Les syndicats ne peuvent plus assurer leur stabilité que dans les secteurs qui ne sont pas soumis à la précarité de l'emploi, c'est-à-dire dans la Fonction publique. Mais, comment le monde, y compris l'Algérie bien évidemment, en est-il arrivé là ? Il fut un temps où on choisissait l'entreprise dans laquelle on avait décidé de faire carrière et d'y prendre sa retraite. C'était une époque qui n'a plus cours dans le monde, avec l'intrusion généralisée du libéralisme, dont la stratégie de mise en œuvre avait commencé à être concoctée en 1973, à Washington, sous l'impulsion du grand banquier Rockefeller, qui avait réuni des représentants de pays riches, de firmes internationales et d'idéologues convaincus du libéralisme. Depuis cette généralisation, et la chute du modèle d'une économie administrée qui a disparu en même temps que fut détruit le mur de Berlin, la recherche de la productivité dans un contexte de concurrence exacerbée et de généralisation des réformes économiques à l'ensemble des pays du monde, les habitudes ont changé. Les factures alimentaires des pays en développement, surtout, ont fait des bonds importants, compte tenu que d'une part, tout est pratiquement importé, que les productions nationales ne sont pratiquement plus protégées, et que d'autre part, les prix à l'importation ne cessent d'augmenter, alors que le cycle de Doha de l'OMC avait pris l'engagement de lier les échanges commerciaux à la réduction de la pauvreté dans le monde. Or, la pauvreté augmente dans le monde. La réduction drastique du pouvoir d'achat traduit implicitement l'augmentation de la pauvreté ou alors de la prédisposition à être atteint par la pauvreté, le reste n'étant qu'un accord sur l'évaluation du seuil de pauvreté, dont la manipulation peut révéler que de larges couches de la population vivent en dessous du seuil de pauvreté ou encore le contraire. Les habitudes alimentaires changent en conséquence. Le désarroi entraînera pour les populations les risques de surendettement avec ce qui risque de ne plus devenir un tabou, à savoir la saisie des biens, les expulsions et la revalorisation de la profession de l'huissier de justice. Avant, il pouvait y avoir des plans de carrière pour un travailleur, pour un cadre au sein de la même entreprise. Avant, on enseignait dans les écoles de gestion qu'il faut savoir "attirer les ressources humaines, les conserver et les développer". Ce n'et plus le cas. Pudiquement, la précarité de l'emploi a reçu un nom, la mobilité, c'est à dire que sans cesse il faudrait être à la recherche d'un emploi après avoir perdu le sien. Même les syndicats ne peuvent plus "recruter " que dans la Fonction publique, là où le personnel est stable car soustrait aux risques de compression des personnels.