Après le Burundi et l'Afrique du Sud, c'est au tour de la Gambie d'annoncer son retrait de la Cour pénale internationale (CPI). Plus qu'un départ, c'est un véritable désaveu personnel pour la procureure de la CPI, la Gambienne Fatou Bensouda, qui a été ministre de la Justice du président Yahya Jammeh. Ces trois départs actent le divorce entre les pays africains, particulièrement visés par la justice internationale, et la CPI et annoncent d'autres défections puisqu'on évoque le Kenya, l'Ouganda, ou encore la Namibie auxquels on prêterait les mêmes intentions. Les Africains et les Arabes restent les plus méfiants devant cette justice qu'ils qualifient de deux vitesses et l'historique pénal sélectif de cette Cour qui, selon eux, ne s'intéresse qu'à ce qui se passe sur le continent noir et ne poursuit que les dirigeants africains à l'image de l'Ouganda, du Congo, de la Centrafrique, du Soudan, du Kenya et de la Libye. Le ministre gambien Sheriff Bojang résume merveilleusement bien le sentiment de persécution vécu affirmant qu'«au moins 30 pays occidentaux ont commis des crimes de guerre odieux contre des Etats indépendants et souverains et leurs citoyens depuis la création de la CPI sans qu'aucun criminel de guerre occidental ne soit poursuivi». Il citera en exemple l'ex-Premier ministre britannique Tony Blair comme on peut aussi citer le président Bush pour l'invasion de l'Irak en 2003, les massacres des civils palestiniens par l'armée d'occupation israélienne, des Yéménites par les raids de la coalition arabe menée par l'Arabie saoudite. Les cas de figure d'une impunité sont nombreux et ont le don de cabrer les dirigeants du tiers monde devant cette Cour. Ont-ils pour autant raison de se retirer ? Si l'injustice qu'ils ressentent est conditionnée même par les pratiques sélectives de la CPI, cela ne les absout certainement pas des crimes de guerre commis sous leur règne. La Cour forte du Statut de Rome peut poursuivre l'examen des affaires en sa possession malgré la décision d'un pays de se retirer. Vue de l'extérieur, cette Cour concentre ses enquêtes uniquement sur le continent africain mais la réalité veut qu'elle s'intéresse au conflit en Ossétie du Sud entre la Géorgie et la Russie, mais aussi en Colombie, Afghanistan, Irak et Palestine. Pourtant aucun dirigeant occidental n'a jamais été inquiété malgré toutes les charges de crimes contre l'humanité retenues contre eux. Et si la CPI fait face à des accusations de «chasse raciale», pour sa défense elle ne peut agir que là où elle a compétence, soit de la propre initiative de la procureure dans un Etat membre, comme au Kenya, ou suite au renvoi d'une situation par un Etat membre comme au Darfour ou en Libye sous l'impulsion toujours des Américains. Alors la CPI est-elle clean ?