Une mauvaise nouvelle de plus pour le gouvernement: l'Insee a revu en forte baisse sa prévision de croissance pour 2016, qui devrait plafonner à 1,3%, malgré une probable accélération de l'activité en fin d'année. Dans sa note de conjoncture publiée jeudi, l'institut statistique a corrigé de 0,3 point sa prévision du mois de juin, qui tablait sur une croissance du produit intérieur brut (PIB) de 1,6%. Une conséquence du trou d'air subi par l'économie française au printemps, avec une contraction de l'activité de 0,1%. "La croissance a franchement calé", a reconnu lors d'une conférence de presse Vladimir Passeron, chef du département de la conjoncture de l'Insee, qui anticipe un rebond "modeste" au troisième trimestre (+0,2%) puis une accélération à l'automne (+0,4%)... néanmoins trop faible pour compenser le retard pris au printemps. Si le chiffre de 1,3% était confirmé, la France ferait à peine mieux cette année qu'en 2016 (1,2%), alors que les signaux économiques laissaient entrevoir une reprise enfin marquée huit ans après la crise des "subprime". Elle ferait en outre moins bien que la moyenne de la zone euro (1,6%), pour la troisième année consécutive. Plus grave peut-être encore: l'objectif de réduction du déficit public - fixé à 3,3% du PIB - pourrait se retrouver fragilisé, faute de recettes fiscales à la hauteur des attentes. Une situation de mauvais augure pour le gouvernement, à quelques mois de l'élection présidentielle. "Les prévisions de l'Insee ne remettent pas en cause ni notre objectif de déficit public pour 2016, ni notre prévision de croissance pour 2017", a ainsi réagi le ministre de l'Economie et des Finances Michel Sapin... sans préciser si l'objectif officiel de croissance pour 2016, fixé à 1,5% du PIB, allait être revu. Chômage en légère baisse Outre l'Insee, plusieurs organisations internationales ont corrigé à la baisse ces derniers mois leurs hypothèses de croissance pour l'Hexagone, à l'image de l'OCDE (1,3%) ou bien du FMI (1,2%). Bercy, jusqu'à présent, a refusé de leur emboîter le pas, assurant vouloir ne pas céder aux aléas. "La croissance française reste solide", a souligné jeudi M. Sapin, attribuant la révision de l'Insee aux "conséquences des grèves et des attentats terroristes". Une affirmation en partie confirmée par l'institut national de la statistique, qui a reconnu avoir "sous-estimé l'effet des grèves du printemps" dans ses dernières prévisions. Selon Vladimir Passeron, le mouvement d'opposition à la loi Travail aurait ainsi coûté 0,1 point de croissance à la France, en pénalisant à la fois les raffineries, le secteur de la chimie et celui des transports. Les attentats, quant à eux, auraient fait chuter la fréquentation des touristes étrangers. D'après l'Insee, la révision à la baisse du chiffre de croissance doit cependant beaucoup à un troisième facteur: la baisse des exportations, beaucoup moins dynamiques que prévu. En 2016, le commerce extérieur devrait ainsi coûter 0,4 point de croissance à la France, malgré un probable rebond au second semestre. "C'est le point noir de l'économie française", souligne Dorian Doucher, responsable de la synthèse conjoncturelle à l'Insee. Une situation paradoxale, alors que les entreprises ont vu leurs marges s'améliorer, avec les allègements fiscaux du Pacte de responsabilité. D'après l'Insee, l'économie française devrait néanmoins bénéficier de quelques facteurs positifs en 2016, qui viendront embellir un tableau globalement morose. Le pouvoir d'achat des ménages devrait ainsi augmenter de 1,8% sur l'ensemble de l'année, entraînant une hausse de 1,5% de la consommation des ménages. L'investissement des entreprises progresserait pour sa part de 3,6%, après 2,7% en 2015, favorisé par la baisse des taux d'intérêt. Même à 1,3%, "la croissance serait suffisante pour que le chômage baisse", souligne ainsi l'Insee, qui table sur 66 000 créations nettes d'emplois marchands au second semestre, contre 71 000 dans sa précédente note, et sur 117 000 sur l'année, contre 139 000. Le taux de chômage, dans ces conditions, devrait continuer à "baisser modérément" jusqu'à la fin de l'année, pour redescendre à 9,5% de la population active en métropole et 9,8% en intégrant l'Outre-mer, contre respectivement 9,6% et 9,9% l'an dernier.