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Grèce : La zone euro adopte un plan de sortie de crise
Publié dans Le Maghreb le 14 - 07 - 2015

Les dirigeants de la zone euro ont adopté hier matin au terme de près de 48 heures de négociations un plan de sortie de crise pour maintenir la Grèce au sein de l'union monétaire. Athènes devra mettre en œuvre immédiatement un douloureux plan de réformes.
"Le sommet de la zone euro a trouvé un accord à l'unanimité. Nous sommes tous prêts pour un programme d'aide pour la Grèce via le Mécanisme européen de stabilité (MES), avec des réformes sérieuses et un soutien financier", a indiqué le président du Conseil européen, Donald Tusk hier matin devant la presse. "Il y a des conditions strictes à remplir. (...) Cette décision donne à la Grèce une chance de se remettre sur le droit chemin avec le soutien de ses partenaires européens", a-t-il encore estimé.

Une décision historique
Le président français François Hollande a salué dans l'accord conclu hier à Bruxelles une décision historique qui permet à la Grèce de rester dans la zone euro, soulignant en même temps le choix courageux du Premier ministre grec, Alexis Tsipras.
Un accord a été trouvé. Cet accord la France le cherchait, le voulait. Il permet à la Grèce de rester dans la zone euro, a lancé le président français à l'issue d'un sommet exceptionnel de l'Eurogroupe. La crédibilité de l'Europe aurait été atteinte s'il n'y avait pas eu d'accord aujourd'hui, a-t-il estimé au terme de dix-sept heures de négociations marathon, saluant une décision à bien des égards historique. Le Premier ministre grec a fait un choix courageux au moment même où il lui était demandé d'autres réformes, mais en même temps il savait que c'était la condition pour bénéficier des financements, a-t-il fait valoir, rappelant les prêts de 80 milliards d'euros permettant à Athènes de financer ses projets et de faire face à ses échéance, plus les 35 milliards du plan Juncker pour les investissements et le plan à court terme. L'objectif, c'était de faire en sorte que la zone euro soit préservée dans son unité, dans sa solidarité, c'était aussi de donner un espoir à la Grèce après tant d'années de souffrance, d'austérité, même si, a-t-il prévenu, la Grèce n'en a pas terminé et qu'elle devra encore faire des efforts. Dans les négociations, le rôle de la France a été de chercher tout au long de ces dernières semaines à rapprocher les positions, de respecter le peuple grec mais aussi les autres nations qui composent la zone euro, a plaidé M. Hollande qui tout au long de la crise a joué le compromis face à la fermeté de Berlin. Alors que le couple franco-allemand a traversé une période de tension inégalée dans cette crise, M. Hollande a rappelé l'importance de sa relation avec la chancelière. Dans cette période, il fallait garder ce rapport franco-allemand, cette relation entre Mme Merkel et moi-même qui est nécessaire si on veut aboutir à un compromis. S'il n'y a pas cette solidité, qui n'empêche pas parfois des différences, s'il n'y a pas cette cohésion pour chercher un compromis, il n'y a pas d'accord, a insisté le chef de l'Etat français.
Selon lui, il fallait également qu'Alexis Tsipras qui avait déjà fait voter des réformes puisse aussi faire valoir ses attentes et ses propositions. M. Hollande a par ailleurs annoncé que l'Assemblée nationale française se prononcerait mercredi par un vote sur l'accord. Sous le feu des critiques à la fois de son opposition et de l'aile gauche de sa majorité, il a souligné que l'intérêt de la France était que la Grèce reste dans la zone euro car si la Grèce (en) était sortie, ç'eut été une amputation de (ses) créances.

Le Grexit a disparu
"L'accord a été laborieux", a pour sa part reconnu le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker. Et d'ajouter, dans une brève déclaration, que "le Grexit a disparu". "Depuis le début, la Commission n'a cessé d'insister sur le fait que nous ne saurions accepter une quelconque forme de Grexit".
Au terme d'un sommet convoqué d'urgence et d'une nuit entière de négociations, les chefs d'Etat et de gouvernement de la zone euro ont scellé un accord avec la Grèce tôt lundi. Il permettra de négocier un troisième renflouement visant à maintenir dans la zone euro un pays au bord de la faillite.

Eviter l'effondrement
Du côté grec, le Premier ministre Alexis Tsipras insistait sur le soulagement immédiat que représente l'accord et sur le fait d'avoir obtenu une restructuration de la dette grecque, une demande très difficile à faire accepter par les créanciers. "Au terme d'une bataille âpre, nous avons réussi à emporter une restructuration de la dette", a déclaré M. Tsipras à la presse à l'issue de discussions. L'accord est susceptible de produire de nouveaux investissements pour aider le pays à sortir de la récession et éviter un effondrement de son système bancaire, a-t-il ajouté.
"L'accord est difficile, mais nous avons coupé court au mouvement de transfert d'actifs publics à l'étranger. Nous nous sommes épargné un étranglement financier et un effondrement du système bancaire", a dit encore M. Tsipras.

La pilule est amère
L'aménagement de la dette grecque suscitait de fortes réticences dans certains pays comme l'Allemagne. Mais elle constitue le principal argument du premier ministre grec pour faire accepter par ses compatriotes les nouvelles mesures d'austérité. Privatisations, coupes budgétaires, libéralisation du marché du travail et de pans entiers de l'économie, la pilule est amère pour la gauche radicale d'Alexis Tsipras qui avait fait de la lutte contre les politiques d'austérité son cheval de bataille devant les électeurs. Le leader de la gauche radicale grecque a cependant réussi à éviter, lors des négociations, qu'un fonds regroupant des actifs publics grecs destinés à être privatisés soit domicilié au Luxembourg.

Plan de réformes durci
Excédés par les revirements du gouvernement Tsipras au cours de plusieurs mois de négociations, les responsables de l'union monétaire ont obtenu que le Parlement grec adopte d'ici le 15 juillet une réforme de la TVA et des retraites. C'est à ce moment-là seulement qu'ils enclencheront le processus formel d'un troisième plan de sauvetage évalué à 80 milliards d'euros. Les dirigeants européens redoutaient qu'après l'obtention des fonds, le gouvernement grec n'interrompe la mise en œuvre des privatisations et des réformes promises à ses créanciers, comme celle des retraites ou de la fiscalité.
Ils ont également durci de manière conséquente le plan de réforme approuvé samedi par le Parlement grec et qui reprenait déjà de nombreuses exigences des créanciers. Ces demandes avaient pourtant été nettement rejetées par les citoyens grecs lors d'un référendum le 5 juillet.

Un "coup d'Etat"
La liste des réformes exigées de la Grèce par les autres pays de la zone euro pour lancer les négociations sur un troisième plan de sauvetage a déclenché des réactions violentes sur les réseaux sociaux. Des internautes dénoncent un "coup d'Etat" de l'Allemagne. #ThisIsACoup (C'est un coup d'Etat) était le deuxième hashtag sur Twitter dans le monde et le premier en Allemagne et en Grèce alors que les chefs d'Etat et de gouvernement de la zone euro continuaient à discuter lundi matin. Ils veulent convaincre le Premier ministre grec Alexis Tsipras d'entreprendre des réformes douloureuses pour obtenir de nouveaux financements.

Paul Krugman
L'affaire a pris de l'ampleur quand le mot-clé a été salué par le prix Nobel d'Economie Paul Krugman, sur son blog du New York Times : "Le hashtag à la mode ThisIsACoup est tout à fait juste", écrit-il. "Cela va au-delà du sévère, vers l'envie de vengeance, la destruction totale de la souveraineté nationale et aucun espoir de soulagement." "C'est conçu, on peut le supposer, pour être une proposition que la Grèce ne peut pas accepter, mais, même ainsi, c'est une trahison grotesque de tout ce que le projet européen était censé représenter", ajoute l'économiste. La proposition de création d'un fonds basé au Luxembourg dans lequel seraient placés 50 milliards d'euros d'actifs à privatiser et dont les produits serviraient directement en rembourser la dette grecque, sans passer par Athènes, a été particulièrement critiquée sur internet. Le hashtag semble être apparu dimanche dans la soirée, lancé par un certain Sandro Maccarrone, qui se présente comme professeur de physique de Barcelone. "La proposition de l'Eurogroupe est un coup d'Etat déguisé contre le peuple grec. #ThisIsACoup." En quelques heures, il avait été utilisé près de 200 000 fois. "Je ne peux soutenir une Europe qui agit comme un huissier brutal contre la Grèce. #Thisisacoup", a twitté Suzanne Moore, chroniqueuse pour le quotidien britannique The Guardian.

Pure humiliation
La députée allemande Barbara Lochbihler, qui représente les Verts au Parlement européen, a pour sa part twitté : "Ils parlent de confiance. Pour finalement rédiger une proposition qui est une pure humiliation. Brillante idée. #ThisIsACoup."
Dans les images associées au hashtag, figurent le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble marqué de la croix nazie et le drapeau bleu européen avec son cercle d'étoiles dorées réorganisées dans le même symbole nazi. Des images de l'occupation de la Grèce par l'Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale ont aussi été diffusées. Mustapha S.


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