A l'issue d'une semaine jusque-là catastrophique, les cours du pétrole ont très fortement rebondi vendredi, sur fond de nouvelles rumeurs sur une baisse de production dans l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et de signes encourageants sur une résorption aux Etats-Unis. Le cours du baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en mars, qui avait perdu plus de quatre dollars lors des quatre précédentes séances et était tombé au plus bas depuis mai 2003, s'est repris de 3,23 dollars à 29,44 dollars sur le New York Mercantile Exchange (Nymex). A Londres, le prix du baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en avril a monté de 3,30 dollars à 33,36 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE). "Des nouvelles venues des Emirats arabes unis ont ravivé les rumeurs sur un éventuel accord et relancé le marché", a mis en avant Bart Melek, de TD Securities. Selon des propos rapportés par le Wall Street Journal, le ministre émirati de l'Energie, Souhaïl al Mazrouei, a déclaré que "tout le monde était prêt à coopérer" au sein de l'Opep, laissant ainsi croire à une réduction concertée de l'offre au sein du cartel. Le marché espère de longue date que l'Opep se montre moins inflexible, alors que l'organisation a encore plombé fin 2015 les cours en s'abstenant de se fixer des objectifs de production, et ainsi accablé un marché déjà déprimé par le niveau élevé de l'offre, que ce soit au sein du cartel, aux Etats-Unis ou en Russie. "Le fait que ce soit les Emirats qui tiennent ces propos et non un pays comme le Venezuela, cela leur donne du poids", a jugé Phil Flynn, de Price Futures Group. "Il y a seulement un mois, les Emirats avaient dit qu'ils ne feraient aucune concession." Les Emirats arabes unis sont proches de l'Arabie saoudite, membre dominant de l'Opep, par contraste avec d'autres membres marginalisés par l'influence de Ryad, comme le Venezuela, plusieurs pays africains, et, surtout, l'Iran, qui compte démultiplier sa production de pétrole à la suite de la levée de sanctions occidentales contre Téhéran.
Réactions "agressives" Malgré les rumeurs relancées par les Emirats, beaucoup d'observateurs restent prudents car les cours ont déjà essayé plusieurs rebonds depuis la fin janvier sur fond de rumeurs quant à un accord de ce type entre la Russie et l'Opep, mais faute d'éléments concrets, ces tentatives ont systématiquement avorté. "Depuis quelques semaines, le marché commence à avoir l'expérience de ce genre de jeux", a souligné Tim Evans, de Citi. "Cela encourage d'un côté les investisseurs à être sceptiques quant à la concrétisation d'une baisse de la production et, de l'autre, à réagir de façon plus agressive à chaque gros titre." Toutefois, le marché a pu bénéficier d'un autre soutien que de simples spéculations vendredi, avec une forte baisse hebdomadaire du nombre de puits de pétrole en activité aux Etats-Unis, qui, à 439 unités, est à son plus bas depuis 2010. "La production devrait finir par baisser", a jugé M. Melek. "... Et si la production américaine baisse, l'Arabie saoudite et les autres membres de l'Opep seront probablement plus enclins à réduire la leur." Pour l'heure, la production de pétrole reste néanmoins élevée aux Etats-Unis, à bien plus de neuf millions de barils par jour (mbj), comme l'ont encore montré, malgré un léger déclin, les chiffres hebdomadaires publiés mercredi par le département américain de l'Energie. "Aux Etats-Unis, la surabondance atteint un niveau homérique et cela ne concerne pas que le pétrole brut", a conclu Matt Smith, de Clipper Data. "On voit désormais cette surabondance atteindre le marché de l'essence."
Regain d'optimisme En Asie, les cours du pétrole rebondissaient sous l'effet d'achats à bon compte et de nouvelles spéculations sur une éventuelle volonté de l'Opep de réduire sa production, après être tombés à des plus bas de presque 13 ans. Dans les échanges électroniques matinaux, le baril de light sweet crude (WTI) pour livraison en mars prenait 1,47 dollar, à 27,68 dollars, vers 04h00 GMT. Le baril de Brent de la mer du Nord, la référence européenne du brut, pour livraison en avril, gagnait quant à lui 1,68 dollar, à 31,74 dollars. Le Wall Street Journal, qui cite le ministre émirati de l'Energie, Souhail al-Mazrouei rapporte que l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) serait prête à se concerter avec d'autres producteurs pour tenter de limiter les niveaux de productions. Les analystes doutent toutefois que ces spéculations puissent soutenir durablement les cours alors que le marché est frappé par une conjoncture adverse, surabondance des cours et morosité de la demande. Après les nouveaux plus bas de jeudi, on assiste à une chasse aux bonnes affaires, a déclaré Bernard Aw, analyse chez IG Markets à Singapour. Les commentaires émiratis n'auront pas d'influence à long terme sur les cours tant que des membres clés du cartel comme l'Arabie saoudite et l'Irak ne s'engageront pas clairement à réduire la production d'or noir, a-t-il ajouté. Sans l'Arabie saoudite et l'Irak, il n'y a pas grand-chose que les autres puissent faire. En fait, a jugé Michael McCarthy, analyste chez CMC Markets en Australie, tous les pays producteurs du monde pensent que les autres pays producteurs devraient réduire leur production. Mais à défaut d'indication de la part d'un grand producteur qu'il est prêt à réduire sa propre production, je ne prendrais pas trop ces commentaires au sérieux, a-t-il dit. La dégringolade des cours pèse très lourd sur les finances des pays producteurs plus pauvres comme le Venezuela et le Nigeria. L'Opep s'est refusé pour l'instant à limiter la production pour conserver ses parts de marché face à la concurrence du pétrole de schiste américain.
Stabilisation de l'offre Le ministre émirati de l'Energie, dont le pays est l'un des principaux membres de l'Opep, a déclaré vendredi s'attendre à "une stabilisation" de l'offre sur le marché, déprimé par la dégringolade des prix. "Le marché va obliger tous (les producteurs), non à réduire mais à stabiliser leurs niveaux de production", a déclaré Souhail al-Mazrouei sur la chaîne de télévision Sky News Arabia, basée à Abou Dhabi, la capitale des Emirats arabes unis. Selon lui, la demande mondiale sur le brut devrait augmenter cette année de 1,3 million de barils par jour (mbj), et "il est possible qu'il y ait une baisse de 500 000 barils/jour (bj) (...) dans l'offre des pays non-membres de l'Opep". Il en résulte une demande additionnelle de 1,8 mbj qui "ne trouvera pas une offre équivalente car plusieurs pays ont suspendu les investissements" nécessaires pour augmenter leur capacité de production, a expliqué le ministre émirati. Il se veut "optimiste sur un retour à l'équilibre" sur le marché, qui repoussera les prix à la hausse, sans évoquer l'action qu'entreprendrait, à cette fin, l'Opep ou encore son pays. Des propos attribués au ministre émirati de l'Energie dans plusieurs titres de presse et selon lesquels l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) était en mesure d'abaisser sa production ont alimenté les spéculations sur les marchés. Après avoir dégringolé toute la semaine pour finir au plus bas depuis 2003, le pétrole se reprenait nettement vendredi à l'ouverture du marché new-yorkais. L'Opep avait plombé fin 2015 les cours en s'abstenant de se fixer des objectifs de production, ce qui avait accablé un marché déjà déprimé par le niveau élevé de l'offre, que ce soit au sein du cartel, aux Etats-Unis ou en Russie. Les cours ont déjà tenté plusieurs rebonds depuis la fin janvier sur fond de rumeurs quant à un accord entre la Russie et l'Opep, mais faute d'éléments concrets, ces tentatives ont systématiquement avorté.