La séance parlementaire prévue, hier, pour élire un nouveau président libanais a été reportée, pour la dixième fois. L'ambassadeur des Etats-Unis à l'ONU, Zalmay Khalilzad, a invité vendredi le Conseil de sécurité à faire pression sur ceux qui empêchent la tenue de l'élection présidentielle au Liban. "Nous pensons que le Conseil devrait être prêt à envisager des mesures additionnelles pour inciter ceux qui bloquent l'élection d'un président à changer de position", a déclaré M. Khalilzad lors de consultations au Conseil. Le président du Parlement, Nabih Berri, un des ténors de l'opposition soutenue, "a décidé de reporter la séance au 29 décembre", selon un communiqué publié vendredi soir par son bureau de presse. Il s'agit du dixième report en moins de trois mois de l'élection présidentielle au Liban, du fait de divergences persistantes entre la majorité antisyrienne et l'opposition. Ce report n'est pas une surprise, et l'hypothèse d'une issue au blocage d'ici la fin de l'année laisse sceptique. "Il est improbable que l'élection se tienne avant la fin de l'année", avait estimé dans la journée un député de la majorité antisyrienne, Elias Atallah. "Le dialogue est au point mort et il n'y aucune entente politique" entre les deux camps, a lui-même déclaré, peu avant l'annonce du report, le chrétien Michel Aoun, un autre leader de l'opposition. Le Liban, qui traverse sa plus grave crise politique depuis la fin de la guerre civile (1975-90), est sans président depuis la fin du mandat du prosyrien Emile Lahoud le 23 novembre. Cette crise a éclaté après la démission du gouvernement de Fouad Siniora, en novembre 2006, des ministres de l'opposition, qui réclame plus de pouvoir. Le chef de l'armée Michel Sleimane fait figure de candidat consensuel aux yeux de deux camps. Mais les parties n'arrivent pas à se mettre d'accord sur le mécanisme d'un amendement de la Constitution, nécessaire à son élection. L'opposition réclame en outre de discuter avant l'élection de la composition du futur gouvernement, ce que refuse la majorité. Le blocage est interprété comme le prolongement du bras de fer entre l'Occident, d'une part, et la Syrie et l'Iran, d'autre part. La majorité accuse l'opposition d'être sous la coupe de Damas, alors que celle-ci reproche au gouvernement d'être inféodé à Washington. Le président français Nicolas Sarkozy a déjà contacté à deux reprises son homologue syrien Bachar al-Assad au sujet de la présidentielle libanaise. Selon Paris, M. Sarkozy avait déclaré au président syrien qu'il "entendait" que la date du 21 décembre "soit respectée". Jeudi, le président américain George W. Bush a, lui, clairement signalé son soutien à la majorité, l'appelant à contourner les alliés libanais de la Syrie, et à leur tête le Hezbollah chiite, classé comme organisation terroriste par Washington. Le Hezbollah a rétorqué vendredi dans un communiqué que M. Bush "semait à nouveau la discorde entre les Libanais en refusant le consensus et en utilisant ses alliés au Liban aux dépens de la stabilité du pays". La session ordinaire en cours du Parlement s'achève le 31 décembre. La prochaine session sera ouverte à la mi-mars 2008. Le gouvernement actuel peut convoquer une session parlementaire extraordinaire pour amender la Constitution, mais comme l'opposition ne reconnaît pas sa légitimité, cette session pourrait ne pas voir le jour, ce qui repousserait la séance de l'élection jusqu'à la mi-mars. L'amendement est une condition sine qua non pour l'élection du chef de l'armée car, en vertu de la Constitution, il est interdit à un haut fonctionnaire de devenir chef de l'Etat, sauf s'il démissionne de son poste deux ans avant l'élection.