Périodiquement, et aux échéances définies par la Constitution, des populations se rendent aux urnes pour exprimer leurs préférences. Elles y vont pour élire leurs représentants. C'est devenu une tradition dans l'exercice par chacun de ses droits démocratiques. Tous les critères définissant un processus démocratique sont réunis. Le chemin emprunté est balisé. Il l'est d'abord par l'instruction présidentielle adressée aux fonctionnaires leur interdisant de sortir de leur neutralité lors de leur participation à l'organisation du scrutin. Il l'est également par la constitution d'une instance chargée de la surveillance de l'élection. Le contrôle de la régularité du scrutin n'est pas seulement une préoccupation, mais une grande mission. Le président de la République y tient fortement et fermement, d'où sa décision d'installer une commission de surveillance formée de magistrats. Et plus encore, la porte est ouverte à des observateurs internationaux, membres de l'Union africaine, du monde arabe, de l'Union européenne, des Nations unies. C'est qu'il s'agit de l'élection présidentielle. De celle dont on dit qu'elle est la clé de voûte du système politique. Beaucoup d'attention, beaucoup d'émotion. Cela est compréhensible car il s'agit d'élire celui qui représentera l'Etat en Algérie et à l'extérieur. Il s'agira d'élire le premier magistrat du pays, le chef suprême des forces armées. Celui dont le programme politique sera de garantir l'expression des libertés publiques. Celui dont le programme économique sera celui de prendre en charge les préférences socio-économiques des populations. Celui qui sera chargé de rétablir la paix et la sécurité dans le pays et de réunir les conditions du développement par la mise en œuvre de son programme. L'élection est dite libre. Chaque citoyen est éligible à cette fonction pourvu qu'il satisfasse dans la transparence aux critères définis et portés dans la Constitution. L'opposition est organisée et libre. Les partis sont reconnus et activent pleinement dans le cadre de la loi. La loi a été soumise à des amendements ou à son rejet au sein des deux chambres parlementaires. Autant dire qu'elle a été approuvée par les partis politiques par le biais de leurs parlementaires. La Constitution garantit l'alternance à tous les niveaux de l'édifice institutionnel, c'est-à-dire aux assemblées élues communales, aux assemblées élues de wilaya, aux assemblées parlementaires, et enfin bien sûr et bien évidemment à l'institution présidentielle. Beaucoup de changements ont été apportés depuis l'avènement du président. Parmi eux, il y a celui de la perte par chacun de son ennemi idéologique, ce qui a rendu le champ politique plus serein, car débarrassé de ses intolérances. Il n'a pas perdu ses convictions car ses adversaires idéologiques n'ont pas perdu les leurs. C'est franc de ce côté-là. A part donc ce dernier, par rapport aux élections législatives déjà consommées, depuis longtemps, nous semblons nous situer dans le cas d'une pause stratégique en matière d'hostilités, du moins sur le plan verbal, entre camps idéologiquement antagonistes alors que se refuser mutuellement le droit à l'existence politique était leur passe-temps favori, car cela justifiait pour les uns et les autres le combat dont ils disaient être porteurs. Pour ce qui concerne les démocrates, ceux qui sont ou qui disent qu'ils sont dans l'opposition, d'une part, ne se reconnaissent pas mutuellement, au sein même de celle-ci, le caractère démocrate, d'autre part ne reconnaissent pas également, à ceux qui sont au pouvoir, le caractère démocrate. Selon l'opposition, le RND n'est pas un parti démocrate. Mais, les partis qui sont dans l'opposition et qui se réclament de la démocratie, ne partagent pas tout à fait l'explication du contenu du concept de démocratie, preuve étant que la déjà la tentative de les réunir n'avait pas pu faire long feu. Qui est démocrate quand tous, y compris le FLN et les partis islamistes se réclament de la démocratie ? On parle bien de mouvance démocrate, mais c'est plutôt la presse qui en parle, qui en identifie les composantes, qui leur prête un rôle qu'ils n'ont plus et qu'ils risquent de finir par perdre car, comme disait Charles Pasquoi, à force de reculer, ils risquent de sortir du champ. Il y en a bien parmi les analystes pour affirmer que l'étude des différentes stratégies investies par tous ceux qui se réclament de l'islamisme accrédite la thèse d'une parfaite coordination et de l'existence d'un chef d'orchestre invisible qui répartit les missions entre les différents acteurs islamistes et que c'est lui-même qui indique qui sera dans l'opposition parlementaire, qui se rapprochera du pouvoir pour s'y arrimer, qui entrera dans un processus de trêve, qui " descendra " dans le cadre de la réconciliation, qui restera dans les maquis pour forcer le pouvoir à faire plus de concessions. Par contre, il n'y aurait pas cet équivalent chef d'orchestre pour la mouvance démocrate.