En élisant pour la première fois librement leur président de la République, en la personne de M. Béji Caïd Essebsi, les Tunisiens ont écrit une page historique dans la transition démocratique de leur pays. Tout au long de ce processus démocratique, malgré une campagne électorale parfois violente, le peuple tunisien a su comment transmettre son message d'espoir à tous les peuples qui, comme lui, aspirent à un avenir plus pacifique, démocratique et prospère. Le président sortant, Moncef Merzouki, assez soutenu par le parti Ennahdha et l'ensemble de la mouvance islamiste, n'est pas parvenu, durant son mandat, à consolider les assises politiques et socioéconomiques du pays, pris dans une spirale d'insécurité conséquence d'un terrorisme auquel les Tunisiens ne sont nullement habitués. Il est observé que les islamistes étaient en proie à de graves contradictions, qu'ils n'étaient pas parvenus à se refaire une unité après la défaite subie lors des élections législatives d'octobre dernier. Un recul dont a su profiter Nidaa Tounés et ses soutiens dans la société civile pour atteindre un degré de consensus qui lui a permis à la faveur du second tour de l'élection présidentielle de dimanche de devenir la future alternative politique pour la Tunisie. Un bilan social électoralement encourageant pour l'avenir. Mais le plus dur reste à faire. Il faudrait beaucoup de temps au président Caïd Essebsi et à son équipe pour défaire la Tunisie de cette crise, c'est-à-dire se forger une nouvelle identité, car en politique comme en football, les grands écarts se soldent souvent par un claquage. Dans ce contexte, le nouveau chef d'Etat a besoin davantage d'unité autour de son programme basé sur la réhabilitation de l'autorité de l'Etat, le développement économique et social, la lutte contre le terrorisme et la réconciliation nationale. Il lui faut aussi renouveler son langage et sa façon de poser les problèmes, compte tenu des changements intervenus en Tunisie au lendemain de la "révolution du jasmin". "Nous ne pouvons pas nous adresser au peuple tunisien comme l'a fait le précédent régime. Moncef Merzouki et ses alliés islamistes ont bouleversé à tel point la société tunisienne qu'il nous faut trouver des formes nouvelles d'action politique, correspondant à la situation actuelle", assure un membre du staff du nouveau président, Béji Caïd Essebsi. Cela explique que celui-ci envisage le développement immédiat de la lutte de classe dans son pays, devant conduire à la formation d'un bloc démocratique, dont feront nécessairement partie toutes les sensibilités politiques. Béji Caïd Essebsi, par sa position claire, lucide et juste, ses engagements politiques contre le religieux-politique, depuis l'immolation de Bouazizi, dans la lutte du peuple tunisien pour son progrès politique et démocratique et sa prospérité économique, vient de gagner une bataille importante en acculant les islamistes à jeter le masque jusque-là piétiné de la réconciliation nationale dont la troïka au pouvoir depuis quatre ans s'était affublée. Malgré les manœuvres, les coups bas et autres mesquineries tous azimuts enregistrés au cours de la campagne électorale, la majorité de l'électorat tunisien s'est donnée la main pour mener leur favori à la présidence de la Tunisie. L'espoir. Solidairement a été celui de toute la Tunisie.