La guérilla des Farc et le gouvernement colombien ont signé mardi un accord inédit sur la mise en place d'un système intégral de réparation et de justice en faveur des victimes du conflit, marquant un grand pas vers la paix après plus d'un demi-siècle de conflit. Conformément à notre engagement de placer les victimes au centre de l'accord (...) le gouvernement et les Farc ont accepté de mettre en place un système intégral de vérité, de justice, de réparation et de non-répétition des violences, selon une déclaration conjointe lue devant la presse à La Havane, où se tiennent des pourparlers de paix depuis fin 2012. Cet accord, qui vient parachever un an et demi de discussions, définit notamment les procédures qui seront appliquées aux auteurs de crimes contre l'humanité dans le cadre d'une juridiction spéciale. Celle-ci pourra prononcer des peines aménagées (travaux d'intérêt général, etc...) pour ceux qui avouent leurs crimes. Une amnistie sera également appliquée aux ex-combattants qui ne seront pas poursuivis pour des crimes graves tels qu'enlèvement, violences sexuelles ou exécutions sommaires. L'accord a été signé par les chefs des équipes de négociations Ivan Marquez (Farc) et Humberto de la Calle (gouvernement), en présence d'un groupe de victimes du conflit qui a fait le déplacement à La Havane. Jineth Bedoya, une journaliste enlevée et violée par des paramilitaires en 2000, a notamment prévenu les parties que les victimes seraient attentives à la stricte application des accords signés. Il s'agit du premier accord de paix en Colombie qui n'a pas abouti à une amnistie générale, s'est félicité devant la presse le numéro deux des Farc Ivan Marquez, alors que la rébellion marxiste et le gouvernement en sont à leur quatrième tentative de paix.
Jamais si près d'un accord A Bogota, le président colombien Juan Manuel Santos a salué cette annonce peu après la cérémonie de signature. Jamais nous n'avons été si près d'un accord définitif !, s'est-il réjoui sur son compte Twitter. Il n'est pas rhétorique d'affirmer que l'annonce de l'accord sur la reconnaissance des droits des victimes annonce une possible fin du conflit et l'avènement d'une paix durable, a abondé l'ex-vice-président Humberto de la Calle. Le 23 septembre M. Santos s'était engagé à signer la paix dans les six mois avec le chef suprême de la plus vieille rébellion du pays, Timoleon Jimenez, alias Timochenko. Le conflit colombien, qui au fil des décennies a impliqué guérillas d'extrême gauche, paramilitaires d'extrême droite, forces armées et narco-trafiquants, a fait au moins 220 000 morts, des dizaines de milliers de disparus et six millions de déplacés. Tenus sans cessez-le feu sous la médiation de Cuba et de la Norvège, les pourparlers de La Havane ont déjà abouti à des accords partiels sur des points importants : réforme rurale, lutte anti-drogue et participation des ex-guérilleros à la vie politique. Après le volet victimes, restent à aborder le mode de ratification d'un éventuel accord de paix final et les modalités de fin du conflit. Outre les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, de 7 à 8 000 combattants), le pays compte un autre mouvement de guérilla, l'Armée de libération nationale (ELN, 1 500 combattants), engagée depuis janvier 2014 dans un dialogue exploratoire en vue de négociations de paix avec le gouvernement.