Le cours du baril de pétrole sont momentanément repassés jeudi au-dessus du seuil symbolique des 50 dollars pour la première fois de l'année, parachevant une remontée spectaculaire entamée en février mais dont la durée laisse sceptiques les analystes. Le Brent et le WTI, références européenne et américaine de l'or noir, ont dépassé l'un après l'autre ce plafond en cours de séance, même s'ils ont finalement clôturé en légère baisse, respectivement de 15 cents à 49,59 dollars et de huit cents à 49,48 dollars. Je pense que l'on ressent les 50 dollars comme un seuil où les investisseurs peuvent prendre leurs bénéfices et sortir du marché, a estimé Mike Lynch, de Strategic Energy & Economic Research. C'est peut-être un plafond provisoire. Après deux mois et demi qui ont vu les cours quasiment doubler de valeur, le seuil des 50 dollars a été dépassé à mesure que les investisseurs digéraient l'annonce, mercredi, d'une nette baisse hebdomadaire des réserves américaines de brut, qui a conforté la bonne disposition de marchés espérant une résorption de la surabondance mondiale. Les cours du brut n'avaient pas franchi cette barre depuis l'automne dernier et, surtout, avaient chuté jusqu'à 26-27 dollars, soit leur plus bas niveau depuis plus de 12 ans en janvier et février, ce qui rend leur rétablissement aussi remarquable qu'inattendu. Cela s'explique par des facteurs multiples, notamment des perturbations subies par des exportateurs importants et une réduction de la production chez les professionnels américains du pétrole de schiste, a souligné Hussein Sayed, de FXTM. La production du Canada, cinquième producteur mondial de brut, a été fortement réduite ces dernières semaines par les gigantesques incendies dans la province de l'Alberta (Ouest), le secteur pétrolier au Nigeria fait actuellement l'objet de sabotages et, il y a un peu plus d'un mois, une grève massive au Koweït avait fait chuter l'offre de ce pays du Golfe pendant trois jours. De façon plus structurelle, un certain nombre de professionnels américains du pétrole de schiste ont dû mettre la clé sous la porte, ou à tout le moins resserrer le robinet, leur production n'étant plus rentable au vu de la faiblesse des cours.
L'Opep en point de mire Un certain nombre d'observateurs ont accusé l'Arabie saoudite d'avoir délibérément fait chuter les cours depuis juin 2014, lorsque le baril s'échangeait au-delà des 100 dollars, en inondant les consommateurs de brut afin de conserver ses parts de marché. La dégringolade des cours pendant un an et demi avait été d'autant plus brutale que la consommation a donné des signes de faiblesse, à la santé morose persistante des pays occidentaux s'ajoutant le ralentissement de la locomotive chinoise. Désormais, pour les cours, le rebond remarquable de plus de 80% observé depuis février est peut-être exagéré, car les fondamentaux macroéconomiques n'ont pas changé d'autant, prévient Bernard Aw, d'IG Markets, dans une note à ses clients. Un éventuel renforcement du dollar, dans le cas d'un resserrement monétaire aux Etats-Unis, risque en outre de peser sur le marché pétrolier, libellé en monnaie américaine. Dans ce contexte, les investisseurs attendent la réunion semestrielle de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) le 2 juin à Vienne, bien qu'une décision d'y geler la production pour soutenir les cours semble très peu probable. L'Iran, dont le pétrole arrose de nouveau le marché mondial après la levée des sanctions, ne semble avoir aucune intention de plafonner ni sa production ni ses exportations. Sa rivalité avec l'Arabie saoudite, membre dominant du cartel, a d'ailleurs déjà largement contribué à l'échec de négociations sur un gel de la production à la mi-avril à Doha. Personne ne s'attend à ce que le sommet de l'Opep débouche sur quoi que ce soit, a reconnu James Williams, de WTRG Economics. A mon avis, la plus grande incertitude du marché pétrolier, à part les questions géopolitiques, c'est de savoir quelle sera vraiment la stratégie de Mohammed ben Salmane. Officiellement numéro trois du gouvernement saoudien, le vice-prince héritier est, à seulement trente ans, récemment devenu l'une des figures les plus puissantes du pays et a engagé un vaste plan pour réduire la dépendance du royaume à l'or noir, notamment en prévoyant d'introduire en Bourse une partie de la compagnie publique Aramco.
Pour la première fois depuis novembre Le baril de Brent est repassé jeudi pour la première fois depuis le 4 novembre au-dessus du seuil symbolique des 50 dollars, l'annonce d'une nette baisse des réserves américaines renforçant les espoirs d'un rééquilibrage du marché. Vers 03H30 GMT, le baril de Brent, référence européenne du brut, pour livraison en juillet, progressait de 33 cents à 50,07 dollars dans les échanges électroniques en Asie. Les cours du brut avaient rebondi après avoir enfoncé en février des plus bas de 13 ans, sous 30 dollars le baril, plombés par une offre largement excédentaire, que ne parvenaient plus à digérer des économies -notamment chinoise- en phase de ralentissement. On est cependant encore loin des cours de juin 2014, quand le baril d'or noir s'échangeait 100 dollars. Et les observateurs divergent quant à l'interprétation à donner de l'embellie connue par les cours ces dernières semaines, entre ceux qui l'attribuent à un véritable espoir de rééquilibrage du marché mondial et ceux qui n'y voient que l'effet temporaires des problèmes de production au Canada et au Nigeria, frappé par des sabotages. Le rebond remarquable de plus de 80% observé depuis février est peut-être exagéré, car les fondamentaux macroéconomiques n'ont pas changé d'autant, écrit dans une note à ses clients l'analyste d'IG Markets Bernard Aw.
Spéculation Cela laisse penser que les prix sont portés par la spéculation dans un rebond qui n'est peut-être pas durable. Mercredi, les cours avaient terminé au plus haut de l'année après l'annonce d'une nette baisse des réserves américaines, qui a conforté la bonne disposition des marchés dans l'espoir d'une résorption de la surabondance mondiale. Les réserves américaines de pétrole brut ont baissé de plus de quatre millions de barils la semaine dernière, selon des chiffres publiés mercredi par le département de l'Energie (DoE) des Etats-Unis. Mercredi, la Banque centrale du Canada a également affirmé que les gigantesques feux de forêts dans la région pétrolière de Fort McMurray en Alberta (ouest) pèserait lourdement à court terme sur l'activité économique. La production canadienne de pétrole a été réduite en moyenne de 1,2 million de barils de pétrole par jour sur les dernières semaines, un impact significatif pour une économie largement dépendante à l'énergie. Les informations sur les réserves américaines, qui s'ajoutent à l'annonce canadienne ont contribué à donner aux cours le coup de pouce qui manquait pour passer la barre des 50 dollars, a déclaré Alex Wijaya, analyste cge CMC Markets. Voilà deux semaines que les cours frôlaient sans la dépasser la barre des 50 dollars, le renforcement du dollar limitant la progression. Toute appréciation du dollar pénalise les achats de brut, libellés en billets verts et donc rendus plus onéreux pour les investisseurs munis d'autres devises.
Incertitudes en Afrique Depuis, la surabondance générale ne s'est pas franchement réduite de façon durable, même si des problèmes isolés comme les incendies canadiens l'ont provisoirement résorbée, face à l'intransigeance de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), menée par l'Arabie saoudite. Principale lueur d'espoir, la production américaine baisse de façon continue depuis plus de deux mois, comme l'ont encore montré mercredi des chiffres hebdomadaires du département de l'Energie (DoE) des Etats-Unis. Si on regarde la différence par rapport à la même époque de l'an dernier, c'est un écart de quelque 800 000 barils par jour (bj) de moins, a souligné James Williams, de WTRG Economics. Selon des informations annoncées jeudi, une nouvelle installation pétrolière du géant américain Chevron a été attaquée par un groupe rebelle dans le delta du Niger, où se concentre la production d'or noir du Nigeria, premier exportateur africain d'or noir, et qui est frappé depuis le début du mois par une vague renouvelée de sabotage. On commence finalement à observer une baisse des cargaisons au Nigeria, a écrit Matt Smith, de ClipperData, remarquant que, plus largement, les cargaisons en Afrique de l'Ouest s'affichent désormais en considérable baisse par rapport à la même époque de l'an dernier car elles souffrent aussi de problèmes au Ghana.
Nette baisse des stocks américains Les stocks de pétrole brut ont baissé plus que prévu la semaine dernière aux Etats-Unis, selon des chiffres publiés mercredi par le département américain de l'Energie (DoE). Lors de la semaine achevée le 20 mai, les réserves commerciales de brut ont reculé de 4,2 millions de barils à 537,1 millions de barils, alors que les experts interrogés par l'agence Bloomberg ne s'attendaient qu'à une baisse de deux millions de barils. Le déclin annoncé par le DoE est en revanche légèrement moins marqué que le recul de 5,1 millions de barils signalé la veille par la fédération professionnelle American Petroleum Institute (API) dans ses propres estimations parues mardi soir. A ce palier, les réserves américaines de brut s'affichent en hausse de 12,0% par rapport à la même période de 2015 et restent à des niveaux historiquement élevés à cette époque de l'année, comme l'a une nouvelle fois noté le DoE. A l'inverse des réserves de brut, les stocks d'essence ont augmenté de deux millions de barils, alors que les experts de Bloomberg prévoyaient un recul de 1,5 million de barils. C'est cependant moins que les estimations de l'API, qui tablait sur une avancée de 3,6 millions de barils. Ils restent bien au-dessus de la limite supérieure de la fourchette moyenne en cette époque de l'année, et montent de 8,8% par rapport à la même période en 2015. Les réserves de produits distillés (gazole, fioul de chauffage, kérosène, etc.) ont diminué de 1,3 million de barils, soit à peu près comme le recul d'un million prévu par les experts de Bloomberg mais nettement moins que la baisse de 2,9 millions annoncée par l'API. Elles progressent tout de même de 17,1% par rapport à l'an dernier et restent comme celles d'essence bien au-dessus de la limite supérieure de la fourchette moyenne à cette période de l'année.
Petite baisse à Cushing Dans chaque cas, les chiffres du DoE sont plus marqués que ceux publiés mardi par l'API, a souligné dans une note Tim Evans, de Citi. Très surveillée par les analystes, la production américaine a baissé pour la onzième semaine de suite, de 24 000 barils par jour (b/j) à 8,767 mbj. Les réserves du terminal pétrolier de Cushing (Oklahoma, sud), qui servent de référence au pétrole échangé à New York et sont proches de leur capacité maximum, se sont repliées de 700 000 barils à 67,6 millions. Toutes catégories confondues, les stocks pétroliers américains ont reculé de 900 000 barils. Du côté de la demande, sur les quatre dernières semaines, les Etats-Unis ont consommé en moyenne 20,4 mbj de produits pétroliers, soit 3,0% de plus que l'année précédente à la même époque. Durant la même période, la demande de produits distillés a baissé de 0,9% alors que celle d'essence a monté de 3,9%, dans les deux cas sur un an. Les raffineries américaines ont ralenti la cadence, fonctionnant à 89,7% de leurs capacités contre 90,5% la semaine précédente.