Les pays du G20 se sont mis d'accord à Shanghai pour recourir à des politiques de relance monétaire et budgétaire afin de conforter une économie mondiale en panne, alors que s'intensifient les risques géopolitiques, selon un projet de communiqué diffusé par Bloomberg News. Les argentiers des grandes puissances, réunis vendredi et samedi, se sont entendus pour utiliser tous les outils --politique monétaire, relance budgétaire, réformes structurelles--, à la fois individuellement et collectivement, selon l'ébauche du communiqué final du G20-Finances, rapportée par l'agence de presse. Le texte insiste notamment sur la nécessit é pour les grandes banques centrales de poursuivre voire d'accroître leurs politiques déjà ultra-accommodantes. Les politiques monétaires continueront de soutenir l'activité et de garantir la stabilité des prix, même si elles ne peuvent à elles seules conduire à une croissance durable, souligne ce communiqué, dont la version finale était dévoil ée samedi soir. La politique budgétaire, qui consiste pour les Etats à gonfler leurs dépenses publiques en vue de conforter l'activité, devra être mise en uvre de façon flexible, ajoute l'ébauche du communiqué. Le G20-Finances s'était cependant ouvert vendredi sur de nettes divergences entre Etats membres, après une violente charge du ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble contre les politiques de relance. Les relances budgétaires ont perdu de leur efficacité et les politiques monétaires ultraaccommodantes pourraient devenir contreproductives au vu de leurs potentiels effets pervers, avait-il martelé. Les grandes puissances devraient plutôt se concentrer sur leurs véritables tâches, les réformes structurelles, avait affirmé M. Schäuble, avant de railler un modèle de croissance fondé sur l'endettement nourrissant des entreprises zombies. A l'inverse, plusieurs membres du G20, Etats-Unis et Union européenne (UE) en tête, avaient élevé la voix pour défendre de nouveaux assouplissements monétaires et réclamer que les Etats en ayant la possibilit é dépensent davantage pour appuyer l'économie mondiale. MARGES DE MANUVRE Les banquiers centraux ont indiqué (à Shanghai) qu'ils étaient prêts à en faire plus s'il le fallait, même si la politique monétaire ne peut pas tout résoudre, a confirmé samedi le ministre français des Finances Michel Sapin. Certes, personne ne demande un plan de relance budg étaire concerté au niveau mondial, contrairement à ce qui a pu être décidé en 2009 en pleine crise financière, a souligné M. Sapin. Pour autant, nous demandons à ce que les pays dans une situation plus favorable en profitent pour agir plus vigoureusement, a-t-il insisté. Washington fait pression depuis plusieurs mois pour que les Etats qui disposent d'excédents les utilisent pour soutenir la demande --allusion à peine voilée à l'Allemagne. Il peut y avoir des réticences historiques et culturelles de certains pays à laisser filer les dépenses publiques, a reconnu Michel Sapin, dans une évocation transparente de l'orthodoxie budgétaire de Berlin. Mais nous sommes dans une situation qui rend nécessaire l'utilisation de toutes les marges de manuvre quand elles existent, a-t-il insisté. De fait, les signaux d'alarme sont légion, de la dégringolade des cours des matières premières aux turbulences boursières, tandis que s'essoufflent les moteurs de la croissance planétaire. La magnitude de la volatilité des marchés ne reflète pas les fondamentaux de l'économie mondiale, tempère le texte du G20-Finances, tout en observant que la reprise économique (...) reste inégale et pré- caire. Le projet de communiqué énumère également les risques géopolitiques potentiellement déstabilisateurs, pointant l'afflux de migrants en Europe et le potentiel choc d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union europ éenne. En revanche, selon Bloomberg, le G20 ne cible pas explicitement les interventions de la Chine sur le yuan --objet d'une violente dépréciation l'été dernier puis à nouveau début 2016, ce qui avait relancé la crainte d'une guerre des devises. Le texte appelle néanmoins les grandes puissances à se consulter étroitement sur l'état des marchés des changes, théâtre de vives fluctuations, et réitère son appel à éviter des dévaluations compétitives. CHOC D'UN EVENTUEL BREXIT Les grands argentiers du G20 ont appelé, à l'issue d'une réunion de deux jours à Shanghai, à utiliser tous les outils pour soutenir l'économie, alors que la reprise mondiale apparaît iné- gale et en-deçà des ambitions. Le communiqué publié par les ministres des Finances des pays les plus riches de la planète cite par ailleurs parmi les risques pesant sur la croissance, le choc d'une éventuelle sortie du Royaume-Uni de l'Union europ éenne. Cette mention, qui est faite dès le premier paragraphe du texte, souligne l'importance pour le G20 de cette question, qui sera tranchée par référendum le 23 juin. Les risques et vulnérabilit és ont augmenté, soulignent les grands argentiers, citant outre le Brexit, la volatilité des mouvements de capitaux, la chute des cours des matières premiè- res, les tensions géopolitiques accrues et l'afflux de migrants dans certains régions. Il y a des inquiétudes grandissantes sur les perspectives économiques mondiales, même si les récentes turbulences des marchés ne reflè- tent pas les fondamentaux de l'économie mondiale. Nous devons faire plus pour atteindre nos objectifs communs d'une croissance forte et durable, poursuivent les ministres. Nous utiliserons tous les outils - moné- taire, budgétaire et structurel - individuellement et collectivement pour préserver et renforcer la reprise. Le texte insiste notamment sur la nécessité pour les grandes banques centrales de poursuivre leurs politiques déjà ultra-accommodantes. Les politiques monétaires continueront de soutenir l'activité et de garantir la stabilité des prix, mais elles ne peuvent à elles seules conduire à une croissance durable, souligne le communiqué. Parallèlement, la politique budgétaire, qui consiste pour les Etats à gonfler leurs dépenses publiques en vue de conforter l'activité, devra être mise en oeuvre de façon flexible. Enfin, nous réaffirmons le rôle de politiques macro-économiques structurelles pour étayer nos efforts, ajoute le document. FINANCEMENT DU TERRORISME Les ministres des Finances ont exhorté la communauté internationale à agir plus vigoureusement pour combler les failles dans la lutte contre le financement du terrorisme. Nous sommes déterminés à combattre avec fermeté le financement du terrorisme, ont-ils assuré dans le communiqué publié à l'issue de leur réunion. Nous allons redoubler d'efforts (...) et accroître notre coopération et nos échanges d'informations. Nous appelons tous les pays à se joindre à nous dans ces efforts, notamment via une mise en uvre rapide des normes du Gafi, le Groupe d'action financière sur le blanchiment des capitaux, ont déclaré les grands argentiers des vingt plus grandes puissances mondiales. Ils demandent en outre à cette organisation internationale basée à Paris de renforcer son travail pour identifier et s'attaquer aux failles et lacunes qui demeurent dans le système financier, citant les sources et méthodes de financement (des terroristes) et l'utilisation de ces fonds. Le ministre français des Finances, Michel Sapin, a rappel é qu'il y avait urgence à agir. Chaque jour perdu, chaque minute perdue, ce sont des minutes et des jours qui peuvent être utilisés pour fomenter, préparer, voire mettre en oeuvre des attentats. Nous avons senti une forte volonté d'aller très vite pour renforcer les contrôles, a-t-il indiqu é à la presse. Ces déclarations du G20, qui ne sont toutefois pas assorties d'engagements précis, interviennent alors que le Gafi a récemment pointé une trop grande lenteur de l'action internationale, malgré des progrès. Depuis les attentats de Paris du 13 novembre, environ 50 pays ont pris des mesures concrètes sur le sujet, a indiqué cette semaine le secrétaire exécutif du Gafi, David Lewis. La menace de figurer sur la liste noire de cette structure, qui comprend notamment la Corée du Nord, l'Afghanistan et la Syrie, a fait bouger très rapidement les pays qui n'avaient pas les lois nécessaires ou qui ne les appliquaient pas. Mais M. Lewis a jugé que l'utilisation des instruments dont disposent les gouvernements était bien inférieure à ce qu'elle devrait être face à la menace que nous affrontons. Seulement 36 pays ont condamné une personne pour financement du terrorisme, et seulement 40 ont pris des sanctions ciblées, comme le gel de comptes bancaires, a-t-il noté. Ces mesures répondent à l'évolution de la menace terroriste liée à l'apparition de l'organisation Etat islamique (EI). Nous avons vu comment la nature et l'étendue du financement a changé avec l'émergence de l'EI, qui tire la plupart de ses revenus des territoires qu'il contrôle, notamment via l'exploitation du pétrole, a observé M. Lewis.