Les cours du pétrole se sont nettement repris jeudi à New York, portés par l'optimisme revenu à la Bourse et un mouvement de reprise technique après avoir abandonné plus de 28% depuis le début de l'année. Le cours du baril de light sweet crude (WTI) pour livraison en mars, dont c'était le premier jour d'utilisation comme contrat de référence, a gagné 1,18 dollar à 29,53 dollars sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), soit une progression de 4,16%. Cette hausse a bénéficié en outre d'un effet d'optique, car le contrat de mars avait débuté la séance 1,80 dollar au-dessus du cours de clôture la veille de celui de février, qui faisait référence jusqu'alors. A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en mars a fini en hausse de 1,37 dollar à 29,25 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE), redevenant moins cher que la référence américaine. Reste que les cours de référence ont échoué, en dépit de quelques tentatives, à terminer la séance au-dessus du seuil psychologique des 30 dollars, qu'ils avaient franchi à la baisse en clôture vendredi dernier pour la première fois depuis 2003. Il s'agit surtout d'un mouvement lié à la prise de bénéfices de la part de ceux qui avaient parié sur la baisse des cours, a déclaré Gene McGillian, de Tradition Energy, notant que le marché était allé trop loin et trop vite à la baisse, créant les conditions d'un rebond. Par ailleurs, l'optimisme né de la reprise des Bourses européennes et américaine, à la suite d'un discours jugé encourageant de la Banque centrale européenne (BCE), a donné des raisons aux investisseurs de se remonter un peu le moral. En revanche, les chiffres hebdomadaires du ministère américain de l'énergie sur l'état des stocks aux Etats-Unis n'ont pas apporté beaucoup de raisons de se réjouir: les stocks de brut et d'essence ont fortement augmenté et la production nationale a encore un peu progressé, seuls les stocks de produits distillés affichant une baisse inattendue, à la faveur d'un coup de froid qui a sollicité les chaudières. De quoi faire dire à M. McGillian que la remontée de jeudi n'est qu'une correction de court terme. Tant que les prix ne prendront pas en compte le ralentissement de la croissance mondiale, surtout en Chine et dans les pays émergents, et qu'on ne verra pas de signe d'une réduction des excédents d'offre, le marché aura encore une marge de baisse, a-t-il assuré.
Hausse des cours probable Le président de Saudi Aramco, la plus grande compagnie pétrolière du monde, a estimé jeudi que les prix du pétrole devraient remonter d'ici à la fin de l'année, dans un marché pétrolier qui commencera inévitablement à se redresser. Je pense que le marché est allé trop loin à la baisse et qu'il est inévitable qu'il commence à se redresser, a déclaré Khalid al-Falih, le président de la compagnie pétrolière nationale saoudienne lors d'un débat sur l'énergie organisé dans le cadre du Forum économique mondial de Davos. Les prix du pétrole sont irrationnels, a-t-il estimé. Ils ont perdu trois quarts de leur valeur depuis mi-2014 et évoluent actuellement sous la barre de 30 dollars le baril en raison d'une offre surabondante face à une demande manquant de vigueur, pénalisée notamment par le ralentissement économique de la Chine. Où serons-nous d'ici à la fin de l'année? Je ne sais pas mais je parie que (les prix) seront certainement plus élevés qu'aujourd'hui, a poursuivi le dirigeant. Malgré cette faiblesse des cours et des dissensions internes, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), qui pompe environ un tiers du brut mondial, n'entend pas diminuer sa production, afin de défendre ses parts de marché face aux hydrocarbures de schiste américains. L'Arabie saoudite, membre le plus influent du cartel, a en effet les moyens de résister à cet environnent difficile pour les pays producteurs, a fait remarquer Khalid al-Falih. Si les prix demeurent bas, nous serons capables de résister pendant très longtemps. Nous ne l'espérons pas, mais nous y sommes préparés, a-t-il dit, rappelant que son pays affichait les coûts de production les plus bas de la planète. Pour autant il n'a donné aucune indication que son pays soit prêt à limiter sa production pour aider les cours à se redresser: Si les prix demeurent bas, nous serons capables de résister pendant très longtemps. Nous ne l'espérons pas, mais nous y sommes préparés, a-t-il dit, rappelant que son pays affichait les coûts de production les plus bas de la planète. Pour sa part, le patron du géant pétrolier français Total Patrick Pouyanné a estimé jeudi qu'un rebond des prix du pétrole pourrait s'amorcer au deuxième semestre 2016, quand les marchés prendront en compte l'impact sur la production de la chute des cours. A la deuxième moitié 2016, on va commencer à voir l'impact d'un prix bas sur la production, notamment la production américaine. Je pense qu'à ce moment-là les marchés vont réagir, a déclaré le P-DG de Total sur la radio BFM Business en direct du Forum des leaders économiques de Davos (Suisse) où l'ambiance est selon lui un peu morose en raison de la conjoncture. En 2016 je ne pense pas que l'on va rester bas. Maitenant je peux me tromper. Normalement, il y aura quelques fondamentaux dans le marché, notamment côté offre, qui devraient inciter le marché à être plus raisonnable, a ajouté M. Pouyanné. Plus les cycles sont violents vers le bas plus le pétrole rebondira, a-t-il prédit. Il s'est dit pas inquiet du retour de l'Iran sur le marché de la production pétrolière: Je ne suis pas sûr que l'Iran puisse augmenter sa production tout d'un coup comme ça (...) Il faudra du temps pour investir en Iran. Le pétrole c'est lent. Nous avons les meilleurs résultats parmi les majors pétrolières les plus résistantes, a-t-il assuré. Les résultats de Total se sont repliés de plus de 20% en 2015, avait-il déclaré auparavant. Il a assuré que Total ne se retirerait pas de la Russie, au contraire, et que Total ne jouerait aucun rôle dans la restructuration du spécialiste des tubes sans soudure Vallourec: Total n'a pas vocation à intervenir dans l'ensemble de la chaîne parapétrolière française.
Baisse en Asie En Asie, les cours du pétrole repartaient à la baisse jeudi dans un marché qui reste affecté par les inquiétudes sur l'excès d'offre. Depuis le début de l'année, l'or noir ne cesse de dégringoler, les deux principaux contrats perdant environ 25%. Après avoir commencé la journée en hausse sous l'effet d'achats à bon compte, le pétrole a recommencé à descendre dans l'après-midi. Vers 06H30 GMT, le baril de light sweet crude (WTI) pour livraison en mars et dont c'était le premier jour comme contrat de référence, perdait 15 cents, à 28,20 dollars dans les échanges électroniques en Asie. Le Brent, référence européenne du brut, pour livraison en mars, cédait quant à lui 11 cents à 27,77 dollars. Le WTI pour livraison en février avait dévissé mercredi à 26,19 dollars à New York avant de se reprendre un peu. Les investisseurs restent moroses, persuadés que les données hebdomadaires sur l'état des stocks américains qui seront publiées jeudi ne leur donneront aucune raison d'être optimistes. Ils s'attendent en effet, selon les analystes, à une nouvelle augmentation des stocks. Depuis mi-2014, les cours se sont effondrés d'environ 75%, frappés par une conjoncture adverse: surabondance de l'offre, demande faiblissante et ralentissement de l'économie mondiale, et en particulier de l'économie chinoise, premier consommateur d'énergie. Les fondamentaux sont l'élément essentiel, a commenté Daniel Ang, analyste chez Phillip Futures, en référence à l'excès d'offre. De fait, l'Agence internationale de l'énergie a prédit que le marché se noierait dans un surplus d'offre. Les cours pourraient continuer de reculer cette année car l'offre devrait rester surabondante, en raison de l'arrivée sur le marché de la production iranienne après la levée des sanctions contre Téhéran, a-t-elle jugé. Certains analystes estiment cependant que les cours approchent leur plancher. Je pense que la tendance baissière va se poursuivre pendant le premier semestre mais je pense qu'on a plus ou moins touché le fond, a ajouté M. Ang. Je doute que les cours passent en dessous des 20 dollars, a-t-il poursuivi, tablant sur des niveaux de 24 ou 25 dollars.
Forte hausse des stocks de brut Les stocks de pétrole brut ont augmenté plus que prévu la semaine dernière aux Etats-Unis, selon des chiffres publiés jeudi par le ministère américain de l'Energie (DoE), qui ont toutefois calmé la déprime en signalant une baisse de ceux de fioul de chauffage. Lors de la semaine achevée le 15 janvier, les réserves commerciales de brut ont monté de 4 millions de barils pour atteindre 486,5 millions de barils, alors que les experts interrogés par l'agence Bloomberg avaient tablé sur une progression de juste 2,2 millions de barils. Le chiffre officiel est toutefois légèrement moins mauvais, dans un contexte de chute générale des cours liée aux excédents, que les estimations de la fédération professionnelle American Petroleum Institute (API), qui avait annoncé mercredi un gonflement de 4,6 millions de barils. Les réserves de brut restent "proches de niveaux pas vus à cette période de l'année depuis au moins 80 ans", comme l'a encore une fois souligné le DoE. Elles enregistrent une progression de 22,3% par rapport à la même période de l'an dernier. Les réserves d'essence ont une nouvelle fois fortement augmenté, à hauteur de 4,6 millions de barils, enregistrant une hausse bien supérieure à la progression de 1,9 million de barils prévue par les experts de Bloomberg, mais tout juste inférieure à celle prédite par l'API (+4,7 millions). Elles sont "bien au-dessus" de la limite supérieure de la fourchette moyenne en cette époque de l'année, et s'affichent en hausse de 1,7% par rapport à la même époque en 2015. Une bonne surprise a été fournie par les stocks de produits distillés (diesel, fioul de chauffage, kérosène, etc.), qui ont enregistré une baisse d'un million de barils d'une semaine sur l'autre, alors que les experts de Bloomberg attendaient une progression de 800 000 barils et l'API de 1,5 million de barils. Malgré un coup de froid aux Etats-Unis qui a sollicité les chaudières après un début d'hiver exceptionnellement doux, ils progressent toutefois de 20,5% par rapport à l'an dernier et restent proches de la limite supérieure de la fourchette moyenne à cette période de l'année.
Production en hausse Très surveillée par les analystes, la production américaine a de nouveau légèrement progressé, à hauteur de 8 000 barils par jour (bj), à 9,235 millions de bj. Egalement suivies de près, les réserves du terminal pétrolier de Cushing (Oklahoma, sud), qui servent de référence au pétrole échangé à New York, ont encore un peu progressé à hauteur de 200 000 barils à 64,2 millions, alors que l'API avait tablé sur une progression moitié moins forte. Toutes catégories confondues, les stocks pétroliers américains ont progressé de 6,6 millions de barils. Du côté de la demande, sur les quatre dernières semaines, les Etats-Unis ont consommé en moyenne 19,3 mbj de produits pétroliers, soit 1,8% de moins que l'année précédente à la même époque. Durant la même période, la demande de produits distillés a chuté de 15,4% et celle d'essence a baissé de 2,8%, dans les deux cas sur un an. Les raffineries américaines ont encore un peu ralenti la cadence, fonctionnant à 90,6% de leurs capacités contre 91,2% la semaine précédente.