La Bourse de New York, après une dégringolade de plus de 3% vendredi, est entrée en phase de correction, sans toutefois que les analystes s'accordent à diagnostiquer un simple à-coup passager ou la véritable fin d'une hausse boursière de six ans et demi. Lors des cinq dernières séances, l'indice vedette Dow Jones Industrial Average a chuté de 5,82% à 16.459,75 points, et le Nasdaq, à dominante technologique, a dévissé de 6,78% à 4.706,04 points, avec une soudaine accélération dans les dernières minutes de la séance de vendredi. L'indice élargi S&P 500, jugé le plus représentatif par de nombreux investisseurs, a dégringolé de 5,77% à 1.970,89 points. C'est sa chute hebdomadaire la plus marquée depuis septembre 2011. "La question se pose de savoir s'il s'agit d'une correction dans un marché restant (fondamentalement) orienté à la hausse, ou d'un marché qui s'oriente (durablement) à la baisse", a commenté Hugh Johnson, de Hugh Johnson Advisors. Penchant plutôt pour l'hypothèse optimiste d'une inflexion provisoire, M. Johnson avouait trouver la situation "déstabilisante". "Cela fait très longtemps que le marché avançait sans correction", a noté de son côté Tom Cahill, chez Ventura Wealth Management, espérant toutefois que la situation se stabilise la semaine prochaine. "Je ne vois pas de signe qui pourrait envoyer le marché" en baisse durable, a-t-il ajouté, soulignant que l'économie américaine continuait à créer mois après mois des centaines de milliers d'emplois, et s'affichait en croissance. A ce titre, M. Cahill guettera la publication jeudi d'une nouvelle estimation du produit intérieur brut pour le deuxième trimestre, "qui sera révisé en hausse", et le lendemain les statistiques sur les dépenses et revenus des ménages. Mais Gregori Volokhine, chez Meeschaert Financial Services, a noté que ces chiffres, aussi bons soient-ils, risquaient de ne pas peser lourd. En particulier pour le produit intérieur brut, qui remonte à la période avril-juin, "c'est à dire avant les difficultés des négociations sur la dette grecque et la preuve que l'économie chinoise est en fort ralentissement", donnée par la récente dévaluation du yuan.
- Spéculateurs saignés - Selon M. Volokhine, ces événements récents ont saigné les investisseurs spéculatifs, qui doivent pour se refaire prendre des bénéfices en vendant les valeurs locomotives de ces derniers mois. C'est la raison selon lui pour laquelle "toutes les entreprises qui ont prouvé leur croissance", certaines des plus florissantes de la cote comme Facebook, Disney ou Boeing, voient leur cours baisser. Résultat, assure-t-il: "le momentum des marchés est cassé", ce qui "montre le décalage entre la réalité, plutôt bonne en ce qui concerne les Etats-Unis, et les marchés", qui "ne voient pas ce qui va les faire sortir de la pression à la baisse". De son côté, M. Cahill a noté que les éléments déclencheurs de cette correction, comme la panne de croissance des pays émergents et le marasme des matières premières, ne datent pas de ces derniers jours ni même des derniers mois. "Mais maintenant tout le monde y prête attention", et "craint une répétition de 1998, quand le S&P avait dégringolé de 20% à cause de la chute des monnaies des pays émergents". "Je ne crois pas que la situation actuelle soit identique", mais "il y a quand même beaucoup de choses qui se passent", a-t-il dit. "Une fois que les investisseurs spéculatifs auront cessé de vendre, il y aura un retournement", veut croire M. Johnson, assurant que ce genre de correction "ne dure jamais éternellement". Surtout, a-t-il relevé, si les chiffres attendus la semaine prochaine sur le marché immobilier américain et les ventes de biens durables s'avèrent positifs comme il s'y attend. Chez Genesis Asset Management, Mike Williams appelait pour sa part à garder son calme dans la tempête. "Nous sommes revenus au niveau d'il y a un an", a-t-il noté. "La panique pourrait nous envoyer encore un peu plus bas", mais cela ne ferait que créer des occasions d'investissement à bons prix, assurait-il. "Le marché est maintenant sous-évalué, alors qu'il était récemment encore surévalué, et ça c'est une bonne nouvelle", a conclu Hugh Johnson.