Les investisseurs de la Bourse de Tokyo auront les yeux rivés la semaine prochaine sur la réunion de la Banque centrale européenne (BCE), après la décision de la Banque nationale suisse (BNS) de supprimer le taux plancher du franc suisse face à l'euro. Vendredi, l'indice Nikkei 225 a perdu 1,43% pour finir à 16 864,16 points. L'indice de référence a cédé 1,94% au cours de la semaine. L'indice Topix a clôturé en baisse de 0,93% à 1 363,73 points. Il a baissé de 1,22% au cours d'une semaine d'échanges écourtée. L'indice Nikkei a perdu jusqu'à près de 3% en cours de séance vendredi alors que le yen, valeur refuge par excellence, s'est fortement apprécié après la décision surprise de la banque centrale suisse de supprimer le taux plancher du franc suisse face à l'euro, ce qui a bouleversé le marché des changes. "La spéculation a attisé la volatilité du marché", a indiqué Kenzaburo Suwa, stratégiste chez Okasan Securities. L'abandon par la BNS du taux plancher, l'axe principal de sa politique monétaire depuis plus de trois ans, a déclenché une montée en flèche du franc suisse et une véritable tempête en Bourse. L'euro est tombé jeudi dans la matinée à son niveau le plus faible face au franc suisse depuis l'introduction de la monnaie unique en 1999, à 0,8517 franc pour un euro, contre 1,2010 auparavant. Il s'est ensuite repris et cotait vendredi vers 09H00 GMT à 1,0069 franc suisse pour un euro. "Maintenir un franc suisse bas face à l'euro aurait été trop coûteux pour la BNS, à un moment où la BCE veut potentiellement stimuler encore l'économie", a indiqué Juichi Wako, stratégiste chez Nomura Holdings, interrogé par Bloomberg. Dans la foulée, le yen, considéré comme une valeur refuge, a notablement augmenté, un mouvement défavorable aux affaires des groupes exportateurs nippons. A la clôture de la place tokyoïte vendredi, le dollar se situait à 116,59 yens, comparé à 117,87 yens la veille. L'euro se repliait encore plus: il valait 135,90 yens à la fermeture, après être descendu à 134,70 yens, contre plus de 138,50 un jour plus tôt, un écho de sa débâcle face au franc suisse qui se conjugue à l'attente de nouvelles mesures de la Banque centrale européenne (BCE). Outre cette tempête monétaire, les investisseurs tokyoïtes ont été échaudés par la contre-performance de Wall Street, qui a reculé jeudi pour la cinquième séance consécutive, déçue par les résultats trimestriels de grandes banques américaines et inquiète face à la rechute des cours de l'or noir. Mais "le marché devrait retrouver son calme après l'annonce de la Banque centrale européenne (BCE)" jeudi, a estimé M. Suwa, soulignant que la réunion de l'institution "sera l'événement le plus important de la semaine". Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne, a confirmé vendredi que l'institution étudiera un rachat d'obligations souveraines lors de sa réunion du 22 janvier, dans le but "d'assurer la confiance dans la capacité de la banque centrale à stabiliser l'inflation". La mise en place d'un programme de rachats d'actifs, dont des dettes souveraines, pour stimuler l'activité économique aurait pour effet collatéral de diluer la valeur de l'euro. Au sein du Nikkei, seules 31 valeurs ont résisté à ce climat morose, à l'image du géant des cigarettes Japan Tobacco (+1,26% à 3 159,5 yens), du groupe pétrolier Showa Shell Sekiyu (+1,74% à 1 163 yens) ou encore du fabricant de montres Citizen Holdings (+2,57% à 916 yens). Mais c'est le groupe Screen Holdings, spécialisé dans les équipements de production de semi-conducteurs, qui a mené la danse (+8,13% à 731 yens) à la faveur d'un relèvement de recommandation par une maison de courtage. A l'opposé, Sony a plongé de 4,63% à 2 384 yens. Le géant a fait état d'un recul de ses ventes américaines de consoles et jeux vidéo en décembre. Il est de surcroît très sensible aux variations des taux de change de par sa forte implantation à l'étranger, tout comme Kyocera, groupe de composants électroniques, téléphones mobiles et systèmes photovoltaïques (-3,11% à 5 155 yens). Aucun secteur n'a été épargné: ni l'automobile (Mitsubishi Motors a décliné de 1,52% à 1 035 yens), ni les compagnies aériennes (ANA a perdu 1,39% à 304,4 yens et Japan Airlines 0,91% à 3 790 yens). Idem du côté des poids lourds de la cote: Fast Retailing, maison-mère de la marque Uniqlo, a abandonné 3,66% à 41'370 yens), et l'opérateur de télécommunications SoftBank 2,50% à 6836 yens. La galerie marchande Rakuten a elle aussi fléchi (-2,07% à 1 603,5 yens) malgré l'annonce jeudi par son patron Hiroshi Mikitani d'un nouveau service. Le groupe va installer des consignes dans les bureaux de poste nippons pour faciliter la livraison de colis, dans le cadre de sa stratégie qui vise à mieux marier le commerce réel et virtuel.