L'Union européenne (UE) tiendra désormais compte du statut "distinct et séparé" du territoire du Sahara occidental dans ses échanges avec le Maroc en matière d'énergie renouvelable, a affirmé le Commissaire européen chargé de l'action pour le climat et de l'énergie, Miguel Arias Canete. "La déclaration (sur l'échange d'électricité renouvelable) sera mise en œuvre en tenant dûment compte du statut distinct et séparé du territoire du Sahara occidental selon le droit international", a-t-il affirmé dans sa réponse, au nom de la Commission européenne, aux députés européens Florent Marcellesi, Josep-Maria Terricabras et Jill Evans qui l'exhortait à exclure l'énergie produite au Sahara occidental de ces échanges. Le 17 novembre dernier, le Maroc, l'Allemagne, la France, l'Espagne et le Portugal ont signé à Marrakech, en marge de la COP22, une déclaration commune les engageant à élaborer une feuille de route pour l'échange d'électricité renouvelable. Selon Canete, cette déclaration signée dont le but d'identifier les obstacles au commerce de l'électricité renouvelable entre les cinq pays signataires et proposer des moyens de les surmonter, "ne vise pas à établir des obligations légales pour les signataires". Dans leur question adressée à la Commission, ces députés européens ont invité l'exécutif européen à s'expliquer sur la procédure qu'il compte suivre pour s'assurer que ces échanges "se conforment à l'obligation de l'Union de respecter le droit international et les principes des Nations unies". Ils ont fait remarquer dans ce contexte que la déclaration porte sur le plan énergétique du Maroc, qui comprend des installations de production d'énergie à partir de sources renouvelables sur le territoire du Sahara occidental, sur lequel la souveraineté du Maroc n'est pas reconnue par les Nations unies, ni par l'UE et ses Etats membres. "Si la directive 2009/28/CE envisage la participation des Etats membres à des projets conjoints avec des pays tiers et autorise la comptabilisation de l'électricité importée des pays tiers dans les objectifs des Etats membres", ont-ils rappelé, ces eurodéputés ont souligné que dans le cadre du droit secondaire, la mise en œuvre de cette directive "est soumise à l'application des articles 3 et 21 du traité UE, qui prévoient l'obligation de respecter la charte des Nations unies et le droit international".
Une déclaration inédite Evoquant le lancement récent du paquet "Une énergie propre pour tous les Européens", les députés européens Florent Marcellesi, Josep-Maria Terricabras et Jill Evans ont exhorté la Commission à fournir des explications sur ses intentions pour "tenir compte des considérations ci-dessus, notamment en ce qui concerne la traçabilité et la responsabilité en matière de commerce de l'énergie avec les pays tiers". Dans une lettre, datée du 18 novembre dernier, 52 eurodéputés, représentants presque tous les groupes politiques siégeant au Parlement européen, ont exigé que les Etats membres de l'UE fournissent des informations aux entreprises qui souhaitent investir dans les activités du gouvernement marocain au Sahara occidental en leur expliquant que ces activités sont contraires au droit international. La déclaration du Commissaire Canete est "inédite" et d'une importance "capitale", a réagi l'ambassadeur d'Algérie à Bruxelles, Amar Belani, relevant que cette déclaration "instaure un nouveau positionnement politique et juridique" de l'UE sur la question du Sahara occidental et "ne manquera pas d'avoir des implications significatives sur les accords conclus ou à négocier avec le Maroc". Selon M. Belani, c'est la toute première fois que des hauts responsables de l'UE se réfèrent explicitement à l'arrêt de la Cour de justice de l'UE (CJUE) du 21 décembre 2016, dont "le caractère contraignant est désormais incontournable, pour prendre en compte le statut du Sahara occidental en tant que territoire autonome, séparé et distinct au regard du droit international et en vertu du principe d'autodétermination qui lui est applicable". Cette nouvelle jurisprudence européenne sur laquelle se fonde le Commissaire Canete, a-t-il poursuivi, "rend caduque la fiction de 'puissance administrante de facto' accolée injustement et de manière non fondée à la puissance occupante". Pour M. Belani, cette jurisprudence devrait "concerner tous les accords entre le Maroc et l'UE pour faire en sorte que le territoire du Sahara occidental ne soit pas inclus, d'une manière ou d'une autre, dans le champ territorial de ces accords". "Le principe coutumier de l'autodétermination est applicable aux relations entre l'UE et le Maroc comme le reconnaît la CJUE dans le paragraphe 88 de son arrêt du 21 décembre 2016 et comme l'avait énoncé, en son temps, la Cour internationale de Justice dans son arrêt consultatif sur le Sahara occidental", a-t-il expliqué.