Le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Mohamed ElBaradei, a entamé vendredi une visite à Téhéran visant à obtenir des éclaircissements sur des points du programme nucléaire iranien controversé. Sa visite de deux jours intervient alors que la tension entre l'Iran et les Etats-Unis a monté d'un cran après un incident le 6 janvier dans le Golfe entre bâtiments de guerre américains et vedettes iraniennes. M. ElBaradei est arrivé dans la nuit à l'aéroport international Imam Khomeiny, accompagné de son numéro deux Olli Heinonen et de Vilmos Cserveny, directeur des relations extérieures et de la coordination politique de l'AIEA. Le sixième déplacement en Iran du responsable égyptien de l'AIEA depuis 2003 a pour objet, comme les précédents, d'éclaircir le caractère du programme nucléaire iranien. L'Iran affirme que son objectif est purement civil, alors que de nombreux pays, particulièrement les Occidentaux, craignent qu'il puisse être détourné à des fins militaires. Les Etats-Unis n'ont jamais exclu une option militaire pour contraindre Téhéran à suspendre son enrichissement d'uranium, comme l'exigent trois résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU. L'enrichissement d'uranium permet d'obtenir aussi bien le combustible pour une centrale nucléaire que la matière première d'une bombe atomique. La perspective d'une attaque a diminué avec la publication en décembre d'un rapport des services de renseignement américains selon lequel l'Iran a bien poursuivi un programme nucléaire militaire mais l'a suspendu en 2003. Néanmoins l'incident survenu entre bâtiments américains et vedettes iraniennes a ranimé le spectre d'un dérapage menant à un conflit militaire. Les Etats-Unis ont protesté formellement jeudi auprès de l'Iran à cause de manoeuvres “agressives” selon Washington des vedettes iraniennes. La République islamique a démenti qualifiant ce contrôle d'”ordinaire”. Le tout alors que le président américain George W. Bush effectue une visite de ses alliés arabes et israélien dans la région, afin de les assurer que les Etats-Unis feraient face à la “menace”, selon Washington, que représente l'Iran pour la stabilité au Proche-Orient. A Téhéran, M. ElBaradei espère “développer les voies et moyens d'améliorer et d'accélérer la mise en oeuvre des mesures de sauvegarde en Iran, afin de résoudre toutes les questions encore en suspens” sur ses activités nucléaires, a dit la porte-parole de l'AIEA avant le déplacement de M. ElBaradei. L'AIEA, qui avait épinglé l'Iran en novembre 2007 sur la poursuite des activités d'enrichissement de l'uranium, souhaite en savoir plus sur les expériences passées avec le plutonium et l'utilisation de centrifugeuses de type P1 et P2 pour produire de l'uranium enrichi. Elle s'interroge aussi toujours sur les particules d'uranium hautement enrichi, comme celui qui entre dans la fabrication de l'arme atomique, qui ont été trouvées par des inspecteurs de l'agence à l'Université technique de Téhéran. Initialement, le plan de travail établi entre Iraniens et responsables de l'AIEA en août 2007 devait apporter toutes les réponses à ces questions au plus tard en décembre 2007, mais le délai n'a pas été respecté. Après avoir ouvert le chapitre des discussions consacrées à d'éventuels problèmes de contamination en novembre, les experts des deux parties doivent dorénavant aborder “les activités qui pourraient avoir des applications militaires”, selon le plan de travail. Sans donner de noms, la porte-parole de l'AIEA a précisé que M. ElBaradei rencontrerait des personnalités de haut rang à Téhéran. De source diplomatique à Vienne, on estimait qu'elles pourraient inclure le président Mahmoud Ahmadinejad et guide suprême de la République islamique Ali Khamenei.