A l'occasion de la tenue de la Conférence internationale sur le climat à Paris, Euronews a interrogé le président de la Banque mondiale (BM), Jil Yong Kim. Pour l'institution internationale, une politique plus écologique est nécessaire pour l'Afrique. Jim Yong Kim a aussi évoqué les perspectives économiques pour les prochains mois. Dans cette interview il a également donné les grandes lignes du nouveau plan pour le climat en Afrique. " Pour les quatre prochaines années, nous avons lancé un appel à la levée de fonds pour récolter 16 milliards de dollars supplémentaires pour aider l'Afrique avec ce plan. De nombreuses capacités d'adaptation doivent être développées ". Il explique qu'il s'agit de programmes africains qui concernent naturellement les traitements médicaux, mais aussi les capacités d'adaptation. " Par, exemple, l'Afrique perd beaucoup de terres, elles se détériorent, il y a la désertification. Nous annonçons donc notre soutien à ce que l'on appelle le mur vert : littéralement construire un mur vert pour protéger les terres arables existantes pour les empêcher de se désertifier. Nous devons améliorer nos capacités à s'adapter aux événements climatiques extrêmes ". Il vise à travers cela les systèmes d'alerte précoce en cas d'avènement climatique qui peuvent avoir un impact énorme. Pour s'y faire il insiste sur davantage de données, " nous devons vraiment savoir où nous en sommes en termes d'adaptation au changement climatique, notamment avec une agriculture s'adaptant au climat, par exemple des routes qui fonctionnent même en cas d'inondations, des villes plus propres, plus vivables. Voilà le genre de choses dont nous avons besoin pour comprendre où nous en sommes. Nous devons utiliser nos connaissances pour aider l'Afrique à passer à la prochaine étape. Toutes ces choses font partie du plan. Nous allons aussi augmenter notre financement des énergies renouvelables. La demande en énergie renouvelable est très élevée en Afrique, mais parfois les financements ne sont pas disponibles. Nous devons trouver les moyens de mettre en place des financements à bas coût pour qu'on investisse plus dans les énergies renouvelables ". Pourquoi cette concentration particulière sur l'Afrique ? La réponse du président de la BM a été : " Notre inquiétude et celle des pays africains était que la rencontre et les débats sur le changement climatique allait se concentrer sur la réduction de la quantité de carbone dans l'air pour le bien des pays riches. Et les pays pauvres disaient : Et nous, nous n'avons pas encore émis de carbone, et pourtant, c'est nous qui souffrons le plus. C'est sur nous que pèse la menace du changement climatique. C'est ce qu'ils disent. Si c'est le cas, quelque chose peut-il ressortir de ces rencontres qui soit positive pour l'Afrique ? Il pense que oui, et qu'il y a lieu qu'on s'engage beaucoup plus pour aider l'Afrique à s'adapter au changement climatique et en même temps, passer à des ressources d'énergies plus propres pour soutenir la croissance et le développement en Afrique. L'Afrique a connu une croissance très rapide et l'un des freins à la croissance est l'accès à l'énergie. " Donc nous devons trouver des façons de répondre aux besoins en énergie, mais de manière propre. Cela ne va pas être facile. D'un autre côté, la technologie existe et nous pensons que nous pouvons aussi dégager des financements ". Revenant sur la récolte d'un fonds pour aider l'Afrique,, M. Jim Yong Kim, rappelle que : " Nous ne faisons pas seulement un appel aux dons, nous mettons nous-mêmes un tiers de la somme. Sur les 16 milliards, 5,7 proviendront de la BM. Notre logique est la suivante : les Etats ont les programmes, nous mettons le premier tiers de la somme. Nous pensons que tout le monde devrait se proposer pour soutenir le reste du plan. Abordant le volet de l'économie internationale et les attentes de la BM pour 2016, M. Jim Yong Kim déclare que la croissance est encore décevante. Le seul pays, la seule économie avancée qui semble avoir de bons résultats, ce sont les Etats-Unis. Bien sûr il y a eu des indices indiquant que la réserve fédérale américaine allait augmenter le taux directeur en décembre. "" Nous observons aussi une énorme fuite de capitaux des marchés émergents et des pays en développement qui sont beaucoup plus demandeurs de nos fonds. Nous devons maintenant nous impliquer, car les banques quittent les marchés émergents et les pays en développement. Nous devons désormais intervenir et jouer notre rôle cyclique habituel et fournir des financements. Tout cela se passe dans une période difficile, mais nous pensons qu'il s'agit aussi d'une opportunité en particulier pour repenser notre manière d'investir dans ces pays en développement. Si nous pouvons aller maintenant vers des énergies plus propres, vers des activités qui à la fois développeront le pays et auront un impact sur le changement climatique, alors je pense que nous aurons la bonne posture. Toutes nos estimations de croissance ont été légèrement revues à la baisse. Concernant les marchés émergents, c'est pour la Russie et le Brésil que nous sommes les plus inquiets ". Diriez-vous que cette économie est fragile, sur le chemin de la reprise ou qu'elle se renforce progressivement ? Pour le président de la BM, elle est juste décevante. " Les pays à marché émergent sont dans une position très différente que celle dans laquelle ils se trouvaient à la fin des années 1990 ou 1980. Les banques centrales sont indépendantes, il y a plus de flexibilité fiscale, il y a plus de protections en place. Malgré cela, nous nous attendons à ce que les marchés émergents qui ont vraiment été la locomotive de l'économie mondiale entre 2008 et 2014 aient une croissance plus faible cette année. Et comme les prix des matières premières vont sans doute rester bas pendant un certain temps, nous voyons que le ralentissement va continuer au moins l'année prochaine ".