L'Assemblée tunisienne des représentants du peuple (ARP) a tenté hier de dégager un consensus parmi les parlementaires sur le projet de loi organique relatif aux élections locales et municipales, un préalable à la tenue des premières élections locales depuis la révolution de 2011. Les membres de la Commission des compromis à l'ARP ont tenté de surmonter leurs différends et retrouver le chemin du consensus sur le projet de loi "spécifique", amendant et complétant la loi relative aux élections et référendums, pour que les premiers scrutins municipaux puissent avoir lieu cette année, le plus vite sera le mieux, selon les médias tunisiens. Repoussées maintes fois, ces élections annoncées par le chef du gouvernement Habib Essid, pour le 26 mars prochain, devront aboutir à l'installation des institutions locales pérennes, dans le cadre de la décentralisation et la gouvernance participative des collectivités locales inscrites dans la Constitution adoptée en 2014. Après la révolution qui a conduit à l'éviction de l'ancien président Zine El Abidine Ben Ali en janvier 2011, les municipalités tunisiennes ont été dissoutes et remplacées par des "délégations spéciales" chargées de gérer les affaires courantes. Les responsables confiants malgré le retard Le président tunisien Béji Caïd Essebsi s'est dit récemment confiant sur la tenue des élections locales. "C'est vrai que ça a traîné un peu. Mais ça n'est pas le fait du gouvernement. Nous avons une législation très encombrée. L'Assemblée travaille sans relâche", a-t-il fait valoir. Le projet de loi électorale est "désormais sur la table. Je pense que ça va passer maintenant largement. C'est une loi essentielle dans notre construction démocratique", a-t-il soutenu. "Nous sommes une démocratie naissante, nous n'avons pas de précédent (...). Il est certain que nous apprenons un peu comment on règle ces problèmes dans une démocratie, et évidemment ça prend du temps", a dit M. Caïd Essebsi. Questionné sur la possibilité de tenir ces scrutins d'ici la fin de l'année, il a rétorqué que ceci n'était "pas de (sa) compétence" mais souligné qu'il ne fallait "pas traîner". Selon le président du groupe de réflexion Joussour, Khayam Turki, ces élections locales doivent apporter "un véritable maillage démocratique" et leur report incessant est la "grande fragilité démocratique actuelle du pays". Des rencontres entre les représentants du gouvernement et les groupes parlementaires ont, récemment, eu lieu dans le but de trouver une issue favorable aux points de désaccords sur un certain nombre d'articles de ce projet de loi. "Il y a une forte volonté de la part du gouvernement et des différends groupes parlementaires pour adopter le projet de loi relatif aux élections locales et municipales dans les plus brefs délais", a indiqué samedi le ministre des Affaires locales et de l'Environnement tunisien, Riadh Mouakher. De son côté, Chafik Sarsar, président de l'instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) avait dit auparavant que "c'est non seulement une obligation (constitutionnelle) (...), c'est un besoin, parce que le citoyen tunisien a besoin d'avoir des municipalités efficaces, légitimes pour (qu'elles puissent) réellement réussir leur mission. Ce n'est pas normal du tout qu'on ait des structures provisoires qui dépassent les six ans", avait-il ajouté. Craintes de fraude, financement des campagnes... motifs d'un blocage Au cœur du différend, notamment l'article relatif au droit de vote des sécuritaires et des militaires aux élections. Aussi le financement des campagnes, qui n'est pas évoquée dans la loi électorale, pose problème et fait craindre des fraudes et une mainmise des partis les plus importants et ayant le plus de moyens. L'ARP a été confronté également à une autre difficulté celle liée à la création des 64 nouvelles municipalités prévues par la Constitution tunisienne, qui intègre près de 3,5 millions de Tunisiens qui ne bénéficient pas de commune de référence jusque-là. La Tunisie a organisé deux scrutins législatifs. Le premier, en 2011, remporté par le parti de Rached Ghanouchi Ennahdha et le second, en 2014, a vu la victoire du parti du président de la République, Nidaa Tounes. Le processus révolutionnaire continue Pour sa part, le secrétaire général du parti des patriotes démocrates unifié (Ppdu), Zied Lakhdhar, a estimé, dimanche, que " le processus révolutionnaire en Tunisie continue malgré les revers ". Aujourd'hui, il y a un complot qui vise à faire échouer la révolution et une volonté de blanchir les symboles de la corruption et de la dictature, a-t-il dit, dimanche, à l'ouverture du 1er congrès de la section régionale du parti à Gafsa. Il a critiqué la coalition au pouvoir qui " passe sous silence la contrebande et le crime organisé " et " réprime les contestations populaires ". " Le Ppdu rejette les politiques et les choix de la coalition au pouvoir et soutient les mouvements de protestation pacifiques et les revendications légitimes des marginalisées ", a-t-il lancé. Zied Lakhdhar a appelé les militants et les partisans du Ppdu à soutenir les catégories démunis et les sans emploi et se faire leur porte-voix. Evoquant la question du retour des Tunisiens des zones de conflit, Zied Lakhdhar s'est interrogé sur le changement d'attitude de certaines parties. Lors de ce congrès, 52 congressistes devraient élire 9 membres de la section régionale du Ppdu à Gafsa parmi 13 candidats en lice.