Les conflits énergétiques entre l'Ukraine de Viktor Iouchtchenko et la Russie de Vladimir Poutine se suivent et se ressemblent. Après la crise gazière de 2006 qui a jeté le froid en Europe, voilà que le géant russe Gazprom menace d'interrompre une partie de ses livraisons de gaz à l'Ukraine. En effet, Gazprom a menacé jeudi d'arrêter une partie de ses livraisons de gaz à l'Ukraine en raison d'arriérés de dettes. Si la situation sur la dette ukrainienne "n'est pas résolue avant lundi 11 février, ( la veille d'une visite du président ukrainien à Moscou), Gazprom n'aura pas d'autre option commerciale que de mettre fin aux livraisons de gaz russe supplémentaire à l'Ukraine", a déclaré le groupe dans un communiqué. L'Ukraine est généralement approvisionnée par Gazprom en gaz en provenance d'Asie centrale. Mais depuis le début de l'année, elle a également reçu du gaz russe puisé dans les réserves de Gazprom, à l'instar de la Turquie et la Grèce, en raison d' "un problème de livraisons insuffisantes de la part des pays tiers", rappelle le porte-parole du groupe, Sergueï Kouprianov. Ce gaz russe supplémentaire, qui représente un quart de la totalité des livraisons en Ukraine, n'a pas été payé, a expliqué le groupe, qui estime à 1,5 milliard de dollars les arriérés de dette de Kiev. Les autres pays en revanche ont payé les livraisons, a-t-il précisé. "L'Ukraine a reçu en ce moment 1,5 milliard de m3 de gaz russe", selon Gazprom. "Le total des arriérés s'élève à 1,5 milliard USD, dont 500 millions pour le gaz fourni depuis le 1er janvier 2008". Côté ukrainien, la compagnie nationale Naftogaz nie l'existence d'une dette envers Gazprom, a indiqué vendredi le service de presse du holding ukrainien. "Gazprom peut faire parvenir à la direction de la compagnie RosUkrEnergo ses prétentions concernant un éventuel entreposage de 1,5 milliard de mètres cubes de gaz en territoire ukrainien et la contraction d'une dette de 500 millions de dollars", stipule le communiqué de presse. Le monopole des importations de gaz en Ukraine revient à l'entreprise suisse RosUkrEnergo, dont 50% des parts sont détenues par Gazprom. Celle-ci revend le gaz russe à UkrGaz-Energo, société chargée de l'exportation du gaz et détenue à parts égales par RosUkrEnergo et Naftogaz. UkrGaz-Energo vend la plupart du gaz à Naftogaz, chargée de le livrer à la population ukrainienne. Le gouvernement ukrainien espère vite régler son litige avec le géant gazier russe a déclaré jeudi le vice-premier ministre ukrainien Alexandre Troutchinov. Les négociations risquent cependant d'être difficiles d'autant que le Premier ministre Mme Timochenko, qui doit se rendre à Moscou le 21 février, a récemment annoncé qu'elle entendait "changer" la donne avec la Russie dans le domaine énergétique, en faisant davantage payer Moscou pour le transit de son gaz et en supprimant les intermédiaires comme RosUkrEnergo. Gazprom a, toutefois, assuré que l'approvisionnement de l'UE ne serait pas affecté. "Cette situation ne devrait pas avoir d'impact sur les livraisons de gaz de Gazprom à ses autres clients en Europe. Le groupe est en contact étroit avec ses partenaires européens et avec la Commission européenne, et continuera de les tenir informés de toute évolution", a ajouté Gazprom. A Bruxelles, le commissaire européen à l'Energie Andris Piebalgs a confirmé avoir reçu des assurances de Gazprom que l'approvisionnement de l'UE ne serait pas affecté, mais a appelé les deux parties "à trouver une solution à cette question commerciale aussi vite que possible". Le gouvernement italien a aussi fait savoir qu'il n'avait "aucune inquiétude" pour ses approvisionnements. Les tensions russo-ukrainiennes sur le prix du gaz ont déjà donné lieu à plusieurs crises entre les deux pays et à une brève interruption des livraisons vers l'Europe en janvier 2006. Environ 80% du gaz russe consommé par les 27 pays membres de l'UE transitent par l'Ukraine et 20% par le Bélarus, le tout acheminé par gazoducs.