La Gambie va se retirer de la Cour pénale internationale (CPI), a annoncé mardi soir son ministre de l'Information Sheriff Bojang, après des décisions similaires de deux autres pays africains, le Burundi et l'Afrique du Sud. Dans une déclaration à la télévision nationale reprise sur les réseaux sociaux et diffusée sur YouTube, le ministre a accusé la CPI de persécution envers les Africains, en particulier leurs dirigeants, alors que selon lui au moins 30 pays occidentaux ont commis des crimes de guerre depuis la création de cette juridiction sans être inquiétés. Cette décision constitue un revers personnel pour la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, de nationalité gambienne, qui a été ministre de la Justice du président Yahya Jammeh. La Gambie a tenté en vain de convaincre la CPI de poursuivre les pays de l'Union européenne pour la mort de nombreux migrants africains en Méditerranée, a affirmé M. Bojang, précisant que son pays avait menacé de prendre des mesures s'il n'était pas entendu. A partir de ce jour, mardi 24 octobre, nous ne sommes plus membres de la CPI et avons entamé le processus prescrit par le statut fondateur pour nous en retirer, a-t-il indiqué. Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon et le président de l'Assemblée des Etats parties au traité fondateur de la CPI, le ministre sénégalais de la Justice Sidiki Kaba, ont appelé les pays qui critiquent le fonctionnement de cette juridiction à ne pas s'en retirer, mais à résoudre leurs différends par le dialogue avec les autres membres. Dans une interview accordée en mai à l'hebdomadaire Jeune Afrique, le président gambien s'était pourtant démarqué des critiques de ses pairs africains envers la CPI et sa procureure. Son job est difficile et, contrairement à ce que j'entends, la CPI ne vise pas spécialement l'Afrique, avait-il dit au sujet de Mme Bensouda. Les leaders africains râlent aujourd'hui. Mais pourquoi ont-ils signé [le traité ratifiant la CPI] en sachant qu'ils pouvaient en être victimes', avait souligné M. Jammeh. Que ceux qui veulent quitter la CPI s'en aillent, mais si les pays africains étaient moins faibles et plus unis, nous pourrions peser au sein de la Cour, avait-il estimé. La Gambie, petit Etat anglophone d'Afrique de l'Ouest de quelque deux millions d'habitants, enclavé dans le territoire du Sénégal, hormis sa façade atlantique, est dirigée d'une main de fer depuis 1994 par Yahya Jammeh. Ses détracteurs lui reprochent des décisions souvent unilatérales et non suivies d'effet et des déclarations fracassantes, notamment sur d'autres pays, les migrants ou l'homosexualité. Parvenu au pouvoir par un coup d'Etat sans effusion de sang, il a été élu en 1996, puis constamment réélu depuis. Il briguera un cinquième mandat en décembre. Son régime est accusé par des ONG et par le département d'Etat américain de disparitions forcées et de harcèlement de la presse et des défenseurs des droits humains, critiques que Yahya Jammeh rejette systématiquement.