Les cours du pétrole ont réussi à dégager une nouvelle hausse jeudi, au lendemain d'une envolée due à l'annonce d'une petite baisse de la production et d'une augmentation des stocks de brut moins forte que prévu aux Etats-Unis. Le prix du baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en mai a gagné 32 cents, à 56,71 dollars, sur le New York Mercantile Exchange (Nymex). A Londres, le baril de Brent pour livraison en juin, dont c'était le premier jour de cotation, a également terminé en hausse, gagnant 66 cents pour atteindre les 63,95 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE). C'était la sixième séance consécutive de hausse pour les cours du WTI, qui sont revenus à leur niveau d'avant Noël. Pourtant la journée avait commencé dans le rouge, des investisseurs saisissant l'occasion de rafler quelques bénéfices après le bond de presque 6% enregistré mercredi. Mais James Williams, chez WTRG Economics, a estimé que l'annonce d'un nouveau petit (-20 000 barils par jour) reflux de la production américaine dans la semaine achevée le 10 avril, le deuxième en trois semaines, expliquait l'optimisme durable des investisseurs. "Si on multiplie cela par 52, cela représenterait environ un million de baril par jour", a-t-il dit, tout en convenant qu'"on n'aura pas vraiment d'idée précise avant la fin juin ou juillet". "On voit enfin dans les données hebdomadaires l'impact des prix bas sur la production américaine, et c'est très positif", a-t-il dit. Tout reflux de la production fait espérer aux investisseurs que le marché, actuellement marqué par la surabondance de l'offre face à une demande insuffisante pour l'absorber, finisse par enclencher un rééquilibrage. Comme autre facteur de hausse des cours, M. Williams citait les initiatives des parlementaires américains, qui ont adopté mardi en commission un projet de loi leur donnant un droit de regard sur les pourparlers sur le nucléaire iranien. Le marché du pétrole craint en effet qu'un accord définitif entre l'Iran et les grandes puissances conduise à une levée des sanctions visant la République islamique, et par conséquent à un subit afflux de brut iranien. Mais selon M. Williams, la mobilisation du Congrès signifie "qu'il faudra plutôt plus que moins de temps pour arriver à un accord". De son côté Phil Flynn, chez Price Futures Group, a noté que ceux qui pariaient sur la poursuite d'une demande atone pourraient être contredits, car la demande chinoise reste solide, et "la demande des raffineries américaines est au plus haut". Pour Carl Larry, chez Frost & Sullivan, le marché et actuellement engagé dans un mouvement de fond à la hausse qui pourrait porter le cours entre 65 et 70 dollars, grâce à un rééquilibrage de l'offre et de la demande. "On commence à voir les raffineries tourner plus vite", et avec la hausse de la demande qui va accompagner le retour des beaux jours, "nous allons commencer à voir plus d'utilisation des stocks de brut, tandis que la production a atteint un pic", a-t-il dit. En Asie, les cours du pétrole s'inscrivaient à la baisse dans les échanges matinaux sous l'effet de prises de bénéfices après une nouvelle baisse de la production américaine et une augmentation des stocks de brut moins forte que prévu aux Etats-Unis qui avaient fait bondir les prix la veille. Monté mercredi à son plus haut niveau depuis près de quatre mois, le prix du baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en mai cédait 33 cents, à 56,06 dollars dans les échanges électroniques. Le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juin, dont c'était le premier jour de cotation à cette échéance, perdait 54 cents, à 62,78 dollars. Alors que la production américaine d'or noir ne cesse de progresser, gonflant les stocks et aggravant l'excédent d'offre mondiale qui a fait plonger les cours de plus de 50% depuis juin 2014, le ministère américain de l'Energie (DoE) a annoncé mercredi que la production américaine s'était établie à 9,384 millions de barils par jour (mbj) durant la semaine achevée le 10 avril, soit un reflux de 20 000 barils par jour en une semaine. C'est la deuxième fois en trois semaines que la production affiche un petit recul. Le DoE a en outre fait état d'une progression moins importante que prévu des stocks de pétrole brut aux Etats-Unis, abondés à hauteur de 1,3 million de barils seulement, contre 3,6 millions attendus, à 483.69 millions. Il s'agit toutefois du plus haut niveau enregistré à ce moment de l'année depuis au moins 80 ans. Par ailleurs, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) a légèrement relevé sa prévision de croissance de la demande mondiale de pétrole en 2015 tandis que la production des pays hors Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) devrait croître moins vite. L'AIE s'est néanmoins voulue prudente en précisant que la résorption de la surabondance de pétrole sur le marché pourrait prendre plus de temps que prévu, du fait notamment de l'accord sur le nucléaire iranien qui laisse présager une nouvelle hausse de la production.
Le marché en "surabondance croissante", selon l'Opep L'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a maintenu jeudi sa prévision de demande mondiale de brut en 2015, relevant une "surabondance croissante" de l'offre sur le marché. Le surplus a bondi à 2,54 millions de barils par jour (mbj) au premier trimestre, la production de pétroles de schiste ayant continué de croître en Amérique du Nord et le cartel de douze pays, qui pompe environ un tiers du brut mondial, ayant à nouveau dépassé ses propres quotas, à 30,32 mbj, selon le rapport mensuel de l'organisation. La production de l'Opep a même bondi à 30,79 mbj en mars. Sur l'ensemble de l'année 2014, le surplus mondial s'était établi à 1,11 mbj en moyenne, rappelle l'Opep. Contrairement à l'Agence internationale de l'énergie mercredi, l'Opep n'entrevoit pas d'accélération de la demande de brut cet année et maintient sa prévision à 92,5 mbj, soit une hausse de 1,17 mbj par rapport à l'année précédente. Malgré des prix toujours bas, la production non-Opep devrait continuer à croître cette année, avec une hausse de 0,68 mbj. Ce chiffre a toutefois été légèrement révisé à la baisse, à hauteur de 0,165 mbj, l'Opep entrevoyant un tassement de la production en Amérique du Nord. Le rapport relève par ailleurs une bonne tenue de la production de la Russie, deuxième producteur mondial, "malgré des prix bas du pétrole et un accès limité aux financements en raison des sanctions". La production russe a atteint 10,71 mbj en mars, un "record de l'ère post-soviétique". Mais "les perspectives pour les prochains mois sont incertaines", note l'Opep. En novembre, l'organisation avait cependant décidé de maintenir son plafond à 30 mbj, l'Arabie saoudite, notamment, refusant que le cartel joue les variables d'ajustement sur le marché mondial. Selon les propres calculs de l'Opep, qui dépasse presque toujours son propre quota, la demande moyenne adressée au cartel doit avoisiner les 29,3 mbj cette année.