contre des cellules terroristes présumées dans plusieurs grandes villes du pays, notamment à Karachi (sud), instable mégalopole de 20 millions d'habitants. La force paramilitaire des Rangers a annoncé y avoir tué un commandant taliban et trois de ses complices. Comme pour les opérations militaires, ces bilans et l'identité des victimes ne pouvaient être confirmés de source indépendante. Juste après l'attaque de Peshawar, le gouvernement avait annoncé la reprise des exécutions de condamnés à mort, suspendues depuis 2008, pour les coupables d'actes terroristes. Jeudi soir, le chef de l'armée, le général Raheel Sharif, a signé un premier ordre d'exécution de six rebelles islamistes.
Sur la potence Selon plusieurs médias locaux, les premières exécutions pourraient avoir lieu au cours des prochains jours. Amnesty International a critiqué la reprise des exécutions, une réaction impulsive qui ne touche pas au cœur du problème: le manque de sécurité pour la population du nord-ouest du Pakistan. La commission des droits de l'homme de l'ONU a également appelé le Pakistan à ne pas répondre aux appels à la vengeance en soulignant dans un communiqué qu'il n'y a aucune preuve que la peine de mort permet de réduire le terrorisme. Les autorités ont placé des renforts autour des prisons du nord-ouest, où sont écrouées de nombreux suspects ou condamnés pour des liens avec des groupes islamistes armés, par crainte d'attaques consécutives à l'annonce de la reprise des exécutions. Depuis trois ans, les rebelles islamistes ont plusieurs fois réussi à attaquer des prisons et à faire libérer plusieurs centaines de leurs frères d'armes dans le nord-ouest. A Islamabad, le chef de la diplomatie pakistanaise Sartaj Aziz est revenu dans un entretien sur la tragédie nationale de l'attaque de Peshawar, un mini 11 septembre qui a selon lui secoué la société pakistanaise toute entière, et nous a fait franchir un seuil dans notre stratégie anti-terroriste. Avant l'attaque, dont le bilan est monté vendredi à 149 morts, dont 133 écoliers, l'opinion était divisée et les talibans avaient de nombreux soutiens, a admis M. Aziz. Mais le carnage a entraîné selon lui un rejet de l'extrémisme sans précédent dans le pays. Il en faudra toutefois apparemment plus pour convaincre tout le monde. Vendredi, le mollah Abdul Aziz, chef de la Mosquée Rouge d'Islamabad, un repaire islamiste notoire, a déclaré que les opérations de l'armée contre les talibans étaient contraires à l'islam. Il a ajouté comprendre que les rebelles se soient vengés en attaquant l'école de Peshawar, un carnage qu'il n'a pas condamné. ô dirigeants, ô gens de pouvoir, si vous commettez de tels actes (bombarder les talibans, ndlr), il y aura des réactions, a-t-il déclaré dans son prêche lors de la grande prière hebdomadaire. Dans l'après-midi, près de 250 personnes se sont rassemblées devant la Mosquée Rouge pour dénoncer les extrémistes tels qu'Abdul Aziz qui soutiennent les talibans.
Exécution de deux condamnés à mort, une 1ère depuis 2008 Le Pakistan a exécuté vendredi par pendaison deux condamnés à mort pour terrorisme, mettant fin à un moratoire en vigueur depuis 2008 sur les exécutions de peine capitale pour les civils, ont annoncé deux responsables de l'administration locale. Islamabad avait annoncé la fin de ce moratoire pour les cas de terrorisme juste après l'attaque mardi d'une école de Peshawar (nord-ouest) par un commando rebelle taliban, un carnage qui a coûté la vie à 149 personnes dont 133 écoliers. Deux condamnés à mort, Aqi alias le docteur Usman et Arshad Mehmood, ont été exécutés vendredi soir à la prison de Faisalabad (est), dans la province du Pendjab, a annoncé le ministre provincial de l'Intérieur, Shuja Khanzada. Leurs exécutions ont été confirmées par un responsable local de l'administration pénitentiaire sous couvert de l'anonymat. Le docteur Usman avait été condamné à mort après avoir été reconnu coupable d'avoir planifié et participé à la sanglante attaque menée en 2009 par un commando taliban contre le siège de l'armée à Rawalpindi, près de la capitale Islamabad. Arshad Mehmood avait lui écopé de la peine capitale pour avoir participé à une tentative d'assassinat en 2003 contre celui qui dirigeait alors le pays, le général Pervez Musharraf. Selon des sources concordantes, le Pakistan, pays de 200 millions d'habitants, compte près de 8 000 condamnés à mort, la plupart ayant épuisé tous les recours. Parmi eux, plus de 500 l'ont été pour des affaires de terrorisme, selon le gouvernement, et sont donc potentiellement concernés par la fin du moratoire. Amnesty international et la commission des droits de l'Homme de l'ONU avaient appelé ces dernières heures le Pakistan à ne pas lever son moratoire, en soulignant que les exécutions de peines capitales étaient inefficaces pour endiguer le terrorisme.