Les cours du pétrole ont terminé en baisse jeudi, la surabondance d'or noir revenant au centre des préoccupations des investisseurs et la politique américaine passant au second plan. Le baril de light sweet crude (WTI) a baissé de 61 cents à 44,66 dollars sur le contrat pour livraison en décembre au New York Mercantile Exchange (NyMex). A Londres, le prix du baril de Brent de la mer du Nord, a reculé de 52 cents à 45,84 dollars pour le contrat en livraison en janvier sur l'Intercontinental Exchange (ICE). Nous sommes sortis de la volatilité induite par l'élection de Donald Trump, a indiqué Bart Melek de TD Securities. Nous sommes toujours inquiets d'une possible absence de consensus de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) sur une réduction de la production, a-t-il ajouté. Les membres de l'Opep se sont mis formellement d'accord en septembre pour réduire leur production mais les 14 membres du cartel doivent encore procéder à la difficile répartition des quotas pays par pays pour finaliser cette décision le 30 novembre à Vienne. L'enjeu de cette réduction a encore été mis en exergue jeudi par l'Agence Internationale de l'Energie (AIE) qui a estimé qu'en son absence le marché restera excédentaire tout au long de l'année prochaine. L'agence basée à Paris a également relevé que les producteurs, qu'ils appartiennent ou non à l'Opep, ont ouvert à fond les robinets en octobre: l'offre mondiale de pétrole a augmenté de 800 000 barils par jour sur un mois comme sur un an. Depuis l'été 2014, les prix du brut sont déprimés par une surabondance de l'offre. Interrogations sur l'Iran Sur le plan américain, les investisseurs ont également jeté un second regard sur les stocks hebdomadaires publiés mercredi par le Département de l'Energie (DoE) mais alors en partie éclipsés par l'élection. Après leur fort rebond de la semaine précédente, les réserves commerciales de brut aux Etats-Unis ont encore progressé de 2,4 millions de barils lors de la semaine achevée le 4 novembre. La cadence des raffineries est plutôt élevée, les importations sont en baisse et pourtant l'offre continue d'augmenter, a relevé Carl Larry. Nous commençons à nous inquiéter de ce que nous allons faire avec toute cette offre. En arrière-plan, les interrogations concernant les conséquences d'une présidence Trump sur le marché de l'or noir se poursuivaient. Ses positions pourraient à la fois soutenir l'offre et la demande aux Etats-Unis. Donald Trump devrait probablement autoriser plus de forages pétroliers, a jugé James Williams de WTRG dans une note, ce qui pourrait relancer une production déprimée depuis le début de l'année. Les propositions de M. Trump sont par ailleurs vues comme potentiellement stimulantes pour la demande, ont jugé les experts de Commerzbank dans une note, relevant notamment qu'il avait fait part à plusieurs reprises de son intention de lever les restrictions sur l'utilisation d'énergie fossile qui avaient été mises en place durant les mandats de M. Obama. A l'international, les investisseurs se demandent si le président élu mardi mettra en place des mesures protectionnistes et quelle sera son attitude envers les pays producteurs et plus particulièrement l'Iran. Donald Trump a critiqué à plusieurs reprises l'accord sur le nucléaire iranien qui avait permis la levée des sanctions internationales et le retour en force de ce pays sur le marché du pétrole. Excès d'offre En Asie, les cours du pétrole reculaient dans les échanges matinaux, les inquiétudes sur l'excès d'offre mondiale reprenant le dessus. Vers 02H30 GMT, le baril de light sweet crude (WTI), référence américaine du brut, pour livraison en décembre, reculait de 29 cents à 44,98 dollars dans les échanges électroniques en Asie. Le baril de Brent, référence européenne, pour livraison en janvier, cédait 18 cents à 46,18 dollars. Le brut prenait le contrepied des marchés d'actions qui s'envolaient jeudi après le choc initial suscité par l'élection de Donald Trump à la présidentielle américaine, les fondamentaux repassant au premier plan. L'Opep tiendra sa réunion officielle à Vienne à la fin du mois. Les cours du brut vont vraisemblablement évoluer en dents de scie alors que les investisseurs tentent de peser la possibilité d'une baisse coordonnée de la production des pays membres de l'Opep et d'autres grands producteurs, a-t-il dit. Pour Jeffrey Halley, analyste chez OANDA, la perspective que le président américain élu réduise les impôts pourrait déboucher sur une hausse de la production d'or noir aux Etats-Unis. Moins de paperasses, moins d'impôts, en théorie, cela conduirait à une augmentation de la production aux Etats-Unis. Ce n'est pas une bonne nouvelle pour les pays membres et non membres de l'Opep qui tentent de se mettre d'accord sur une limitation de la production, a-t-il déclaré. Le marché pourrait rester submergé La planète pourrait restée submergée d'or noir l'an prochain si l'Opep ne s'accorde pas sur une baisse de sa production, car les producteurs continuent à pomper intensivement face à une demande mondiale moins dynamique, a prévenu jeudi l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Les producteurs, qu'ils appartiennent ou non à l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), ont ouvert à fond les robinets en octobre: l'offre mondiale de pétrole a augmenté de 800 000 barils par jour sur un mois comme sur un an, pour s'établir à 97,8 millions de barils par jour (mbj). Les pays tiers ont produit 57 mbj (+485 000 bj sur un mois) tandis que l'Opep a pompé au niveau record de 33,83 mbj, soit 230 000 bj de plus qu'en septembre, quand le cartel pétrolier s'était pourtant engagé à la surprise générale, lors d'une réunion à Alger, à ramener sa production entre 32,5 et 33 mbj. Mais les quotas pour chacun des 14 pays membres doivent encore être décidés le 30 novembre à Vienne et l'équilibre futur du marché dépendra de l'issue de ces discussions, a prévenu l'AIE dans son rapport mensuel sur le pétrole: Quelle que soit l'issue, la réunion de Vienne aura un impact majeur sur un éventuel - et maintes fois reporté - rééquilibrage du marché pétrolier. Le surplus d'offre pèse sur les prix du pétrole, qui ont perdu plus de la moitié de leur valeur depuis l'été 2014 et tournent actuellement autour de 45 dollars le baril. Pour stimuler les cours, l'Opep a décidé d'abandonner sa stratégie d'ouvrir les vannes pour défendre ses parts de marché face au boom des hydrocarbures de schiste américains. Surplus ou déficit Si un accord est trouvé, le marché passera rapidement d'un surplus à un déficit en 2017, avec toutefois d'importants stocks qui mettront du temps à se résorber, a précisé l'agence basée à Paris. Dans le cas contraire, le marché restera excédentaire tout au long de l'année, une situation qui s'accompagnerait du risque d'une rechute des prix du pétrole. Car l'offre en provenance des pays hors Opep ne devrait pas se tarir, bien au contraire. Après un repli de 0,9 mbj attendu pour cette année, leur production devrait repartir en 2017 et même croître dans une plus grande proportion qu'anticipé précédemment. La hausse attendue s'élève à un peu moins de 0,5 mbj à 57,2 mbj: c'est une prévision de 110 000 barils par jour supplémentaires provenant principalement de Russie, du Brésil, du Canada et du Kazakhstan, où un gisement géant a été mis en production en octobre. Cela signifie que l'offre mondiale pourrait continuer à croître en 2017, comme ce fut le cas en 2016, a commenté l'AIE. Quant à la demande mondiale de brut, le bras énergétique de l'OCDE a réitéré sa prévision d'une croissance moins dynamique en 2016, par rapport à l'année précédente. Elle devrait augmenter de 1,2 mbj environ à 96,3 mbj, freinée par des décélérations aux Etats-Unis et en Chine, après une croissance de 1,8 mbj en 2015, le niveau le plus élevé enregistré en cinq ans. La consommation devrait ensuite progresser dans les mêmes proportions en 2017 pour s'établir à 97,5 mbj. Il y a peu d'indications suggérant que l'activité économique est suffisamment robuste pour générer une croissance de la demande plus élevée et compenser l'absence de stimulus en provenance de la faiblesse des prix, qui avait pourtant été observé quand les cours avaient chuté sous les 30 dollars le baril début 2016. Hausse des stocks de brut Les stocks de pétrole brut ont progressé la semaine dernière aux Etats-Unis, de façon un peu plus marquée que prévu, selon des chiffres publiés mercredi par le département de l'Energie (DoE). Lors de la semaine achevée le 4 novembre, les réserves commerciales de brut ont progressé de 2,4 millions de barils à 485 millions de barils, alors que les experts interrogés mardi par l'agence Bloomberg ne tablaient que sur une hausse de 1,5 million de barils. Les chiffres officiels du DoE sont toutefois moins marqués que les estimations de la fédération privée American Petroleum Institute (API) qui avait fait état mardi soir d'un bond plus important des stocks de brut. A ce niveau, les réserves américaines commerciales de pétrole brut s'inscrivent en hausse de 6,6% par rapport à la même période en 2015 et se situent proches de la limite supérieure de la fourchette moyenne en cette époque de l'année, comme l'a noté le DoE. En revanche, les réserves d'essence ont décliné de 2,8 millions de barils, les analystes compilés par Bloomberg ne prévoyant qu'une baisse de 1,75 million de barils. Elles sont tout de même en hausse de 3,6% par rapport à la même époque de l'an dernier et restent bien au-dessus de la limite supérieure de la fourchette moyenne à cette période. Quant aux stocks de produits distillés, (gazole, fioul de chauffage, kérosène), ils ont reculé de 1,9 million de barils, soit presque autant que le déclin de 2 millions de barils que prévoyaient les experts interrogés par Bloomberg. Par rapport à la même époque de 2015, ils sont en hausse de 5,3% et restent, comme ceux d'essence, bien au-dessus de la moyenne à cette période. Production en hausse La production américaine a poursuivi son rebond en montant de 170 000 barils par jour (b/j) à 8,692 millions de barils par jour (mbj). Très surveillées par les investisseurs, les réserves de brut du terminal pétrolier de Cushing (Oklahoma, Sud), qui sert de base au prix du pétrole échangé à New York, sont restées stables à 58,5 millions de barils. Toutes catégories confondues, les stocks américains pétroliers ont baissé de 7,0 millions de barils. Du côté de la demande, sur les quatre dernières semaines, les Etats-Unis ont consommé en moyenne 20,1 mbj de produits pétroliers, soit une hausse de 1,5% par rapport à la même époque de l'an dernier. Durant la même période, la demande d'essence a baissé de 2,1% mais celle de produits distillés a monté de 1,0%, dans les deux cas sur un an. Le marché du pétrole est fortement marqué mercredi par les incertitudes entourant l'élection inattendue de Donald Trump à la présidence américaine.